Il s’agit de la négociation demandée à l’Union européenne (UE) par les Etats-Unis d’Amérique (EU) d’un accord bilatéral de libre échange.
Derrière cet intitulé apparemment anodin, se cache la volonté de l’empire, d’assurer la domination sans partage de ses industries culturelles, notamment cinématographiques de ses Majors, par la soumission de l’UE aux règles de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) qui n’admettent pas l’exception culturelle.
Si les Etats-Unis obtenaient entière satisfaction, ils auraient enfin leur revanche triomphale sur la France, le Québec, l’OIF, principaux promoteurs de la convention UNESCO du 20 octobre 2005.
Convention bête noire des Etats-Unis, contre laquelle ils avaient été les seuls, avec leur indéfectible allié Israël, à voter.
Convention contre laquelle ils ont continué à lutter avec acharnement - par accords bilatéraux de libre échange imposés à des Etats faibles signataires de ladite convention UNESCO (Maroc, Cambodge, et plusieurs autres...) pour effacer leur grave défaite diplomatique et promouvoir leurs énormes intérêts financiers en ce domaine.
Si l’UE acceptait les conditions états-uniennes, c’est la France qui souffrirait le plus gravement de cette soumission, car elle a toujours su jusqu’à ce jour exempter de ces règles impériales ses propres industries culturelles, notamment la belle vitalité de sa création et de sa distribution cinématographiques, d’autant plus gênante pour les Majors que les protections et subventions françaises contribuent, par les coproductions, à tenir la tête hors de l’eau des cinémas européens, africains, et autres, qui n’ont pas su protéger leur cinéma de la domination des Etats-Unis.
Malheureusement, les Etats européens membres de l’UE ont délégué à celle-ci, à la Commission de Bruxelles, leurs pouvoirs de négociation avec l’OMC et avec les Etas-Unis en matière d’accords touchant au dogme intangible de la concurrence libre et non faussée. La négociation au nom des Etats européens est donc menée par le "Commissaire européen" compétent, actuellement M. Karel de Gucht. Or, dans leur grande majorité, les Etats européens ont déjà renoncé à vraiment protéger leurs industries culturelles, ou sont prêts à le faire pour obtenir un accès plus large de leurs produits au marché états-unien dans les autres domaines. La France en est donc hélas réduite à faire le siège de partenaires européens a priori mal disposés, et de ce Commissaire qui adhère pleinement à l’idéologie dominante, et dont le pouvoir de négociation et de conviction sera faible en ce qui concerne la défense de l’ex-"exception cultuelle française".
La France elle-même est divisée sur ce sujet, et nos gouvernements, depuis quelques années, ne sont pas a priori hostiles à l’empire anglo-saxon ni à son relais bruxellois. Heureusement, le monde culturel français semble se mobiliser et exercer les pressions nécessaires. La résolution jointe du Sénat en est la première manifestation officielle. Cette démarche ne peut que recueillir le soutien très actif de nos associations de promotion du français et de la Francophonie.
Albert Salon - Avenir de la Langue Française