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Afghanistan : Pour les Français comme pour les Britanniques, il faut rentrer « aussitôt que possible... » arch 2010

Recevant tout récemment à Londres en la personne du président afghan Hamid Karzaï, à son retour de Washington, son premier chef d'Etat, le nouveau Premier ministre britannique David Cameron avait souligné que l'Afghanistan était pour lui « la priorité numéro un ». C'est pourquoi trois membres de son gouvernement (le secrétaire au Foreign Office ainsi que les ministres de la Défense et du Développement international) ont profité du week-end de la Pentecôte pour se rendre dès que possible sur le terrain.
Avec près de 10 000 soldats britanniques déployés dans ce pays, principalement dans la province méridionale du Helmand, l'un des principaux bastions des talibans, la Grande-Bretagne dispose en Afghanistan du deuxième contingent le plus important après les États-Unis, où quelque 286 soldats britanniques ont perdu la vie depuis l'intervention des forces internationales en 2001. Vendredi encore, un soldat du 40e commando des Royal Marines a ainsi été tué dans l'explosion d'une mine artisanale alors qu'il faisait une patrouille à pied dans le Helmand.
« J'aimerais que nos forces rentrent aussitôt que possible... », a d'ailleurs prévenu Liam Fox, le nouveau ministre de la Défense, dans une interview au quotidien britannique Times. « Nous ne sommes pas un gendarme universel. Nous ne sommes pas en Afghanistan pour nous occuper de la politique d'éducation d'un pays troublé du XIIIe siècle. Nous sommes là pour éviter que le peuple britannique et nos intérêts globaux ne soient menacés », a-t-il encore ajouté fort à propos alors que l'insurrection talibane gagne en terrain et en intensité dans le pays. L'objectif affiché par le nouveau gouvernement britannique est donc parfaitement clair : mettre le paquet pour pouvoir se désengager au plus vite. Telle devrait être la ligne de tous les Occidentaux et Alliés engagés dans cette guerre qui n'en finit pas. Car, à l'image des Britanniques qui le disent désormais ouvertement, les Français (qui comptent actuellement 3 700 hommes en Afghanistan) devraient eux aussi rentrer « aussitôt que possible ».
S'attaquer à la situation en Afghanistan est « une de nos priorités les plus urgentes », a confirmé pour sa part le nouveau secrétaire au Foreign Office, William Hague, qui accompagnait le ministre de la Défense à Kaboul. « Cela nous coûtera beaucoup de temps, d'énergie et d'effort et il est donc essentiel que les ministres aient une parfaite compréhension des thèmes propres à l'Afghanistan (...). C'est pourquoi nous sommes venus ici à la première occasion », a-t-il expliqué avec un certain bon sens. Avant d'ajouter toutefois : « Il n'y aura pas de calendrier arbitraire ou artificiel. Nous devons donner le temps et le soutien qu'il faut à la stratégie qui a été décidée. »
Le dernier du trio, Andrew Mitchell, ministre au Développement international, a quant à lui affirmé qu'il étudierait au plus vite « les façons d'améliorer la qualité et l'impact de l'aide » à l'Afghanistan. Voilà pour les intentions et elles sont plutôt bonnes et respectables puisqu'elles s'inscrivent dans la droite ligne de ce qui avait été décidé lors de la Conférence de Londres, en janvier dernier, qui avait ouvertement prôné une stratégie de « réconciliation nationale ».
Le Président afghan s'y emploie, qui a convoqué une « loya jirga » (assemblée tribale traditionnelle) de paix finalement, repoussée du 29 mai au 2 juin, et qui durera trois jours et réunira plus de 1 600 délégués pour « prendre le pouls du pays profond ». Mais en attendant que celle-ci puisse se réunir en toute sécurité à Kaboul et qu'elle porte ses fruits, les attentats et attaques se multiplient aux quatre coins du pays et, comme la semaine dernière, jusqu'au cœur de la capitale.
Samedi dernier, c'est un officier français qui a été tué par l'explosion d'un IED (engin explosif improvisé) au côté d'un soldat néerlandais et de leur interprète afghan en Oruzgan, la province natale du mollah Omar, dans le sud du pays. Agé de 38 ans, le capitaine Christophe Barek-Deligny du 3e régiment du génie de Charleville-Mézières encadrait l'année nationale afghane au combat au sein de ce que l'on appelle une OMLT (Opérationel mentor and liaison team) déployée en Oruzgan, où il était arrivé depuis un mois seulement. C'est le 43e militaire français tué en Afghanistan.
Pour tous ceux que passionne l'engagement des soldats français en Afghanistan, où nos hommes mettent chaque « leur peau au bout de leurs idées » même si on ne gagnera jamais cette guerre, je conseille l'excellent livre de Patrick de Gmeline, Se battre pour l'Afghanistan (*), consacré aux soldats de montagne du 27e BCA (bataillon de chasseurs alpins) de Cran-Gevrier (Haute-Savoie), à leurs six mois de préparation opérationnelle comme à leurs six mois de guerre et de pacification en Kapisa. Juste avant de partir servir en Afghanistan, leur chef de corps, le colonel Nicolas Le Nen rappelait à tous ses hommes les règles d'engagement et de discipline dans le combat contre les talibans : « Sur ce théâtre, il n'y a pas de petites missions ou de missions faciles, il n'y a que des missions dangereuses et très dangereuses ! » La mort d'un officier français vient encore de nous le démontrer.
YVES BRUNAUD Présent du 26 mai 2010
(*) Se battre pour l'Afghanistan, Patrick de Gmeline, Presses de la Cité, 396 pages, 21 euros.

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