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Les impostures d’un système qui prétend être démocratique

De Philippe Pichot-Bravard sur Le Rouge et Le Noir :

"[...] Le système électoral est désormais complètement verrouillé par une oligarchie constituée des grands partis, de cercles d’influence, de groupes d’intérêt, de la télévision, des radios, des grands journaux, et de ceux qui, les finançant, leur donnent des consignes. La rétraction croissante, depuis le milieu des années 90, du cercle des opinions permises et l’emprise, dans le débat public, d’une pensée officielle servie par une langue piégée et conceptuelle, apanage d’une oligarchie idéologique, joue là un rôle très important. Une majorité de Français se sentent aujourd’hui exclus du jeu politique, ce qui tarit la source de sa légitimité.

En outre, le mépris que manifeste cette oligarchie à l’égard de la population est de plus en plus manifeste, comme l’ont montré l’affaire du Syndicat de la Magistrature ou encore le sort réservé à la pétition envoyée au CESE. Ce mépris contribue au mécontentement d’une part importante de la population, et en particulier de la partie de la population qui est habituellement la plus disciplinée, la plus travailleuse, la plus respectueuse des règles : celle qui a manifesté les 24 mars et 26 mai derniers.

Sans doute, quand on y regarde de près, le système représentatif institué à partir de 1789, a toujours été un édifice de stuc bâti en trompe l’œil. La confusion entretenue entre l’affirmation du caractère démocratique des institutions et leur réalité représentative n’est pas le moindre de ces artifices. Les apparences, soigneusement sauvegardées, ont, pendant longtemps, garanti la pérennité du système. Tout se passe aujourd’hui comme si, le stuc s’effritant, la réalité apparaissait aux yeux d’un grand nombre de nos compatriotes, révélant les nombreuses impostures d’un système qui prétend être démocratique alors qu’il ne l’est pas, et qu’il ne l’a jamais été, ayant toujours été représentatif, c’est-à-dire par essence oligarchique ; un système qui assure, concrètement, beaucoup moins de libertés qu’il en promet. S’insinue alors, de plus en plus, la conviction que les « valeurs de la République » n’ont peut-être pas la consistance qu’on leur prêtait, qu’elles seraient, au mieux des concepts abstraits sans réelle portée concrète, au pire un instrument de manipulation de l’opinion aux vertus narcotiques. Cette conviction nourrit la crise de régime que nous connaissons aujourd’hui.

Pourtant, l’existence d’une crise de régime n’entraîne pas nécessairement la chute de celui-ci. Quoiqu’affaibli, le régime conserve la capacité de se défendre, notamment en changeant, ne serait-ce qu’apparence, ce qui doit être changé pour lui permettre de survivre. Notre histoire constitutionnelle, et notamment les changements de régime survenus en 1789, en 1792, en 1799, en 1814, en 1815, en 1830, en 1848, en 1851 ou en 1958, nous montre, en outre, qu’un régime conserve toujours cette capacité tant qu’il n’est pas abandonné par une partie, au moins, de ceux qui ont pour mission de le défendre.

A chaque fois que la République s’est sentie menacée, elle a su se défendre énergiquement en n’hésitant pas à écarter l’application des règles juridiques, à détourner ou à méconnaître ses propres lois pour réprimer l’opposition dont elle se sentait menacée, même lorsque celle-ci s’exprimait pacifiquement. La violence policière, le harcèlement administratif et la persécution fiscale étant les moyens les plus courants. Nous en faisons actuellement l’expérience, au moment même où plusieurs membres du gouvernement n’hésitent pas à renouer publiquement avec les grands ancêtres de 1793 et à se réapproprier leur projet totalitaire de régénération de l’homme. On peut craindre, à cet égard, que la répression s’accentue dans les prochains mois, visant plus directement les mouvements de jeunesse, les écoles hors contrat, et même, qui sait, certaines congrégations religieuses. La bataille ne fait que commencer. Et cette bataille est d’abord celle du Droit et de la Justice contre l’arbitraire du pouvoir."

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