Dans l’entretien accordé au JDD le 18 août, Jean-Luc Mélenchon a redit son souhait de disputer au PS la première place à gauche en 2014. Il estime que « le parti de Hollande peut s’effondrer » aux municipales et surtout aux européennes mais insiste aussi sur son regret de ne pas avoir « assez mobilisé contre le FN » lors des dernières élections partielles. Extrême droite qui fut aussi au menu la semaine dernière de ce qui sert d’université d’été au Parti de Gauche (PG) et au Front de Gauche (FG), à savoir le Remue-méninges du PG près de Grenoble et les Estivales du Front de Gauche à Saint-Martin-d’Hères. Quatre interventions dont les intitulés sont tout un programme avaient été programmées par leur peu finaud spécialiste maison, Alexis Corbière : « L’extrême droite dans les années 30 », Le FN repeint en parti normal ? », « Un nouveau racisme, le racisme antimusulman », « L’extrême droite bleu marine »…
Si le combat contre la « bête immonde » fait office de ciment commode, elle ne suffira peut être pas à maintenir la cohérence et l’unité du Front de Gauche confronté à des intérêts boutiquiers, des choix tactiques et stratégiques inconciliables entre eux.
Vendredi soir, une semaine avant que ne débute l’université d’été du Parti communiste qui se tiendra aux Karellis (Savoie), lors du discours de clôture du Remue-méninges du Parti de Gauche, son coprésident, Jean-Luc Mélenchon, a vivement attaqué le secrétaire national du Parti communiste, Pierre Laurent.
Rappelons au passage que Pierre Laurent jeta tout son poids d’apparatchik dans la balance, et il s’avéra décisif, pour que Jean-Luc Mélenchon soit choisi par les militants communistes invités à désigner leur candidat pour l’élection présidentielle de 2012 ; un résultat alors assez serré puisque 40 % des communistes votèrent contre…
Mais rien ne va plus entre les deux hommes dont les relations se détériorent depuis maintenant plusieurs mois. Ce dernier a eu l’audace (?), dans un entretien accordé à Libération, d’avouer qu’il était en pourparler avec le PS parisien pour obtenir une dizaine de sièges ; ce qui acterait un accord PS-PC dès le premier tour. Moyennant quoi M. Laurent a logiquement appelé à refuser la « provocation et l’invective » à l’encontre des sociaux-libéraux de la rue de Solferino…
Etaient visés ici les propos de M. Mélenchon sur François Hollande et Manuel Valls. En réponse, Jean-Luc Mélenchon a alors qualifié M. Laurent de « tireur dans le dos ». « Nous avons un devoir de respect mutuel et de solidarité », a-t-il poursuivi avant d’ajouter que le Front de Gauche ne supporterait pas « de compétition d’ego ».
Dans les faits, cet échange d’amabilités traduit l’impasse dialectique dans laquelle se trouve plongée la gauche de la gauche à l’occasion des municipales : on tape à bras raccourci sur un gouvernement Ayrault accusé de pratiquer une politique sarkozyste, mais on invite à l’union avec le PS pour « faire barrage à la droite et à l’extrême droite ».
Créditons M. Mélenchon d’une cohérence que n’ont pas beaucoup de ses petits camarades, il est loin désormais le temps ou il appelait à voter Hollande au second tour de la présidentielle ! Il propose désormais aux Français « de renverser la table » comme il le fit tout au long de sa campagne du premier tour.
Alors qu’Harlem Désir et les pontes socialistes multiplient les appels à l’union de toutes les forces de gauche dés le premier tour des municipales, il plaide ainsi pour « l’autonomie » vis-à-vis du PS, pour « l’essai d’une nouvelle convergence avec les Verts autonomes et les socialistes critiques, le NPA, les collectifs… ».
Nous touchons là aux intérêts divergents du Parti de Gauche et d’un Parti communiste qui tout seul ne pèse plus grand-chose (1,93 % à la présidentielle de 2007 avec Marie-George Buffet), dont la survie municipale dépend du bon vouloir du PS avec lequel il est associé dans de nombreuses villes.
Le PG lui, n’a pratiquement aucune implantation locale et donc très peu de maires et de conseilleurs municipaux sortants, en un mot pas grand-chose à perdre…
Le Monde rapportait que lors des Estivales du Front de Gauche, Pierre Laurent a évoqué les « combats municipaux – le droit aux vacances ou encore des politiques de logement innovantes – pour justifier d’éventuelles alliances avec le PS dès le premier tour, seule solution pour espérer sauver nombre de ses élus ».
« Ses arguments n’ont pas convaincu M. Mélenchon qui a répliqué, cinglant, qu’il n’y a pas une seule ville de plus de 10 000 habitants dans laquelle les membres du Parti de gauche feront autre chose qu’une liste autonome au premier tour. (…) Pendant ces deux jours, le parti de M. Mélenchon n’a cessé de renvoyer le PCF à ses contradictions, l’appelant à mettre son discours en adéquation avec ses actes. Je ne vois pas comment les communistes pourront se mobiliser contre la réforme des retraites et se retrouver sur les mêmes listes que ceux qui acceptent ces politiques d’austérité, note Danielle Simonnet, candidate du PG à Paris.».
« (…). Depuis des mois, le PG met la pression sur le PCF et sur ses militants pour tenter de faire progresser l’idée de l’autonomie. Au sein du PCF, il y a des discussions », affirme François Delapierre , Secrétaire national du PG , « qui juge que la position de M. Laurent est étroite et boutiquière et que beaucoup de communistes ne la partagent pas. Les communistes me font confiance, ça ne devrait pas mal se passer, a répondu samedi M. Laurent, lors d’une rencontre avec la presse »…
Dans les faits, c’est surtout François Hollande qui fait confiance à Pierre Laurent. Les négociation pour les élections municipales se sont faites directement entre le chef de l’Etat et le secrétaire national du PC affirment certain militants d’extrême gauche. Une rencontre à l’Elysée qui alimente les rumeurs selon lesquelles Pierre Laurent aurait accepté l’union avec le PS dés le premier tour et se serait même engagé à débarquer Mélenchon du Front de Gauche !
Plus prosaïquement, Olivier Dartigolles, porte-parole — du PC, a expliqué que « la question des alliances (PS-PC) sera tranchée (à l’automne) par le vote des adhérents à l’échelle de leur territoire ». « Selon l’ancrage des projets à gauche, le rassemblement se fera ou pas ». Faux suspense constate Bruno Gollnisch car M. Dartigolles précise que « de toute façon, si le rassemblement ne se fait pas au premier tour, il devra se faire au second ».
A l’évidence, la direction socialiste n’a pas grand-chose à craindre de ces communistes émasculés depuis le départ de Georges Marchais. Trop faibles pour briser leurs chaînes, ils montrent parfois les dents, mais finissent toujours par rentrer bien gentiment dans la niche sociale-démocrate, européo-atlantiste, où ils trouvent leur écuelle pleine après chaque manif et communiqués contre la politique austéritaire du PS…
http://www.gollnisch.com/2013/08/27/melenchon-va-t-il-casser-baraque-communiste/