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Lettre ouverte à Madame Feral Schuhl, bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris

Madame le Bâtonnier,
Dans un communiqué partisan vous avez cru bon devoir vous fendre d’un appel à manifester le 30 novembre dans le cadre de la grande Marche contre le racisme en soutien à Mme Taubira. Ce n’est pas la première fois que l’Ordre des avocats sort de son rôle pour prendre des positions politiques contestables. Déjà en 2002, le conseil de l’ordre avait cru bon joindre sa voix au cœur des vierges effarouchées lors de la qualification de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle, oubliant peut-être que certains de ses confrères avaient pu voter différemment.
Ce communiqué m’attriste comme de nombreux confrères qui refusent d’être instrumentalisés dans le cadre d’une grossière opération de diversion de la part d’un pouvoir politique aux abois et qui ressort opportunément la carte de l’antifascisme et de l’antiracisme pour faire oublier les terribles problèmes de chômage et d’insécurité. Un commentaire potache et maladroit sur un compte Facebook, une remarque déplacée d’une fillette de dix ans et une première de couverture d’un journal satirique et la République serait prétendument en danger. Il y a là à l’évidence une démesure entre les faits dénoncés et la réaction disproportionnée du pouvoir politique qui n’est pas innocente.
J’ajoute qu’étant l’avocat du journal Minute (qui en l’espèce a fait ni plus ni moins du Charlie hebdo de droite) et de son directeur de publication qui font l’objet de poursuites judiciaires, votre sortie est d’autant plus choquante qu’elle a pour effet de fragiliser la défense. Cette prise de position est d’autant plus choquante qu’elle est sélective. Vous avez pris position en faveur de Mme Taubira en saluant notamment ses engagements. Or, le garde des Sceaux a adopté une posture particulièrement partisane dans le cadre du « Mariage pour tous » qui fut un sujet de société particulièrement clivant.
Où étiez-vous, Mme Feral Schuhl, lorsqu’avec mon confrère Triomphe nous intervenions devant le Palais de justice pour faire libérer de jeunes gens qui portaient le sweat-shirt de la manif et embarqués dans une sinistre fourgonnette par deux commissaires de police ? On ne vous a pas entendue pour dénoncer les 600 gardes à vue abusives et les milliers de contrôles d’identité de jeunes gens parce qu’ils manifestaient contre la loi Taubira ou contre la condamnation scandaleuse de Nicolas Bernard Buss.
Je ne peux, en tant qu’avocat, attaché à l’indépendance de notre profession, que dénoncer cette indignation sélective et m’attriste que vous ayez cru bon devoir solliciter une motion de l’Ordre – dont les délibérés sont tenus secrets – afin d’apporter de la sorte, et au nom de vos confrères, votre concours à une opération politicienne de diversion du parti au pouvoir.
Veuillez croire, Madame le Bâtonnier, en l’assurance de ma considération respectueuse mais néanmoins déçue.
Maître Frédéric Pichon, Avocat au barreau de Paris, 29/11/2013
Source :http://www.lesalonbeige.blogs.com/

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