Lu dans Minute :
"La fin de non-recevoir opposée par Cécile Duflot et Pascal Canfin aux propositions de Manuel Valls n’a rien d’un coup de tête. [...] Le discours peut-être le plus important de sa carrière est celui qu’elle a prononcé ce 2 avril 2014 lors de sa passation de pouvoirs à Sylvia Pinel, qui lui succède au ministère du Logement, discours que nul ne semble avoir entendu [...]. Cécile Duflot, qui a travaillé la sémantique à défaut d’avoir encore travaillé son « look », a commencé par ces mots: « J’ai été fière de servir mon pays. » Puis elle a évoqué l’avenir. Non pas celui des écologistes mais celui de la gauche, et celui de la France. Elle a parlé de « la défense de l’intérêt général », ajoutant: « A la place qui sera la mienne désormais, j’entends y contribuer, avec en tête l’amour de mon pays et au coeur l’amour des Françaises et des Français. » « Ma liberté, pleinement retrouvée et assumée, a-t-elle conclu, je la mets au service de l’écologie, de la gauche et de la France. »
Le discours fut très bref (moins d’une minute) et Cécile Duflot avait choisi chacun de ses mots. Si ce qu’elle a dit n’a pas été entendu, tant pis. Elle saura le rappeler… le moment venu.Cécile Duflot n’a pas parlé comme un ancien ministre qui part retrouver le banc des députés. Elle s’est exprimée comme quelqu’un qui a un autre dessein. Et dont la position découle d’une froide analyse : celle que le Parti socialiste ne sera plus, forcément, la force dominante de la gauche française.Il y eut le PCF, puis il y eut le PS, puis il y aura…Cécile Duflot a perçu à juste mesure le séisme des élections municipales. Elle l’a dit samedi devant le conseil national d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) : « C’est bien un cycle ouvert par les élections municipales de 1977 qui s’est refermé dimanche dernier. La gauche perd 155 villes. Le socialisme municipal a reçu des coups très importants, y compris dans des villes bastions comme Limoges, Quimper ou… Grenoble! A n’en pas douter, l’effet domino de cette déroute électorale se fera de nouveau sentir.» De cette analyse – juste – découlent une certitude:la gauche socialiste va s’effondrer encore plus, et une conviction:les écologistes peuvent devenir la force dominante de la gauche française.
A trois conditions: que Manuels Valls échoue – elle en est sûre –, que les écologistes ne soient pas tenus pour coresponsables de son échec – d’où son départ – et qu’ils ne puissent pas être soupçonnés d’avoir oeuvré contre la gauche – d’où le refus de voter contre le gouvernement à l’Assemblée nationale, du moins pour l’instant.
[...] Le projet de Duflot est, en fait, extrêmement simple, du moins sur le papier. Il est de « bâtir une nouvelle alliance citoyenne capable de poser les jalons d’une force écologiste majoritaire dans le pays ». Avec un premier rendez-vous qui est celui des européennes. Deux autres, l’an prochain, les cantonales – si elles sont maintenues – et surtout les régionales. Et, juste après, l’élection présidentielle. [...]"