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L’incroyable dérive de la campagne 2012 de Sarkozy

Ce 26 mai, les enquêteurs de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF) s'apprêtent à quitter le siège d'Event & Cie, la filiale du groupe Bygmalion, avec des caisses entières de factures. Franck Attal, le patron opérationnel de Event & Cie, qui a organisé les 42 meetings de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012, est présent. Et il confirme. La campagne 2012 de M. Sarkozy a bien été entachée d'irrégularités financières.
Les fausses factures ? Oui, bien sûr. Le plafond officiel des dépenses de campagne, fixé à 22,5 millions d'euros, a explosé. Alors, Franck Attal décrit les demandes pressantes de l'UMP. Sa propre angoisse de ne pas être payé pour des prestations que sa société a pourtant bien effectuées.
L'obligation – économique, il faut bien rétribuer ses sous-traitants – d'accepter un artifice comptable parfaitement illicite : faire passer le surplus des sommes extravagantes dépensées pendant la campagne, soit plus de 11 millions d'euros, sur les comptes de l'UMP, au prétexte de fausses conventions.
ACCEPTER LES FAUSSES FACTURES OU NE PAS ÊTRE PAYÉ

Il décrit les réunions, donne les noms des participants. Il cite Guillaume Lambert, l'homme de confiance de Nicolas Sarkozy, qui l'a nommé directeur de sa campagne. Eric Cesari, l'ami du candidat, directeur général du parti. Et l'eurodéputé Jérôme Lavrilleux, fidèle copéiste, organisateur hors pair, devenu directeur adjoint de la campagne.
Aux policiers, M. Attal décrit un système, un emballement, que Le Monde a tenté de reconstituer, en examinant les comptes et autres factures, en rencontrant les principaux protagonistes de ce dossier. Franck Attal situe à début avril 2012 la réunion où le dilemme lui est proposé : accepter les fausses factures, ou ne pas être payé. Pas de traces écrites, tout est oral. C'est avec Lavrilleux qu'il travaille au quotidien. Il est bon, Lavrilleux. Sans état d'âme. On lui demande l'impossible ? Il y parvient.
Prenez le dernier grand meeting de M. Sarkozy, le 15 avril 2012, place de la Concorde, à Paris. M. Lavrilleux est à la manoeuvre, en permanence. Rien n'est trop beau, trop cher. Il faut fournir chocolats fins et chouquettes, dont le candidat se gave. Il exige une loge cinq étoiles – un appartement, en fait. Il réclame des pièces insonorisées pour se préparer en toute quiétude ? M. Attal fait bâtir des doubles cloisons en bois épais bourrées de papier de verre.
« MAINTENANT, JE VEUX FAIRE UN MEETING PAR JOUR ! »
L'entourage du candidat, prompt à devancer les désirs de M. Sarkozy, veut toujours plus de tout : des portiques de sécurité à foison, les bancs des gradins qu'il faut gainer de bois… Sans compter les cantines pour ravitailler bénévoles et services de sécurité. Et les réunions publiques s'accumulent. Facturées 250 000 à 300 000 euros pour une salle moyenne, et souvent programmées au dernier moment, ce qui entraîne une hausse faramineuse des coûts.
Au départ, c'était pourtant simple. Une campagne éclair, quatre ou cinq meetings. Mais le candidat est largement devancé par François Hollande dans les sondages. Et puis, les premiers meetings le grisent. « Maintenant, je veux en faire un par jour ! », lâche-t-il un soir d'euphorie. Les responsables d'Event ont cru qu'il blaguait…
Cette frénésie, un homme clé l'orchestre. Un sous-préfet, fidèle, précieux. Qu'il faut protéger à tout prix. Comme ce 15 mai 2012. Ambiance glaciale à l'Elysée, dans le bureau présidentiel. Jour de passation de pouvoirs. MM. Sarkozy et Hollande se toisent. L'ex-chef de l'Etat demande à son successeur une seule faveur : prendre grand soin de son homme de confiance, qu'il a bombardé préfet, six jours plus tôt. Un certain Guillaume Lambert…

Gérard Davet et Fabrice Lhomme

Le Monde :: lien

http://www.voxnr.com/cc/politique/EupkppFAkERLvgUyrX.shtml

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