On crie sous vos fenêtres : « Vive Mohamed Merah ! », « Mort aux juifs ! », et vous n’entendez pas.
« Ayant des yeux, ne voyez-vous pas ? et ayant des oreilles, n’entendez-vous pas ? Et n’avez-vous pas de mémoire ? » Que vous faut-il, aimerait-on demander à certains, pour prendre conscience de la menace qui pèse sur nos têtes ? On crie sous vos fenêtres : « Vive Mohamed Merah ! », « Mort aux juifs ! », et vous n’entendez pas. Des pénitentes hargneuses, dont le corps entier repose sous un long drap noir, hantent nos villes de lumière, et vous ne voyez pas. Vous ne vous souvenez pas que, partout où l’on a mis le corps et l’esprit en cage, on a toujours fini par mépriser et par nier la vie ?
C’est sans doute parce qu’il fait profession de mémoire que l’historien Jean-Charles Jauffret, heurté par la vue d’une de ses étudiantes portant le niqab, lui a lancé – l’imprudent – : « Vous êtes le cheval de Troie du salafisme. » À ces mots, l’étudiante, choquée, a quitté l’amphithéâtre, suivie par quelques bonnes âmes solidaires. Il faut dire que la scène se passe à l’Institut d’études politiques d’Aix-en-Provence, une de ces fabriques de l’antiracisme inquisitoire. La direction de l’établissement, il va sans dire, n’a pas perdu de temps pour exprimer son soutien à la jeune fille, même si elle n’a pas osé déchoir Monsieur Jauffret de ses droits constitutionnels. Inutile, le pauvre homme s’est condamné lui-même à une forme plus sournoise d’ostracisation.