Le libéralisme peut parfaitement prospérer en dehors du cadre national. Par Ferghane Azihari, libéral proudhonien, membre des Jeunes européens fédéralistes et du comité de rédaction du Taurillon.
L’État-nation, pur produit du nationalisme, a beau être le lieu de naissance de la démocratie moderne, cela n’en reste pas moins accidentel. Cette rencontre relève du fruit hasardeux de l’histoire. Il est en ce sens totalement absurde de décréter, comme le font certains conservateurs étatistes-nationalistes, que l’union du libéralisme et de l’État-nation est entachée de fatalité organique. De la même manière que l’on admet que le caractère universel de la démocratie lui permet de s’exporter en dehors des frontières occidentales malgré ses origines athéniennes, le libéralisme peut pour les mêmes raisons parfaitement prospérer en dehors du cadre national. En vérité, l’épanouissement complet de cette doctrine requiert même l’abolition de cette construction arbitraire, xénophobe et liberticide. C’est en ce sens que la construction européenne est salutaire.
Une construction arbitraire et irrationnelle
L’État-nation part du principe que seule l’identité nationale peut constituer le lien fédérateur politique principal. La nation est ainsi érigée en fondement de l’action politique là où le contrat social ne devrait solliciter que la liberté. L’État-nation pervertit donc l’essence même de la société. L’identité nationale n’est en effet qu’un discours mythologique dont les contours et le contenu sont arbitrairement définis. Tous les êtres humains ayant une origine commune, la tentative de définir une histoire et une culture propres à une communauté et non à une autre relève nécessairement d’une démarche arbitraire. Doit-on en effet rappeler qu’aucune civilisation ne s’est construite en autarcie et que toutes les cultures ont noué d’intenses interdépendances avec des civilisations extérieures ? De la même manière que l’on peut conter une histoire de France, il est également possible, pour peu que l’on cite les faits adéquats, de conter une histoire des civilisations franco-allemande, franco-espagnole, franco-africaine, gréco-persane, gréco-turques, arabo-chrétiennes, euro-asiatiques etc. Le récit national n’étant qu’une construction arbitraire, il n’a strictement rien à faire dans les fondements du politique qui se doivent d’être rationnels avant toute chose.
Une construction xénophobe et liberticide
En érigeant l’identité nationale en lien fédérateur politique principal, l’État-nation développe une vision exclusive du contrat social en légitimant la discrimination fondée sur l’identité nationale de l’individu. Au contraire, l’individualisme défendu par le libéralisme a toujours combattu l’institutionnalisation de la xénophobie pour satisfaire la protection de la plus petite minorité susmentionnée. Le nationalisme n’est finalement qu’une déclinaison de l’étatisme. Il s’agit d’une idéologie qui autorise l’État à faire de l’ingérence dans la détermination de l’identité de l’individu tout en niant sa singularité pour mieux la soumettre à un standard qu’il a lui-même arbitrairement défini. En témoigne cette tendance chez toute la classe politique française à blâmer les individus qui revendiquent d’autres appartenances collectives que celle relative à l’État français. « Communautarisme » devient ainsi l’élément de langage préféré de tous les étatistes. Au contraire, un État libéral ne peut être forcément que post-national, c’est-à-dire qu’il doit revenir aux fondamentaux du contrat social : fonder son action sur la protection des libertés individuelles sans les limiter à des cadres identitaires arbitrairement définis. Cela revient autrement à brider l’universalité de la liberté pour mieux la dénaturer. Dissocier définitivement la nationalité de la citoyenneté semble ainsi nécessaire. La construction européenne apparaît à cet égard comme étant un formidable outil contre les États-nations.[....]
Ce libéral proudhonien (! !!) nous démontre mieux que l’on aurait fait la nocivité de la pensée libérale (NDLR)