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Sortir de la dette par la croissance : impossible

Janet Yellen a fait les gros titres il y a quelques jours. Elle a dit qu’elle se montrerait patiente au sujet de la “normalisation” des taux d’intérêt.

Les investisseurs n’ont pas su quoi en penser. La moitié s’est dit que ce serait bon pour les actions — faisant grimper les cours. L’autre moitié en a déduit que cela signifiait une hausse des taux anticipée — et s’est débarrassée des obligations.

Les investisseurs attribuent à Mme Yellen bien trop de crédit. Va-t-elle augmenter les taux à Pâques… ou à la Trinité ? Elle ne le sait probablement pas elle-même. Elle lit les journaux tout comme nous, et se demande comment elle va pouvoir s’en sortir. Elle se regarde dans le miroir le matin et reste le souffle coupé par la manière dont les gens la surestiment.

Elle sait… du moins avant de se maquiller… que toute cette histoire n’est rien que cosmétiques et fausse comptabilité. Simplement, elle ne veut pas être la présidente de la Fed qui l’admettra… celle qui fera finalement éclater la bulle et provoquera une dépression…

En attendant, les nouvelles de ces derniers jours ont été dominées par une chose improbable et une chose inévitable. Les États-Unis lâchent enfin du lest. Après un demi-siècle, il était temps que les États-Unis abandonnent leur rancune durable envers le régime de Castro. A la lumière de l’histoire, il ne semble pas si épouvantable. Après tout, beaucoup de films ont été tournés qui comptaient un personnage à la Fidel; jamais, pourtant, il n’a menacé de faire exploser des cinémas.

De plus, Cuba sera plus sympathique à visiter que la Corée du Nord. Imaginez un pays presque étanche aux progrès des 50 dernières années. Pas de centres commerciaux, d’affiches géantes, d’autoroutes, de radars, de républicains, de démocrates, d’alertes à la bombe, de dette étudiante ou d’assouplissement quantitatif.

Plutôt pas mal, non ?

▪ Revenons-en à la situation macroéconomique à la fin 2014.

Le PIB se mesure en additionnant les dépenses – la consommation, l’investissement, les dépenses gouvernementales et les exportations nettes.

Pour prendre un exemple, le PIB américain serait actuellement de 18 000 milliards de dollars, dont 3 500 milliards sous la forme de dépenses fédérales. Ajoutez à cela les dépenses des autorités locales et le total dépasse les 6 000 milliards. Cela signifie que le secteur privé — celui qui paie les factures — ne représente que 12 000 milliards.

La dette totale aux États-Unis est désormais de 58 000 milliards de dollars (et non 60 000 milliards comme annoncé hier… mais que sont quelques milliards ici ou là ?) C’est près de cinq fois l’économie réelle qui la soutient.

Ceci contribue à expliquer pourquoi il est si difficile de se sortir de la dette par la croissance.

Même si l’on pouvait limiter l’augmentation de la dette à 3% du PIB par an, la partie productive de l’économie devrait se développer de 5% rien que pour faire du surplace. Aucune économie développée au monde ne croît aussi rapidement.

A un taux d’intérêt moyen de 3%, l’intérêt annuel sur 58 000 milliards de dollars est de 1 700 milliards. C’est légèrement moins de 10% du PIB mais c’est 14% — soit un dollar sur sept — de l’économie privée.

Rien qu’en janvier 2002, le bon du Trésor US avait un rendement de 5%. Si le taux d’intérêt moyen retrouvait ce niveau — et ce sera le cas tôt ou tard — il faudrait 3 000 milliards de dollars pour payer la dette américaine, ou un quart de la production privée.

Cela ne peut arriver ; tout exploserait. Il se produirait un marché baissier pour les actions et une dépression de l’économie — vaporisant des milliers de milliards de dollars de dettes irremboursables et d’investissements impossibles. C’est ainsi que la nature traite les bulles de dette. Mais c’est exactement ce que la Fed veut éviter. Comment ? En tentant de faire croître l’économie plus rapidement de manière à alléger le fardeau de la dette — en pourcentage de la production.

▪ Comment est-ce que ça fonctionne ?

Pour se sortir de la dette par la croissance, il faut augmenter les revenus plus rapidement que la dette. Disons que vous pouvez soutenir un taux sain de croissance du PIB de 3% par an. Cela signifie que la dette additionnelle ne peut dépasser les 3%.

Le déficit budgétaire des États-Unis en 2014 était de 2,8% — nous prenons les États-Unis à titre d’exemple, au passage, mais le même raisonnement peut s’appliquer à toutes les économies développées de la planète. Il y a peu de chance qu’il passe sous ce niveau. Et ce n’est là que la somme empruntée par les autorités. Le secteur privé représente encore deux tiers de l’économie. S’il n’empruntait rien, la dette pourrait se contracter par rapport à l’économie sous-jacente. Mais sans emprunt, l’économie ne se développera pas ; elle se réduira. C’est pour cette raison que les autorités sont intervenues en 2009. Le secteur privé a cessé d’emprunter.

La théorie de la politique contra-cyclique keynésienne, c’est que le gouvernement peut compenser le manque de crédit de la part du secteur privé en empruntant bien plus que d’ordinaire. Au cours des cinq dernières années, les programmes de relance du gouvernement fédéral US ont ajouté 9 000 milliards de dollars à la dette américaine. Durant cette période, cependant, le secteur privé a tout juste augmenté.

La dette ne peut enrichir l’économie que si elle est utilisée pour construire de nouvelles capacités productives. Si on la dépense en programmes sociaux et en guerres, elle disparaît pour toujours. Le secteur privé termine avec un fardeau plus lourd… et un dos plus faible pour le porter. Même quand la dette est utilisée par le secteur privé, c’est souvent uniquement pour stimuler les dépenses de consommation. Qui plus est, les taux ultra-bas de la Fed attirent souvent les capitaux dans des investissements instables et dangereux — comme le pétrole de schiste ou les prêts subprime.

De sorte qu’une grande partie du crédit allant au secteur privé est également gâchée. Les taux de croissance du secteur privé baissent depuis les années 70. Mis au fer par des milliers de milliards de dollars de dette, bâillonnés par des réglementations et des restrictions, trompés par des signes financiers factices de la part des banques centrales… ils resteront probablement bas et chuteront plus bas encore dans un proche avenir.

Se sortir de la dette par la croissance ? Peu probable.

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