Il faudrait être bien naïf –et l’électeur FN l’est plutôt moins que les autres- pour imaginer une seule seconde que le Système, tous ceux qui en vivent grassement, laisseraient sans coup férir les Français votant pour l’opposition nationale menacer leurs prébendes, leurs rentes de situation, leur position dominante. Pour le deuxième jour consécutif, le quotidien La Voix du Nord exhorte aujourd’hui en Une ses lecteurs à ne pas voter pour la liste conduite par la présidente du FN en Nord-pas-Calais-Picardie. Marine Le Pen a dénoncé hier matin sur RTL ce «tract pour le Parti socialiste», «contrepartie» des «9 millions d’euros de subventions» octroyés par la région à La Voix du Nord, via la chaîne de télévision régionale Wéo, dans laquelle ce journal compte 34 % du capital.
«Pourquoi cet affichage ?» a demandé Libération à Jean-Michel Bretonnier, rédacteur en chef du quotidien nordiste : «Parce que la situation est inédite» répond-il. «Le FN est aux portes du pouvoir dans deux grandes régions qui peuvent devenir des bases solides pour se rapprocher du pouvoir au niveau national.»
Le journal rappelle aussi que déjà, dans un édito du 6 mai 2002, il invitait avec une emphase lourdingue et ridicule, à voter contre Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle : «Forte de ses valeurs et dépositaire de l’héritage que lui ont transmis ses martyrs, La Voix du Nord se range sans ambiguïté aux côtés des démocrates pour déposer dans l’urne une réponse cinglante et définitive aux courants haineux et xénophobes.» «Aux côtés des démocrates?» Mais Lesquels? Ceux qui se sont assis sur les résultats du référendum de 2005? Ceux dont les politiques ont livré nos compatriotes aux mauvais vents du mondialisme, aux insécurités sociale, économique, physique, identitaire?
« La Une contre l’extrême droite est courageuse (sic), mais pas sûr qu’elle soit utile, tempère un autre journaliste (de La Voix du Nord, NDLR) qui souhaite garder l’anonymat (par peur des représailles de ses collègues démocrates?, NDLR). Le FN adore l’agressivité. Le choc frontal, il s’en nourrit(sic). Par ailleurs, c’est un peu tard. L’élection, c’est dimanche.»
Une Une qui a fait la joie d’un adversaire du FN qui n’a certes jamais brillé par sa subtilité et sa finesse, à savoir le patron de l’UDI, petit appendice allié de LR, Jean-Christophe Lagarde. Ce dernier s’était déjà signalé par le grotesque de sa comparaison lorsqu’il avait qualifié Nadine Morano, coupable d’avoir cité (approximativement) De Gaulle, de «porte-parole du Ku Klux Klan.» Hier sur France Info, reprenant peu pu prou les attaques d’une certaine gauche, d’unRenaud Dély, M. Lagarde a affirmé que l’Etat islamique est « bénéficiaire du Front National», ânonnant dans la foulée toutes les mesures bidons, inefficaces et/ou démagogiques de LRPSque le FN a refusé de voter.
«Le paradoxe, après les attentats, c’est de voir que l’extrême droite se renforce alors que c’est d’abord, à mon avis, quelque chose qui favorise la propagande de Daech » a insisté Jean-Christophe Lagarde. « Parce que la propagande de Daech c’est d’expliquer qu’on ne veut pas des musulmans en France. Et (avec) le vote FN, on va leur donner un boulevard pour expliquer que nous ne sommes pas un pays où tout le monde peut vivre en respectant les lois de la République», a-t-il jugé.
La bêtise assez stupéfiante de ce discours, à peu près du niveau d’un tract de SOS racisme en direction des collèges, fait écho aux ahurissants mensonges d’un Nicolas Sarkozy hier soir àRouen pour une réunion publique. «Chaque voix que vous donnerez au FN servira la gauche» a martelé l’homme de l’ouverture à gauche en 2007 et triste champion des déficits publics, du chômage, de l’immigration de peuplement sous son quinquennat.
De manière toute aussi surréaliste, le patron de LR, qui écrivait qu’il rêvait d’une France ou l’expression Français de souche aurait disparu, a affirmé ne pas «(vouloir) que la France devienne une société multiculturelle, (ne pas vouloir) du communautarisme». «Nous voulons rendre la France de toujours au peuple de France». Il a même vanté «les valeurs chrétiennes de la France», son «long manteau de cathédrales et d’église». On se pince… C’est ce même Nicolas Sarkozy qui avouait franchement à Philippe de Villiers : «Tu as de la chance, toi tu aimes la France, son histoire, ses paysages. Moi, tout cela me laisse froid. Je ne m’intéresse qu’à l’avenir. »
Autre poids lourd ( ?) à entrer dans la danse du scalp anti FN, le président du Medef, Pierre Gattaz. Celui là même qui se vantait de ses relations courtoises, empruntes de « respect mutuel », avec l’ex secrétaire général de la CGT et autre militant antifrontiste enragé, Thierry Le Paon, qui a été obligé de démissionner en avril dernier suite aux révélations sur ses goûts de luxe avec l’argent des adhérents.
Dans un entretien au Parisien ce mardi, M. Gattaz met en garde, comme il le fait de manière récurrente dans les médias depuis son entrée en fonction et avant chaque élection, contre le programme économique du Front National, qui serait «l’inverse de ce qu’il faut faire». «La montée du Front National illustre un malaise», il faut que les «autres partis politique (…) comprennent ce malaise et qu’ils y remédient», en réglant «les problèmes de la sécurité, du chômage et en redonnant de l’espoir aux Français».
Le patron du Medef s’exonère bien hypocritement de ce malaise. Comme le rappelait Bruno Gollnisch en mars dernier, qu’a fait le Medef à la sauce Parisot ou Gattaz sur le plan économique, le patronat Français, les grands patrons du CAC 40, tous ceux qui ont applaudi, célébré successivement MM. Sarkozy, Valls et Macron? Ont-ils créé des centaines de milliers d’emplois ? Ont-ils embauché massivement nos jeunes diplômés contraints de fuir vers les pays anglo-saxons ?
«Je trouve extraordinaire l’arrogance de tous ces gens là qui jugent du programme du FN sans l’avoir lu» notait Bruno Gollnisch. «Qu’y a-t-il de surprenant à vouloir libérer notre économie à l’intérieur et à vouloir protéger raisonnablement notre marché vis-à-vis de la concurrence déloyale que nous subissons de l’extérieur? Une bonne dizaine de prix Nobel partagent en tout ou partie nos analyses économiques, financières, sur l’euro…». «Le Medef vit des cotisations de grandes entreprises anciennement nationales ou nationalisées, dont la plupart des dirigeants sont d’anciens fonctionnaires politisés » arrivés à leur poste par les faveurs du pouvoir en place et «qui n’ont jamais risqué un centime dans les entreprises qu’ils dirigent » soulignait encore le député FN.
Alors oui, leurs leçons, leurs oukases, leurs mensonges sont le signe indéniable de leur fébrilité, voire d’une certaine panique devant ce réveil du peuple Français. Mais ils portent de moins en moins.
http://gollnisch.com/2015/12/01/leurs-lecons-leurs-oukases-leurs-mensonges/