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Vers le coup d'état... d'urgence permanent ?

La réponse aux attentats du 13 novembre n’explique pas complètement cette inquiétante fébrilité de mesures sécuritaires.

130 morts, 350 blessés, les attentats les plus meurtriers de notre histoire méritent une réponse à la mesure du défi lancé par Daesh le 13 novembre. Rassurante en apparence, la fébrilité sécuritaire du pouvoir cible pourtant moins les terroristes que... le peuple.

L'état d'urgence décrété par le président Hollande au lendemain des attentats se justifiait : il fallait tout mettre en œuvre pour retrouver les terroristes, identifier les commanditaires. La police en a profité pour faire le ménage dans les banlieues, lors de quelques 3000 perquisitions administratives : saisies de drogue, d'armes (près de 400 dont 10 % d'armes de guerre), mais il a fallu attendre un mois d'état d'urgence pour que soit prononcée la première mise en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste »...

Et il eut été logique que cette situation exceptionnelle demeurât..: exceptionnelle. Couvre-feu, assignations à résidence, droits de réunion restreints, perquisitions administratives... l'arsenal de l'état d'urgence est lourd. L'enquête dégrossie, la logique démocratique aurait voulu que l'on revînt à l'état de droit. C'est exactement l'inverse qui s'est produit. Aussitôt promulgué, Valls annonçait sa volonté de prolonger l'état d'urgence. Chose faite, avec en prime des assignations à résidence élargies et des facilités dans la dissolution des associations ou groupements « [...] portant une atteinte grave à l'ordre public », une notion floue à souhait.

Le grand bal sécuritaire

Hollande de son côté veut inscrire l'état d'urgence dans la constitution. Le projet prévoit des cas de recours très larges, mais surtout il indique que la loi qui le proroge peut modifier et augmenter les mesures de police portant atteinte aux libertés, lesquelles seront forcément constitutionnelles. De l'arbitraire à l'état pur, d'autant que le gouvernement ne fixe dans son projet aucune limite de durée à l'état d'urgence. De l'exceptionnel qui peut durer... indéfiniment, une sorte de Patriot Act à la Française, clament ses défenseurs... mal à propos. Sur 11 129 demandes de perquisition dans le cadre du Patriot Act en 2013, seuls 51 avaient trait au terrorisme. Il a surtout entériné d'importantes restrictions des libertés publiques et la surveillance électronique de masse de la population... ce qu'a fourni au pouvoir la loi Renseignement votée en juin, qui vient après la loi antiterrorisme du 13 novembre 2014... et 19 autres sur le même thème depuis 1986.

Et c'est loin d'être fini. Surfant sur la peur des Français, le pouvoir est en pleine frénésie législative. On évoque ainsi l'installation systématique de GPS sur les voitures de location, la montée en puissance de la vidéosurveillance, une vigilance accrue sur internet.

Le Grand flicage de la population

Cerise sur le gâteau : l'interconnexion globale de tous les fichiers (fiscaux, sociaux, etc.) qui permettra aux forces de l'ordre de tout savoir sur vous ou presque... sans même parler des mesures discutées à l'échelon européen.

Au final, et au-delà d'inévitables et anecdotiques dérapages, si toutes ces mesures vont un peu entraver la liberté de mouvement des terroristes, c'est surtout à une surveillance de plus en plus fine et complète de la population que cet arsenal impressionnant aboutit. L'ultra-gauche qui a manifesté contre la COP21 en a fait les frais, mais demain, à qui le tour ? C'est peut-être François Hollande qui dévoile par inadvertance le pot aux roses. Dans son allocution de remise de Légion d'Honneur aux lauréats du prix Nobel de la paix, il parle de l'objectif des terroristes qui est de « créer un sentiment d'insécurité tel que les ferments de la guerre civile pourraient à ce moment là se trouver réunis ».

Serait-ce là la crainte secrète de Hollande et de son équipe ? Le peuple, cette vilaine bête qui leur échappe et qu'ils maltraitent depuis si longtemps doit être tenue d'une laisse bien courte, car sous une surface assez calme, la situation en France est des plus explosives.

Richard Dalleau monde&vie 13 janvier 2016

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