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Le déclin commercial des centres-villes s’aggrave

5017349_6_375e_2016-10-20-9f9fe3e-4545-rpdntn-isq0duc8fr_35edfafd51dba950fdd9f91c82a53297.pngDes commerces fermés ou parés d’un trompe-l’œil sur des façades abandonnées pour cacher la misère… « Avec près d’un rideau sur dix baissé, la vacance commerciale s’aggrave et touche fortement les centres des villes moyennes en France. » 
Un phénomène qualifié de « préoccupant » par le rapport sur la revitalisation commerciale des centres-villes de l’Inspection générale des finances (IGF) et du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), rendu public jeudi 20 octobre dans l’après-midi par le ­gouvernement. 
A cette occasion, la secrétaire d’État au commerce, Martine Pinville, a annoncé que le gouvernement va débloquer une enveloppe de... 1 million d’euros pour « financer dès que possible les stratégies de développement urbain, les nouveaux partenariats entre les acteurs publics et privés, et le développement du management de centre-ville », et lutter ainsi contre cette désertification commerciale d’un certain nombre d’agglomérations de taille moyenne. 
Cette somme proviendra du FISAC (Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce). « C’est aux décideurs locaux d’aider chacun à trouver sa place », a déclaré la secrétaire d’État, préconisant une concertation plus grande entre structures publiques, élus et organisations de commerçants. 
Les villes de moins de 100 000 habitants sont les plus touchées 
L’état des lieux, commandé en février par le ministère du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité et par le secrétariat d’Etat au commerce, à l’artisanat, à la consommation et à l’économie sociale et solidaire, est assez alarmiste. « Avec un taux moyen de vacance commerciale dans les centres des villes moyennes en France qui dépasse les 10 % en 2015, en augmentation sur les dix dernières années, la dévitalisation commerciale de nombreux centres-villes en France se confirme », constate le document. 
Sur près de 190 centres-villes, le taux de vacance moyen, qui mesure la part des locaux commerciaux qui ne trouvent pas preneur à la location, est passé de 6,1 % en 2001 à 10,4 % en 2015. Sachant que, au-dessous de 5 %, les experts considèrent la situation comme conjoncturelle et que, au-delà de 10 %, cela témoigne « d’un déclin structurel de la commercialité du centre-ville ». Les villes moyennes, et plus particulièrement celles qui comptent moins de 100 000 habitants, sont les plus touchées. 
En 2015, plus de la moitié des centres-villes des agglomérations de taille moyenne affichaient un pourcentage moyen de commerces vides supérieur à 10 %, contre seulement 27 %des grandes villes. Le rapport cite l’exemple de la ville de Béziers (Hérault), qui affiche une vacance commerciale de 24,4 % en 2015 (contre 9,7 % en 2001), soit le taux le plus élevé parmi les villes moyennes en France. Il conclut à « un phénomène qui s’installe structurellement à l’échelle d’un centre-ville ». 
Caractéristiques communes 
La dévitalisation commerciale du cœur des villes s’accompagne aussi de signes de fragilité économique, comme la diminution structurelle de la consommation des ménages ou encore le nombre de créations d’entreprise dans le secteur du commerce de détail, qui, entre 2011 et 2014, a diminué de 11 %. 
Le rapport relève, en tout cas, des caractéristiques communes aux villes de taille moyenne quand elles pâtissent de cette fuite des commerces : taux de chômage, de logements vacants et de pauvreté élevés, et dimi­nution de la population. De même, ces agglomérations connaissent souvent un niveau de fiscalité plus élevé que la moyenne. Facteur aggravant, soulignent les auteurs du rapport, « ces communes perdent, en général plus souvent que les autres, des équipements, réduisant notamment leur offre de soins, de loisirs ou le nombre de structures éducatives ». 
La désertification commerciale peut s’expliquer par différents facteurs : des problèmes dans l’accessibilité du consommateur au centre-ville, que ce soit l’offre de stationnement ou les tarifs des parkings ; une augmentation des loyers commerciaux et des prix au mètre carré lors de mutations (changements de propriétaire) ; ou la concurrence des boutiques par le commerce en ligne. 
Parallèlement à la dévitalisation des centres-villes, on observe un développement exagéré des surfaces commerciales en périphérie. Ces zones commerciales, à l’offre uniforme d’une ville à l’autre, ont aussi leur responsabilité dans l’affaiblissement commercial de certaines agglomérations. « La création d’une grande surface peut concurrencer, pour certains secteurs, le commerce de proximité dans les villes isolées et périphériques », affirme le rapport, qui précise que « la création d’une grande surface supplémentaire pour 10 000 habitants accroît le risque de sortie d’un petit commerce de proximité deux ans après ». 
« Stratégie adaptée à la situation de leur territoire » 
A l’inverse, les communes qui ont le plus grand nombre de commerces en activité ont des atouts qui, à eux seuls, permettent de comprendre le maintien d’un centre-ville animé. Parmi ses cartes maîtresses, on dénombre la « forte attractivité touristique », « une population des plus de 60 ans plus élevée », « un revenu médian de la population plus important ». Le classement en station touristique, la présence d’un littoral sont des attributs partagés par un certain nombre de ces villes épargnées par le déclin commercial. 
Pour endiguer ce phénomène, l’IGF et le CGEDD recommandent certaines actions, pour la plupart très techniques, en matière de réglementation et de fiscalité. Car, « si le commerce est d’abord l’affaire des commerçants, il revient aux élus, responsables de la ville et de l’intercommunalité, d’engager et de mettre en œuvre une stratégie globale adaptée à la situation de leur territoire », note le rapport. 
Celui-ci doit « s’appuy[er] sur ses propres atouts (patrimoine, culture, capacité d’attractivité touristique ou économique…), intégr[er] la maîtrise de l’appareil commercial de l’ensemble du bassin de vie, combin[er] tous les leviers d’action (urbanisme, habitat, activités, mobilité…) et regroup[er] les acteurs locaux dans une gouvernance coordonnée ». 
Action insuffisante 
Malgré un dispositif destiné à revitaliser les centres-villes dans la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, qui prévoit plusieurs mesures, comme l’allongement du délai dont dispose la commune pour trouver un repreneur, l’action du gouvernement n’est visiblement pas suffisante pour contrer le mouvement. 
« La mise en œuvre d’une poli­tique efficace de développement du commerce en centre-ville repose sur la mobilisation des professionnels du commerce, mais pas seulement, estime Martine Pinville, secrétaire d’Etat chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. Il nous faut nécessairement aussi compter sur un réseau élargi de collectivités locales, d’élus, de chambres consulaires et, bien sûr, d’experts de l’ingénierie des centres-villes dégradés (Caisse des dépôts et consignations, Agence nationale pour la réno­vation urbaine, établissements publics fonciers…). » 
Il est nécessaire, selon elle, de « travailler ensemble, à tous les niveaux, à tous les échelons, quelles quesoient [les] affinités politiques, pour définir des objectifs collectifs ». Le 30 mars, la Caisse des dépôts a présenté un nouveau dispositif d’accompagnement de la revitalisation des centres-villes, qui doit être expérimenté dans des municipalités moyennes. 
Concrètement, la secrétaire d’Etat va, dans un premier temps, rassembler l’ensemble des acteurs du commerce autour de la table à la fin du mois de novembre, lors de la réunion de la commission de concertation du commerce. Dans un second temps, ensuite, elle mènera une réunion plus élargie – « début 2017 », précise-t-elle. 
Parmi les axes d’amélioration, Mme Pinville envisage l’accélération de la transition numérique du petit commerce en s’appuyant sur le Conseil national du numérique, « avec, par exemple, une aide dans le développement de solutions mutualisées pour développer le commerce en ligne de proximité (plate-forme commune pour les petits commerçants d’un territoire qui permettent de regrouper les commandes, casiers communs pour la livraison…) ».

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