Le site Atlantico citait le cas du cinéaste de gauche Michael Moore qui prédisait une victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine. Il rapportait l’anecdote suivante au cours de la campagne électorale: «Donald Trump est allé au Club économique de Detroit et, devant des cadres de Ford, a dit Si vous fermez les usines que vous avez prévu de fermer à Detroit et que vous les construisez au Mexique, je vais mettre un tarif de 35% sur ces voitures lorsque vous les renverrez ici et personne ne les achètera, c’était incroyable à voir. Aucun politicien, républicain ou démocrate, n’avait jamais dit quelque chose comme ça à ces dirigeants (…)». Pas encore officiellement élu (ce sera le 20 janvier) , M. Trump se targue déjà d’une victoire sur le front de la lutte contre les délocalisations. Après avoir longtemps résisté aux demandes pressentes du successeur de Barack Obama, Mark Field, le PDG de Ford, arguant d’un «meilleur environnement économique et industriel sous la présidence de Donald Trump», a annoncé mardi qu’il renonçait à délocaliser une nouvelle usine à San Luis Potosi au Mexique (pour un coût de 1,6 milliard). Le groupe a finalement décidé de redéployer 700 millions de dollars pour le développement de la production de véhicules électriques dans son usine du Michigan. Une première victoire symbolique pour Trump, même si les grincheux soulignent que la direction de Ford a trouvé ici un échappatoire commode pour se dépêtrer de ce projet d’usine mexicaine pour y produire des ford focus dont les ventes sont en chute libre.
Une chute libre, intellectuellement parlant en tout cas, qui caractérise aussi la dernière sortie en date du candidat à la primaire socialiste Vincent Peillon. L’ex très sectaire ministre de l’Education nationale a créé l’émoi jusque dans son propre camp par la bêtise de ses propos lors de son passage dans l’émission L’Entretien politique sur France 2 mardi. Il a ainsi affirmé que «Certains veulent utiliser la laïcité – ça a déjà été fait dans le passé – contre certaines catégories de population, les Juifs à qui on mettait des étoiles jaunes». «C’est aujourd’hui un certain nombre de nos compatriotes musulmans qu’on amalgame souvent avec les islamistes radicaux». «C’est intolérable», a-t-il conclu avec emphase.
L’entourage de M. Valls, le sénateur LR Roger Karoutchi se sont émus de cet amalgame, Florian Philippot lui a conseillé de «réviser son histoire». Autorité suprême, le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) a dénoncé des «déclarations (qui) ne servent que ceux qui cherchent à réécrire l’Histoire». «L’histoire de la déportation de plus de 75.000 Juifs, de la spoliation des biens juifs ou des lois discriminatoires comme le port de l’étoile jaune» ne saurait être «dévoyée et instrumentalisée au nom d’un soi-disant équilibre des souffrances». Le Crif a exigé «une clarification et un correctif immédiat» auquel M. Peillon s’est soumis.
Et de rectifier tout penaud son propos sur twitter: «Je n’ai évidemment pas voulu dire que c’était la laïcité qui était à l’origine de l’antisémitisme de la France de Vichy. (…) Et ce qu’ont vécu les Juifs sous Vichy ne saurait être banalisé d’aucune façon».«J’ai voulu dénoncer la stratégie de l’extrême droite qui utilise les mots de la République pour les détourner contre la population. »
Autre politicien peu réputé pour sa finesse, Christian Estrosi est lui aussi la cible de critiques après son voyage en Israël à la fin de l’année en une période de vives tensions. M. Estrosi qui ne cesse de dénoncer souvent sur un mode incantatoire et fantasmatique le danger Front National, ne s’embarrasse pas d’un paradoxe près en apportant son appui au chef de file de l’extrême droite israélienne. Il n’a certes pas commenté la dernière déclaration du Premier ministre israélien. Réagissant au verdict hier du tribunal militaire israélien de Jaffa qui a déclaré coupable d’homicide Elor Azaria, un soldat franco-israélien, accusé d’avoir achevé à terre un assaillant palestinien blessé, M. Nétanyahu a déclaré soutenir la grâce demandée pour ce jeune militaire de vingt ans.
Le voyage du chef de file de LR en PACA avait aussi pour but officiel de «nouer et renforcer les relations que Nice entretient avec les villes israéliennes», et comportait des « rendez-vous institutionnels de haut niveau, notamment avec le Premier ministre Benyamin Netanyahu, qui fut un des premiers à témoigner son soutien à Nice après l’attentat du 14 juillet». Lors de sa visite le président de la région PACA a notamment pris 50 000 euros dans la poche des contribuables Français pour attribuer une subvention au KKL (Keren Kayemeth LeIsrael, ou Fonds national juif), une association para-gouvernementale de défrichement, de reboisement de l’Etat d’Israël. M. Estrosi entendait, a-t-il dit, «contribuer au reboisement de la forêt détruite» (par les incendies de l’été dernier ), «planter 86 arbres en mémoire des victimes de l’attentat de Nice».
Plus largement, le site droitier pro-israélien Dreuz info précise que« fondé en Grande-Bretagne en 1901 par Theodor Herzl lors du Ve Congrès sioniste, le KKL est le bras exécutif du peuple juif pour la rédemption et le développement de la terre d’Israël. Sa première vocation fut de racheter des terres en Eretz Israël en vue de l’installation de pionniers juifs. Mais très vite, ses missions se sont diversifiées». Ce même site loue l’activisme du KKL après les récentes séries d’incendies criminels qui ont été allumés par des Palestiniens.
Les détracteurs du KKL insistent plutôt sur son aide à la construction de colonies en Cisjordanie (une dizaine d’habitations palestiniennes ont été détruites de nouveau ce lundi à Khan al-Ahmar mettant à la rue près d’un centaine de palestiniens, femmes et enfants inclus), les forêts plantés à des fins politiques pour effacer la présence des populations non juives en Palestine, pour s’accaparer les zones de pâturages des bédouins; les plantations sur les lieux de villages arabes dont les populations ont été chassées ou se sont enfuies, l’arrachage des oliviers et des orangers des palestiniens…
Ce voyage de M. Estrosi a déclenché l’ire des socialistes dans sa région : «À quel titre un président de Métropole et des élus métropolitains vont-ils soutenir la politique étrangère d’un Etat condamné par l’ONU ?» a confié à à l’AFP Xavier Garcia, le premier secrétaire du Parti socialiste dans les Alpes-Maritimes. Christophe Castaner, tête de liste du PS en PACA lors des dernières élections régionales, a dénoncé également à l’AFP un voyage assimilé à «du clientélisme pur». «Non seulement le contribuable paie le déplacement, mais on apprend qu’il engage la région pour acheter une clientèle», celle des amis d’Israël». Il a regretté que Christian Estrosi «conteste l’existence de la Palestine» quand la France porte «la position de l’équilibre».«Rien ne peut justifier le déplacement (de Christian Estrosi) en Israël aux frais de la métropole (Nice Côte d’Azur) pour soutenir Netanyahu», a insisté Patrick Allemand, à la tête de l’opposition municipale de gauche à Nice. Il est vrai que François Hollande, lors de sa rencontre en Israël en novembre 2013 avec le Premier ministre israélien, avait évoqué «l’amitié entre Benjamin (Netanyahu) et (lui-)même» mais avait aussi rappelé devant la Knesset la position officielle de la France contre la colonisation juive en Cisjordanie.
Bruno Gollnisch défend contrairement à M. Estrosi une position plus favorable aux droits des Palestiniens, qu’il soient chrétiens ou musulmans, nettement moins outrancière, nettement plus équilibrée et partant, nous le croyons, bénéfique à terme également pour les Israéliens. Pour autant le député FN estime que Christian Estrosi est parfaitement en droit de nouer les relations privilégiées avec qui il veut, de dénoncer la veto de l’Onu sur la politique de colonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est. Bruno Gollnisch note également que l’indignation des socialistes qui eux aussi n’ont pas fréquenté amicalement que de parfaits dirigeants respectueux des droits de l’homme, n’est peut-être pas elle aussi dénuée de tout clientélisme dans la perspective des échéances à venir…