Cette affaire d’investiture ne rehausse pas le niveau de la politique ni le jugement qu’on peut porter sur les motivations d’un certain nombre d’élus.
Rien ne ressemble plus à un bobo de gauche qu’un bobo de droite. Dans les deux cas, il est bien argenté mais se dit proche du peuple. Il est libertaire, défend la PMA, éprouve de l’empathie pour les immigrés : il a ses pauvres, qui lui donnent bonne conscience. Ouvert à autrui, il reste centré sur ses propres intérêts.
Nathalie Kosciusko-Morizet en est un bel exemple. Le 13 juin 2016 – avant la primaire de la droite –, elle annonce sa candidature aux législatives dans la 1 1e circonscription de Paris, qui représente principalement le 14e arrondissement. Elle y était partie à l’assaut de la capitale : « C’est ici que se joue la reconquête ! » lance-t-elle fièrement à Anne Hidalgo. Mission difficile, car cet arrondissement est détenu par Pascal Cherki, un député PS bien implanté.
Le combat est risqué ? C’est bien plus beau lorsque c’est difficile, penserait le Cyrano d’Edmond Rostand. Mais NKM est réaliste, son retentissant échec à la primaire la fait réfléchir : battue aux législatives, adieu les portefeuilles ministériels ! Il faut trouver une autre solution. La 2e circonscription, celle de François Fillon, se libère. Dans le 7e arrondissement, c’est gagné d’avance !
NKM aurait cherché à convaincre François Fillon à Las Vegas, où elle l’accompagne au Mondial du High Tech : « Elle ne l’a pas lâché d’une semelle pendant tout le séjour », rapporte Le Parisien, qui a recueilli les confidences d’un proche de Fillon. Finalement, elle rafle la mise et remporte le jackpot.
François Fillon l’a officiellement annoncé mardi soir. En échange, elle participerait sans réserve à sa campagne et chercherait à séduire l’électorat de Macron.
Après le chant du déserteur, le chant des sirènes. Voilà qui ne va pas améliorer ses relations avec Rachida Dati, maire du 7earrondissement, et autres prétendants légitimes. L’ex-ministre de la Justice a pourtant officiellement soutenu François Fillon dès le soir du premier tour de la primaire à droite. Il faut croire que le vainqueur final n’a pas oublié ses quolibets passés et qu’il estime que les dents longues de Nathalie lui seront plus utiles que celles de Rachida.
« Quelle image donnons-nous de la politique ! NKM prétendait construire, dans la durée, un véritable ancrage. Voilà qu’elle abandonne le terrain. Si cette 11e circonscription reste à gauche, ce sera sa faute ! » s’indigne un jeune conseiller de Paris. Réaction compréhensible, traduisant le sentiment de nombreux élus qui ne portent pas spécialement l’intéressée dans leur cœur.
Cette affaire d’investiture ne rehausse pas le niveau de la politique ni le jugement qu’on peut porter sur les motivations d’un certain nombre d’élus. À en juger par de telles manœuvres, il apparaît qu’ils ont plus pour objectif de se servir que de servir. NKM se serait honorée en affrontant un adversaire solide : elle a préféré le parachute doré qui lui assure un atterrissage en douceur dans l’enceinte de l’Assemblée nationale. On va en arriver à penser que le tirage au sort proposé par Mélenchon ou Montebourg n’est pas si absurde : la démocratie athénienne l’avait d’ailleurs théorisé.
De plus, il n’est pas du tout certain que François Fillon tire profit de ce coup de piston. À y regarder de près, Nathalie Kosciusko-Morizet n’est-elle pas plus représentative des valeurs de la gauche que de celles de la droite ?
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