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Plutôt que de se lamenter de l’abstention, le FN ferait mieux de se demander pourquoi il n’est pas parvenu à mobiliser

6a00d83451619c69e201bb09a59759970d-250wi.jpgSelon Antoine Vouillazère dans Minute, le FN n'est pas victime de l'abstention mais d'une piètre campagne :

"[...] En 2012, Marine Le Pen, avec 6,4 millions de voix, avait obtenu 17,90 % au premier tour de la présidentielle. Deux mois plus tard, aux législatives, cela n’avait donné que 3,5 millions de voix pour les candidats du Front national mais, en raison de l’abstention, le parti présidé par Marine Le Pen avait tout de même totalisé 13,60 % des suffrages. Une chute raisonnable. Cette fois, ça a été une dégringolade. Les 7 678 491 voix du 23 avril sont devenues 2 990 592 le 11 juin ! Les 21,30 % du 23 avril ont été ramenés 13,20 % ! La faute à qui ? A l’abstention ! Cette bonne blague !

Aux élections européennes de 2014, le Front national devient, dit-il, le premier parti de France. Il l’est effectivement en ce mois de mai puisqu’il remporte le scrutin avec 24,86 % des suffrages (et 24 députés), devançant l’UMP (20,81 %) et distançant le PS (13,98 %). Si c’est l’abstention qui plombe les résultats du Front national, il faut croire les électeurs se sont déplacés en masse pour ces européennes ! Pas exactement... Le jour où le Front national s’est tant vanté d’être « le premier parti de France », l’abstention atteignit le chiffre phénoménal de 57,57 % du corps électoral ! Seuls 42,43 % des électeurs avaient voté... contre 48,71 % aux législatives de dimanche dernier ! Aux élections régionales de 2015, le Front national augmente encore son score. Ses listes totalisent, au premier tour, 27,73 % des suffrages ! Dans un contexte particulier de très forte participation ? Toujours pas... Là encore, l’abstention dépasse les 50 %. 50,09 % pour être précis. A peine moins que dimanche dernier, avec 51,29 %.

Puisque l’argument de l’abstention qui nuirait aux résultats du Front national ne tient pas – et n’a jamais tenu, les exemples inverses abondent –, l’explication des mauvais résultats du Front national est à chercher ailleurs. Les comparaisons qui ont été faites avec 2012 sont d’ailleurs insuffisantes pour montrer l’ampleur du désastre. En réalité, les candidats du Front national, avec cette moyenne nationale de 13,20 %, ne sont pas seulement en léger recul par rapport aux 13,60 % de 2012 ; le résultat est en régression par rapport à ce qu’il fut il y a vingt ans! En 1997, suite à la dissolution décidée par Jacques Chirac, le Front national pas encore « dédiabolisé » avait obtenu 14,94 % des suffrages et 164 de ses candidats s’étaient qualifiés pour le second tour (contre 119 cette année selon l’appel à la mobilisation lancé lundi soir par Marine Le Pen). Au final, un seul député FN avait été élu (Jean- Marie Le Chevallier à Toulon), mais est-on certain qu’il y en aura plus dimanche prochain ?

Vingt ans pourquoi ? Vingt ans de militantisme pour quoi faire ? Une scission, des purges, un changement de présidence, un parricide, la promotion de nouveaux dirigeants, des départs et des exclusions, des recrutements, et, surtout, un changement de ligne politique et de doctrine économique, pour quoi ? Pour rien !

En vingt ans, après un morceau de mandat de Jacques Chirac, après le quinquennat de Nicolas Sarkozy et celui de François Hollande, après une vague sans précédent de terrorisme islamique, après l’ouverture des frontières de l’Europe à des millions de migrants, après le référendum sur le traité constitutionnel européen – puisque le sujet lui tient tant à cœur – suivi de la ratification du traité de Lisbonne, après l’amplification de ce que le Front national appelle l’UMPS, après l’amplification du chômage de masse, après qu’ait été reconnue par tous la fracture entre le peuple et ses élites, après que l’actualité éditoriale ait été envahie – certains dirait accaparée – par les thèses déclinistes venant corroborer les constats effectués par le Front national, après une augmentation constante – que l’on croyait impossible – de l’insécurité, après la prolifération des zones dites de non droit, après l’édification de quelques centaines de mosquées, etc., le Front national a régressé ! Ahurissant.

Plutôt que de se lamenter du taux d’abstention (un réel problème mais pas pour le FN, pour la démocratie française, qui est un peu plus importante), le Front national ferait mieux de se demander pourquoi tant de Français se sont abstenu... et pourquoi il n’est pas parvenu à les mobiliser – pas plus, et même moins, que les autres formations. [...]

Durant ces législatives, Marine Le Pen et Florian Philippot, lorsqu’ils s’exprimaient – pour la première fois, le Front national n’a pas véritablement mené de campagne nationale pour ce scrutin –, n’avançaient jamais de pro- gramme mais dénonçaient... la « casse sociale » à laquelle allait procéder Em- manuel Macron avec sa majorité. Au Front national, d’ailleurs, quand on a trouvé une formule, on la ressasse jusqu’à satiété : après la victoire de François Fillon à la primaire de la droite, Marine Le Pen dénonçait déjà « le pire programme de casse sociale qui ait jamais existé ». Zut, les Français en ont plébiscité un qui est pire que pire... [...]

Des nombreuses choses que n’a pas compris le Front national, l’une des plus graves est que, pour citer une nouvelle fois Guillaume Bernard, « le combat de la droite n’est pas [...] dans le “tout économique“ » – et le déterminant du vote de l’électeur de droite, hormis du plus aisé, non plus –, même si nous vivons, pour citer cette fois Marcel Gauchet, « un moment libéral économiste » – qui était, pensons-nous, nécessaire, ou du moins inévitable, tant était sclérosée (un imparfait d’espoir...) la société française. Le Front national, comme le disait cette semaine Patrick Buisson dans « Le Figaro Magazine », n’a pas « su construire une offre politique crédible » et, quarante-cinq ans après sa création, cela commence à se voir... Conséquence : « Il est dans l’impasse. » Le tragique est que tous ceux qui avaient porté leurs espoirs sur lui le sont aussi, et qu’il n’y a aucune solution de rechange en vue. [...]"

Michel Janva

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