Les dirigeants du Front National se sont retrouvés samedi et dimanche derniers à Nanterre en séminaire à huis-clos. Une des réunions qui jalonneront, jusqu’au congrès prévu en février 2018, les travaux de réflexions et d’analyses auxquels seront associés les adhérents, afin de tirer tous les enseignements de la séquence électorale qui vient de s’achever, des bouleversements observés dans toutes les familles politiques, et bien sûr de rendre plus performant notre Mouvement. Un processus de clarification et d’affinement de nos positionnements, de notre programme, de notre mode de fonctionnement qui a permis notamment à Bruno Gollnisch de faire entendre ses souhaits, ses vœux, les orientations qu’il juge bénéfique pour l’avenir de l’opposition nationale, populaire et sociale. N’ayant pas pour habitude d’alimenter les médias de propos off, de divulguer la teneur de débats qui dans cette phase préparatoire ont vocation à rester internes, Bruno s’est contenté d’esquisser quelques réflexions devant la presse qu’il aura l’occasion de présenter plus avant au moment opportun, dans les mois qui viennent.
Bruno Gollnisch s’est d’ores et déjà réjoui de la bonne tenue et ambiance de cette réflexion collective – « il n’y a pas eu de sang versé sur les murs, en tout cas pas de mise en cause personnelle »- et a précisé que s’il était légitime que «(Florian Philippot) n’impose pas tout à une maison plus vieille que lui et dont il est un hôte récent », « il aurait tort de quitter le FN, c’est un garçon intelligent et sincèrement patriote ». Bruno Gollnisch s’est donc félicité de la diversité des sensibilités, des approches qui s’est de nouveau manifestée lors de ce séminaire, diversité qui est une vraie richesse à partir du moment ou le but, le bien commun visé est partagé par tous. « On ne sort pas du séminaire clonés les uns aux autres, mais nous sommes en phase sur l’essentiel, la souveraineté de la France ». Une souveraineté qui passe aussi par la sauvegarde de notre identité, de nos libertés, des valeurs constitutives de notre civilisation.
Bruno Gollnisch a donc simplement réitéré aux journalistes qui l’ont interrogé en marge de ce séminaire son constat selon lequel « l’une de nos priorités c’est l’accueil de la vie et pas de chanter les louanges de l’avortement », mais aussi qu’il « ne (pense) pas que nous fassions peur sur les questions de l’immigration. Jean-Marie Le Pen n’a jamais dit qu’il s’en prenait à la personne de l’immigré. Et même dans nos rangs, nous avons des filles et des fils d’immigrés ». La question du changement de nom du Front National est aussi sur la table. « C’est un nom tout à fait honorable a-t-il jugé, il traduit quantité de sacrifices, de résistance à des persécutions, je ne vois pas en quoi un nouveau empêcherait la diabolisation ».
Autre thème évoqué, et non des moindres, celui de l’euro. « Cette monnaie a certes trahi ses promesses, notamment celle d’être un obstacle à la hausse des prix, mais il faut adopter une communication moins anxiogène » a proposé Bruno Gollnisch. En politique, c’est ainsi, il n’est pas toujours évident (et électoralement payant) d’avoir raison, de voir juste avant tout le monde; a fortiori quand la propagande officielle matraque sur tous les modes et sur tous les canaux que la sortie de l’euro signerait une apocalypse économique. D’autant que pour prendre une autre question sur laquelle le FN a été furieusement diabolisé, à savoir l’immigration, les inconvénients majeurs générés par son caractère massif sont perceptibles de manière beaucoup moins abstraite, de façon autrement plus évidente et sensible par l’ensemble de nos compatriotes.
Aussi, a-t-il suggéré, fort de l’adage gouverner c’est prévoir, une approche tactique différente consistant pour le Front National à proposer « un plan B de sortie de crise que l’on pourra dégainer quand cette monnaie mourra de sa belle mort, car comme l’a dit le prix Nobel Maurice Allais, comme le disent aujourd’hui de nombreux économistes de renom dont les analyses ne sont jamais ou très peu relayées dans les médias français, l’euro n’est pas viable à terme ».
De manière plus générale, le député frontiste entend rappeler aussi que contrairement à ce que l’on peut lire ou entendre de la part de commentateurs qui n’ont pas travaillé le sujet dont il parle ou, ce qui n’est pas mieux, mentent délibérément, le FN a toujours nourri une réflexion et des propositions sur des sujets et des thèmes qui n’étaient pas réductibles aux questions de l’immigration et de l’insécurité. Quand bien même ces deux questions-préoccupations là sont en effet très structurantes du vote en faveur du Front National.
A titre indicatif, le dernier programme étoffé publié par le FN en 2001 - il y a eu bien évidemment depuis des projets présidentiels portés par les candidats Jean-Marie Le Pen puis Marine - couvrait pleinement le champ des questions civilisationnelles, sociales, économiques, fiscales, entrepreneuriales, environnementales, européennes, les thématiques de l’agriculture, de la famille, de la justice, de la Défense etc. Ainsi sur les 433 pages dudit programme, le chapitre immigration comportait seulement 30 pages , et celui sur la sécurité (hors défense nationale mais incluant la justice) 22 pages. Un petit travail de mémoire est toujours nécessaire…
Mémoire qui permet aussi de se souvenir que c’est en août 2012 que débuta pour François Hollande l’inexorable érosion de sa cote de popularité, qui s’établissait à 50% de bonnes intentions à la rentrée de cette même année. Après le calamiteux épisode de l’humiliation du général de Villiers contraint à la démission sur fond de promesses budgétaires trahies pour nos armées, manifestation éclairante du caractère du chef de l’Etat selon le général Tauzin ; alors que la rentrée promet d’être compliquée pour l’exécutif – levée de boucliers contre la loi travail, l’augmentation de la CSG, la baisse de l’APL, la poursuite de l’immigration massive... - la chute d’Emmanuel Macron dans les sondages apparaît très brutale.
Selon l’enquête Ifop pour le JDD, le président de la république a d’ores et déjà perdu dix points de popularité ce dernier mois ( 54% de satisfaits), le pourcentage des Français mécontents bondissant de 33% à 43%, chute touchant aussi le Premier ministre LR Edouard Philippe (de 64% à 56% de satisfaits.) Les observateurs rappellent à cette occasion que M. Macron est avec Jacques Chirac (en 1995) le chef d’Etat qui enregistre la plus forte dégringolade dans l’opinion deux mois après son arrivée à l’Elysée.
Nous sommes bien placés pour le savoir, la roue tourne très vite en politique. Les espoirs, du moins chez ceux de nos compatriotes, minoritaires, qui ont glissé dans l’urne un bulletin Macron et LREM en mai et juin derniers, générés par le renouveau, la synthèse macroniste pourraient s’éteindre avec la même rapidité qu’ils sont apparus. Encore une fois, le choc du réel, le principe de réalité s’impose toujours à tous, d’autant que l’idéologie portée par Emmanuel Macron et ses soutiens politiques, médiatico-financiers, philosophiques, et ce n’est pas là un des moindres paradoxes de cette année électorale, est rejetée plutôt nettement par les Français.
Quant à l’opposition républicaine au gouvernement, ses trahisons en cascade, ses ambiguïtés (à tout le moins) laissent le champ libre au Mouvement national pour apparaître, plus que jamais comme une alternative sérieuse, crédible au Système, pour peu que nous sachions être pleinement audibles sur nos thématiques, communiquer, argumenter intelligemment.
Alain de Benoist l’indiquait en creux dans un récent entretien, « L’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron dit-il, qui symbolise la réunification du libéralisme sociétal de gauche et du libéralisme économique de droite, pourrait en principe favoriser une clarification en faisant comprendre une fois pour toutes que le libéralisme est intrinsèquement progressiste et non pas conservateur (…) . C’est ce qu’explique très bien Guillaume Bernard : La combinaison du libéralisme et du conservatisme peut, de prime abord, apparaître séduisante : le libéralisme pour l’économie, le conservatisme pour la société. Mais c’est méconnaître la doctrine libérale, qui s’appuie sur l’individualisme et le subjectivisme. C’est en soi et par soi que chacun détermine son bien. Il n’existe pas de valeur objective, mais uniquement des consensus issus de la rencontre de volontés. Le libéralisme porte en lui la destruction des traditions sociales, alors qu’il n’est nullement nécessaire de s’y adonner pour combattre la spoliation fiscale des familles et des entreprises. C’est ce qu’il faudrait comprendre si l’on veut gagner la bataille des idées. Les Républicains, eux, se veulent les représentants de la droite et du centre. Encore un oxymore !». Bataille des idées qu’il s’agit de gagner en ce qu’elle précède en toute logique la victoire dans les urnes. Au travail!