De Séoul, où il commençait sa carrière de conférencier, François Hollande s’en est pris à Emmanuel Macron et non pas à Kim Jong-un, le dictateur rouge, à quelques dizaines de kilomètres de là et qui menace davantage la paix du monde que Macron. Mais, voilà, c’est la colère qui a parlé jusqu’à s’en prendre au chef de l’Etat français en terre étrangère, ce qui ne se fait pas. Il faut dire que, dans son intervention télévisée de dimanche soir sur TF1, son successeur l’avait « cherché », critiquant à trois reprises celui qu’il n’a appelé que son « prédécesseur ». Et Hollande de lui répliquer vivement tout en assumant sa propre politique.
On aurait pu attendre et espérer que l’ex-président fût muet pendant quelques mois, lui qui a déploré en son temps qu’un Sarkozy vaincu ne se relance trop vite dans l’arène politique. Mais, au moins, ce dernier avait-il dû quitter l’Elysée après s’être battu pour continuer à l’occuper et non pas, piteusement, en renonçant à demander aux électeurs qu’ils jugent son action à la tête de l’Etat. Or, ce qu’il n’a pas eu le courage de faire devant les Français, le président déchu l’effectue face à Macron, défendant sa politique par contraste avec celle suivie par le nouveau président : « La fiscalité, c’est un facteur de cohésion nationale et sociale. Si, dans un pays, l’idée s’installe qu’il y a finalement une fiscalité allégée pour les riches et alourdie pour les plus modestes ou pour les classes moyennes, alors c’est la productivité globale du pays, c’est la capacité qu’il a à se mobiliser pour son avenir, qui se trouve mise en cause. » Lui a qui suscité un « ras-le-bol fiscal », constaté par un de ses ministres, Pierre Moscovici, ose maintenant faire la leçon à Macron sur ce terrain avec impudence !
Est-ce à dire qu’Emmanuel Macron, lui, est innocent dans ce conflit qui se développe, pauvre victime de l’ire de son ex-mentor, lequel voyait en lui son « fils spirituel » ? Les psychanalystes diront peut-être qu’il a voulu « tuer » le père, nous préférons constater que dans cette zizanie, c’est l’hôpital qui se moque de la charité. Car, enfin, qui était le conseiller économique de Hollande pendant sa campagne électorale, préparant le « choc fiscal » de 2012 ? Macron ! Qui était secrétaire général adjoint de l’Elysée quand le chef de l’Etat a imposé une taxe de 75 % pour « les plus fortunés » ? Macron, taxe qu’il a dénoncée dimanche. Qui est resté ministre de l’Economie de Hollande jusqu’en août 2016 cautionnant et défendant sa politique économique et sociale qu’il critique aujourd’hui ? Macron encore !
Ce dernier s’en prend aussi à la présidence « bavarde » de son prédécesseur au moment où, renonçant à la sobriété annoncée, il se répand dans différents médias. Et alors qu’il reproche à Hollande l’annonce répétée et impuissante de l’inversion de la courbe du chômage, il l’imite en prévoyant son recul d’ici un an et demi à deux ans sans plus de certitudes que Hollande en son temps. Que ces deux compères règlent leurs comptes en privé et qu’ils cessent de prendre les Français à témoin de leur querelle d’ego !
Guy Rouvrais
Article paru dans Présent daté du 19 octobre 2017