La charte des Patriotes de Florian Philippot vient d’être dévoilée. Elle fait réagir Hervé de Lépinau, qui y voit une traduction de la naissance d’un nouveau courant dans le paysage politique, et une volonté farouche de revendiquer le Frexit tout en adoptant une vision très libérale-libertaire, pour ne pas dire politiquement correcte, de l’évolution de la société.
Frexit et mariage pour tous, deux thématiques lancées par la charte des Patriotes dévoilée par Florian Philippot aujourd’hui. Hervé de Lépineau, que vous inspire cette nouvelle ?
Elle traduit la naissance d’un nouveau courant sur l’échiquier politique.
Il y a une volonté farouche de revendiquer ce fameux Frexit, c’est-à-dire la sortie de la France des institutions européennes tout en adoptant, par ailleurs, une vision très libérale-libertaire, pour ne pas dire politiquement correcte, de l’évolution de la société.
Cette volonté de Florian Philippot va clairement s’opposer à la ligne du Front national.
N’est-ce pas, en fin de compte, la poursuite de la ligne de Marine Le Pen durant sa campagne présidentielle ?
Nous avons la démonstration formelle que Florian Philippot, en tant que vice-président chargé du programme et de la communication, a de toute évidence amené la présidente du Front national dans une impasse dans le cadre de cette élection présidentielle.
Avec certitude, cette charte aujourd’hui ressemble passablement à un programme politique.
De toute évidence, monsieur Philippot va chercher à faire entrer son coin dans la bûche des nationaux-souverainistes.
Existe-t-il suffisamment de place pour lui ? Je n’en suis pas certain.
En tant qu’ancien suppléant de Marion Maréchal-Le Pen, pouvez-vous nous dire si cette ligne est celle que le Front national dit « du Sud » a toujours plus ou moins combattue ?
Je ne suis pas sur un clivage géographique.
Je note, par exemple, dans cette charte que la condition humaine passe après la condition animale.
De plus – car je suis aussi très sensible au bien-être des animaux -, j’observe que, dans le chapitre consacré à cette question, on demande l’arrêt de la corrida et de la chasse à courre, mais on ne se prononce absolument pas sur la problématique de l’abattage rituel, qui est une mise à mort cruelle des animaux de boucherie.
J’aurais aimé que cette charte ait un peu plus de verticalité, mais la vision politique de monsieur Philippot reste très horizontale et très politiquement correcte.
Considérez-vous les Patriotes comme des adversaires politiques ou de potentiels alliés ?
Je ne dirais pas qu’il s’agit d’adversaires politiques.
Ils vont plutôt parasiter l’offre politique.
N’oublions pas que monsieur Philippot a pu atteindre l’espace médiatique et les plateaux de télévision grâce à Marine Le Pen et son statut de vice-président du Front national. Il a un certain talent sur les plateaux, mais la politique, ce n’est pas uniquement la télévision. Il y a également tout un travail de terrain qui doit être fait.
Je pense qu’assez rapidement, nous verrons les faiblesses de monsieur Philippot et de son équipe sur ce point.
Selon-vous, le Frexit mis en avant par Florian Philippot est-il réalisable ?
C’est difficilement réalisable.
Nous n’avons pas le même mode de scrutin qu’en Angleterre.
Le mode de scrutin anglais pour l’élection des membres de la Chambre des communes est un scrutin majoritaire à un tour.
Nous avons ce couperet du second tour de l’élection qui fait que les alliances politiciennes se font pour battre celui qui est arrivé au premier tour, surtout s’il est issu du Front national.
Par conséquent, nous ne pourrons pas plaquer les velléités de souverainisme françaises sur le modèle anglais.
En quelque sorte, en France, il faut d’abord prendre les manettes du pouvoir au niveau de l’État pour pouvoir ensuite peser très lourdement sur les institutions européennes pour les faire évoluer.
On peut ensuite s’en démarquer s’il y a une opposition frontale.
Je forme beaucoup d’espoir dans le groupe de Visegrád, qui pourra certainement nous accompagner si nous étions demain en mesure de gouverner ce pays.