Dans le Parisien du 19 février était publié un entretien révélateur, à de nombreux égards, de ce que vaut la candidature d'Agnès Buzyn à la mairie de Paris.
Entre autres fadaises plutôt ridicules, sur le thème "Candidate à Paris, j’en ai toujours rêvé", et "en même temps" elle dit avoir "dû prendre ma décision d'être candidate en 24 heures".
Deux jours avant la publication de cet article, le député macronien de Paris Sylvain Maillard avait été interrogé par Nicolas Beytout patron de L'Opinion. Il formulait sans complexe un pronostic plus risible encore, pour ne pas dire hallucinant. Car, pour les Municipales à Paris, il ose claironner : « Buzyn va gagner, car 60 % des Parisiens ne veulent plus d’Hidalgo ! ».
Autrement dit, ces gens préemptent tranquillement cette hypothèse que quiconque est contre la gauche, votera pour eux.
Or, le ministre, démissionnaire de la Santé et des solidarités, administration en triple crise, déclare une ligne bien différente. Elle n'intervient pas au nom de la droite, mais en consolation de la gauche déçue. Et elle avoue tout bonnement avoir voté Hidalgo en 2014 aux dernières élections municipales. Et il ne s'agit pas d'un coup de cœur passager. Elle votait auparavant pour Delanoë.
Pour être plus précis quant aux étiquetages politiques, cela veut dire que, dans son arrondissement, cette bourgeoise conformiste, qui semble solliciter les voix conservatrices et libérales a mis dans l'urne un bulletin en faveur d'une liste officiellement patronnée par le parti socialiste mais aussi par ce qui reste du PCF.
Cette candidate inexpérimentée se propose ainsi de rassembler sur sa bonne mine les voix d'un public politique, économique, social et culturel, qu'elle estime sans doute le plus bête du monde. Cette attitude est partagée d'ailleurs avec des nuances par son rival, lui aussi au nom d'un nouveau monde par l'atypique Villani. Lui aussi en 2014 avait soutenu Hidalgo, qu'on savait déjà une catastrophique mégère.
La bataille de Paris offre certes un cas un peu à part dans la campagne des municipales.
Le parti macronien en attendait beaucoup.
Notre vieille capitale en effet ne représente pas seulement le centre névralgique de l'État. Elle abritait autrefois le cœur historique de la nation française.
De Gaulle lui-même en 1969 considérait, à juste titre, qu'il fallait mettre un terme à la centralisation séculaire et prendre le chemin de la régionalisation. Il échoua sur ce point et on doit le regretter.
Finie bien évidemment l'époque où saint Thomas d'Aquin pouvait y voir le "four où se cuit le pain intellectuel de la chrétienté." Et quand un cinéaste s'empare, aujourd'hui, d'un titre de Victor Hugo c'est pour cracher, impunément, sur le pays qui l'a nourri et instruit.
Nous nous situons désormais dans la quintessence de Boboland. Cela résulte aussi d'un double phénomène. La fuite hors les murs de ce qui formait autrefois le peuple de Pari a été aggravée par la concentration de populations venues des quatre coins du globe,
Il s'agit du seul territoire de la république, par exemple, où moins de 40 % des ménages possèdent une automobile. Madame Hidalgo mise donc presque juste en cherchant les voix des 60 % restants.
Dans sa ville la vie de famille y est devenue de plus en plus difficile. Et depuis quelque 40 ans, exactement depuis des statistiques relevées professionnellement par l'auteur de ces lignes dès 1971, le solde migratoire français de souche y est devenu négatif. Les démographes se trouvent contraints de recourir à un euphémisme statistique : ils ne parlent pas de citoyens "de souche". Ils appellent, approximativement, "natifs au carré" les habitants de ce pays dont 4 grands-parents sur 4 sont nés en France. Or, en dehors des hauts fonctionnaires, il existe, parmi eux, des ingénieurs, des entrepreneurs, des chercheurs, des artistes [véritables] qui représentent de vraies élites créatrices, et qui contribuent grandement à la richesse et au rayonnement du pays. Et, contrairement à ce que l'on observait depuis des siècles, quand ils le peuvent, les jeunes préfèrent, majoritairement, quitter, pour ne pas dire fuir, cette mégalopole qu'on appelait autrefois la Ville Lumière. Elle n'accueille plus, comme nouveaux entrants, que des privilégiés de la république, d'une part, les mendiants, les squatteurs, les intermittents du spectacle, les faux réfugiés et autres migrants, d'autre part.
Tous ces paramètres devraient préoccuper, s'agissant du scrutin au-delà des Parisiens qui votent et des Franciliens qui ne votent pas l'ensemble des citoyens de l'Hexagone. Tout cela date aussi de 1975, et de l'idée giscardienne, qui se révéla désastreuse de rétablir un maire de Paris. Comme au temps de la Révolution. Le pouvoir central a toujours cherché, depuis lors, à obvier par des candidatures stupides, telle celle de Mme Kosciusko-Morizet ou celle de la malheureuse Panafieu, le rôle de cet édile. On ne voulait plus du bastion conquis par Chirac en 1977. C'est ce qui a permis à Delanoë d'abord et à Hidalgo en 2014 de régner sur la ville.
Le parti macronien part en fait très peu implanté au conseil de Paris. Sur 163 conseillers, il n'en possède que 6. Ses alliés du groupe UDI-Modem : 12 et Agir 16, beaucoup moins que les héritiers "républicains" du parti gaulliste, au nombre de 30 et les "divers droite" 10. Dans ce petit parlement, la courte majorité de Mme Hidalgo comprend 5 groupes et ne compte que 45 socialistes et 15 communistes…
Or ayant obtenu à Paris de gros scores, 34,8 % à la présidentielle de 2017 et encore 32,9 % aux européennes de 2019, les macroniens imaginaient un succès analogue. Ils prévoyaient sans doute pouvoir communiquer sur les résultats de la capitale, éclipsant ceux du pays, certainement beaucoup plus décevants.
En authentiques amateurs, ces stratèges confondaient ce potentiel de voix, toujours exprimés en pourcentages comme voué à se retrouver dans les urnes municipales.
Comme la bataille d'Azincourt, celle-ci était gagnée d'avance, naturellement. Ça l'est toujours à les entendre...
JG Malliarakis