Les élections municipales ont deux faces inégales selon la taille de la commune. Ce sont des scrutins locaux destinés à pourvoir villages et villes des élus qui vont les gérer, les administrer, les diriger pendant les six ans à venir, mais ce sont aussi des élections qui ont une portée nationale, de trois manières : concrètement les conseillers municipaux et les grands électeurs désignés par ceux-ci éliront à leur tour les sénateurs, plus subtilement un certain nombre de candidats vont acquérir un poids différent après leur élection à l’échelon local ou au niveau national, enfin, un nouveau rapport de forces entre les grandes formations politiques sera établi. Dans les petites communes, c’est la dimension personnelle et la responsabilité locale qui l’emportent sur le clivage politique. Plus la taille augmente, plus le choix politique, partisan, accroît son importance.
C’est pourquoi le pouvoir actuel avait tenté de faire glisser le curseur afin de limiter la prise en compte des étiquettes partisanes aux communes de plus de 9000 habitants. La censure du Conseil d’Etat a obligé le ministre de l’Intérieur à revenir non pas aux chiffres précédents de 1000, mais à ceux, plus anciens de 3500. La ficelle était grosse. Le parti présidentiel, LaREM, fait de bric et de broc, n’est pas implanté partout. Sa sociologie le situe plutôt dans les grandes villes. Il s’agissait donc de minimiser une défaite annoncée, voire de transformer celle-ci en victoire, si Paris était gagnée, par exemple. Cette tentative de manipulation avortée est un signal qui ne doit pas être négligé. C’est la signature de ceux qui se sont emparés du pouvoir en 2017, grâce à une opération associant la justice et la presse, dont, comme hasard, les conséquences judiciaires ont lieu, en ce moment même, à quelques jours des municipales. Il faut être bien naïf pour ne pas voir dans ceux qui nous gouvernent actuellement des spécialistes de la manipulation cynique fondée sur un mépris profond des électeurs et des Français en général. Il est fort probable que dans la tête de certains d’entre eux, le coronavirus soit une divine surprise : le président et le gouvernement rentrent dans une phase compassionnelle en général propice à une remontée dans les sondages, les retraites sont provisoirement oubliées, les élections municipales passent au second plan, la campagne, faute de réunions, s’essouffle. Il est probable que la situation insolite que connaît le pays profitera aux sortants. Le parti au pouvoir n’a guère les moyens de la conquête pas plus qu’il ne court le risque de la perte de villes qu’il ne détient pas. Les partis d’opposition bien implantés localement, LR et PS, résisteront sans doute mais n’ont pas dans l’opinion le crédit soulevant « la » vague. Le conglomérat LaREM comprenant des socialistes rescapés, des élus de « droite » et du centre ralliés, et des membres de la société civile aurait du miser sur ces derniers pour se donner une image plus claire. Le choix initial de Griveaux contre Villani, du PS strauss-kahnien, contre le « sans-carte » révélait la supercherie.
L’objectif de la macronie est donc d’obtenir 10 000 élus, ce qui est peu par rapport aux 536 000 conseillers municipaux élus dimanche prochain. Mais ce qui domine le scrutin, c’est le brouillard qui va planer sur les véritables orientations nationales de nombreuses communes. Le macronisme, qui devait faire régner la transparence, s’avance masqué. LaREM espère ainsi remporter des villes grâce à des alliances faites avec des candidats déjà en place. Car malgré sa promesse de renouvellement, une tête de liste sur cinq soutenue ou investie par LaREM est en réalité le maire sortant, élu sous une autre étiquette qu’il a éventuellement trahie. Il sera le plus souvent situé à droite ou au centre. 67% des maires sortants qui ont obtenu le label sont issus des rangs de la droite (LR, UDI, Modem, Agir…) contre 29% de la gauche (principalement PS). Un certain nombre de candidats macronistes se sont glissés sur des listes de centre-droit ou de centre-gauche. Que des candidats, des élus, des Maires puissent se livrer à de telles contorsions pour assurer leur carrière plutôt que d’affirmer des convictions claires en dit long sur la décadence de notre démocratie. M. Macron est un haut fonctionnaire, venu du PS, tendance gauche-caviar. Sa politique est « progressiste » sur les questions sociétales et doit révulser tous les conservateurs. Sa politique économique est social-démocrate avec un niveau de dépense publique, d’endettement, et de prélèvements obligatoires qui ne peut séduire les libéraux. Sa manie furieuse de la repentance et l’abandon de nos fleurons industriels doivent révolter les patriotes. Il est complètement absurde pour un électeur de droite de donner sa voix à quiconque le soutient. Les Maires qui ont été élus en 2014 avec l’étiquette républicaine et qui ont rejoint Macron ont fait preuve d’une malhonnêteté intellectuelle qui doit être sanctionnée. Quelle confiance peut-on accorder à un candidat qui dit le contraire de ce qu’il disait sous le mandat présidentiel précédent ou durant la campagne ? Le 49/3 était la pire des choses sous Hollande et la meilleure aujourd’hui, Macron un imposteur sans expérience en 2017, et un génie aujourd’hui ? Quant à la plupart des Français, leur bon sens leur a fait prendre conscience de la fragilité psychologique de celui qui les dirige, et du recul des libertés réelles dans notre pays.
C’est la raison pour laquelle, il est nécessaire de mettre le plus rapidement possible un terme à la supercherie politique dont les Français sont victimes en sanctionnant partout les listes macroniennes ou crypto-macroniennes. Les élections municipales doivent non seulement permettre d’élire de bons gestionnaires pour nos communes, elles doivent contribuer à rétablir la clarté politique dans le pays. Celle-ci passe par la victoire d’élus qui soient vraiment de droite et résolument opposés au pouvoir actuel.