Il s’agit là d’une ancestrale loi d’airain en politique : chaque fois que l’on promeut tel ou tel, on ne fabrique que des ingrats (les promus) ou des aigris (les pas promus). Ainsi, et toujours à propos de promotion, Aurore Bergé, participant de cette seconde catégorie, ne l’a pas été… promue, au secrétariat d’État à la Communication audiovisuelle, sous-maroquin qu’elle guignait pourtant de longue date.
À en croire L’Opinion, Aurore Bergé aurait pu être bloquée par le nouveau ministre de la Culture, Roselyne Bachelot, l’ayant semble-t-il jugée trop « légère ». Parole d’experte ? Toujours selon les mêmes sources, la députée des Yvelines et porte-parole de LREM, « insupporterait en haut lieu, notamment dans sa façon de survaloriser les attaques dont elle fait l’objet ».
Il est vrai que, le 24 février 2018, invitée sur le plateau de « Salut les Terriens », émission alors présentée par Thierry Ardisson, les internautes l’avaient quelque peu raillée quant à sa tenue, le bas de son décolleté arrivant tout près du haut de sa robe, assez courte du bas, elle aussi. Bref, ce soir-là, elle avait fait des économies sur le tissu. D’où ce tweet offensé : « Alors vous savez quoi ? Je n’ai pas à être jugée sur la longueur de ma robe. Ni moi, ni aucune femme. Je n’ai pas à subir d’insultes, de harcèlement ou pire, en raison d’une robe. Ni moi, ni aucune femme. Rien ne justifie ou n’excuse cela. » La vérité oblige à dire que « cela » était tout de même un brin surjoué. La prochaine fois où elle ne voudra pas affronter des yeux égrillards, ceux de Laurent Baffie par exemple, elle se fera inviter au « Jour du Seigneur », émission dominicale toujours en quête d’hôtesses de marque.
Plus sérieusement, ce sont d’autres intermittents du spectacle qui n’ont pas été retenus au casting gouvernemental, dont Stanislas Guerini, patron du parti au pouvoir, ou Gilles Le Gendre, président de son groupe parlementaire. Mais encore Cédric Villani, le mathématicien à l’araignée (au plafond ?) ayant fait montre de tout son talent, lors de la dernière élection municipale à Paris. Et, pour finir, Guillaume Larrivé (LR), seul de son camp à avoir voté la confiance au gouvernement Castex : cette audacieuse reptation d’échine n’aura manifestement pas suffi.
C’est finalement un député LREM qui résume le mieux l’affaire, à nos confrères de L’Opinion : « Il y a volonté, pour 2022, de nous débarrasser de tous ceux qui nous ont emmenés dans le mur. » C’est-à-dire tous les amateurs et autres jeunes transfuges estimant que la victoire d’Emmanuel Macron allait signifier leur triomphe. Voilà de sympathiques gandins et péronnelles qui ont encore beaucoup à apprendre en matière politique, n’ayant visiblement pas compris que l’heure n’était plus à la « start-up nation » mais plutôt au retour à ces vieux fondamentaux politiques ayant de longue date fait leurs preuves.
Quant à Aurore Bergé, dont on ne sait pas de quelle manière elle était habillée ce jour-là, Le Point nous dit que, ce 6 juillet, au pot de Matignon censé fêter le tout nouveau gouvernement de Jean Castex, elle aurait fait comme un caprice d’enfant, à en croire l’un des participants : « C’était lunaire ! Elle est partie en courant dans le parc et en est revenue peu après avec les yeux rougis. On l’entendait dire tout haut “J’ai tout donné à la Macronie” ! »
On remarquera qu’avant, elle avait déjà « tout donné », dans le désordre et sans ordre de préférence, à Valérie Pécresse, Alain Juppé, Nicolas Sarkozy, Nathalie Kosciusko-Morizet, François Fillon, quittant l’un pour rallier l’autre. Et d’ensuite faire don de sa personne à Emmanuel Macron.
En politique, la fidélité n’est que rarement récompensée. On ne le dira jamais assez.
Nicolas Gauthier