Par Valérie Bugault, Docteur en droit, ancienne avocate fiscaliste, analyste de géopolitique juridique et économique
Le sang est la face sociale et politique de la dette. Une analyse chiffrée de la dette se trouve sur le site de l’Agence France Trésor (AFT). Nous verrons, dans cet article, que la dette, qui suppose la disparition de tout ce qui cimente l’État et la possibilité de vie en commun est, historiquement, effectivement payée par le sang des populations endettées.
Autrement dit, l’endettement conduit, de façon inéluctable, à la disparition du bien commun, elle est, corrélativement, le moyen le plus sûr de nous mener à l’esclavagisme. Aussi, ce n’est pas sans raison que la Cour des comptes lance le 15 juillet 2020 une alerte sur le niveau de la dette publique française. A la fin du quatrième trimestre 2018, la dette publique recensée s’élevait à la somme astronomique de 2 315 milliards d’euros, soit 98,4% du PIB en décembre 2018. Or, nous allons voir que l’endettement s’est encore considérablement accru à l’occasion de la crise sanitaire liée à la Covid-19.
Ce que le public ignore, d’une façon générale, est que la « dette » et le « contrôle monétaire » sont intimement liés. Pour rappel, l’État américain du Delaware, premier paradis fiscal au monde, fut également le dernier État esclavagiste des États-Unis. Cet État n’a renoncé à son statut esclavagiste que pour devenir un dominant fiscal, un paradis fiscal. Qui dit domination fiscale dit contrôle de la circulation monétaire car il faut bien comprendre que le paradis fiscal a pour fonction essentielle de drainer l’argent public vers des trous noirs institutionnels, lesquels ne prospèrent que grâce à l’assèchement financier des États. Le paradis fiscal est l’ennemi irréductible des États et de leur capacité de financement. Or les trous noirs institutionnels que sont les paradis fiscaux sont désormais sous le contrôle exclusif de la finance anglo-saxonne. D’un autre côté, depuis l’avènement et la généralisation du système des banques centrales, les États sont tombés sous la domination exclusives des banques privées pour ce qui concerne l’émission monétaire.
Le tableau est donc le suivant : que l’on parle d’émission ou de circulation monétaire, les États sont devenus impuissants, sous la dépendance exclusive des banquiers qui se sont octroyés le contrôle exclusif de la monnaie.
Nous allons voir, en partant du Projet de Loi de Finances pour 2021, comment la dette publique française va irrémédiablement mener au sacrifice humain des générations actuelles et futures.
Nous ferons, dans une première partie, un tour d’horizon de la dette française, en n’oubliant pas de recontextualiser la problématique budgétaire française dans la problématique monétaire européenne et mondiale.
Dans une seconde partie, nous passerons en revue certaines expériences historiques auxquelles l’endettement des États a mené.
Enfin, dans une troisième partie, nous examinerons les différentes possibilités, pour les populations, d’échapper à l’esclavagisme promis.
I – La dette : tour d’horizon
L’examen de l’augmentation de la dépense publique liée, en 2020, à la crise du Covid est parfaitement éclairante. Il faut immédiatement préciser que ladite augmentation de dépense publique n’est pas définitive puisqu’elle est appréciée en septembre 2020 moment de la publication du PLF pour 2021 et qu’à cette date les dégâts économiques de la crise sanitaire sont loin d’être consolidés. Ajoutons que les chiffres mentionnés ci-dessous sont exprimés en pourcentage du PIB, lequel est considéré à valeur constante, ce qui fausse légèrement le débat puisque les mesures de confinement font mécaniquement diminuer le PIB :
- Dépense publique/PIB pour 2019 54%
- Dépense publique/PIB pour 2020 62,8 %
D’après les chiffres officiels issus du PLF pour 2021, nous avons donc assisté, en 2020, à une augmentation de 6,3 % de dépenses publiques en 2020 par rapport à 2019. Or, rappelons qu’en ce début de mois d’octobre 2020, le problème Covid est loin d’être réglé puisque non seulement les bars, restaurants et salles de sport de Marseille et Aix en Provence ont fait l’objet d’une fermeture administrative, mais qu’il est question de généraliser cette mesure punitive à toutes les grandes agglomérations ; Paris et sa banlieue étant les premiers sur la liste ! On imagine aisément que tant le PIB que les recettes publiques ne vont pas sortir vainqueurs de ces mesures autoritaires !
Il faut donc s’attendre, en ce début octobre 2020, à une première Loi de Finances rectificative pour 2021, qui devra dès février 2021 prendre en compte les dégâts économétriques dus à la dégradation économiques et financières de la France reconfinée au cours du troisième trimestre 2020.
Par ailleurs, si l’on s’intéresse au solde budgétaire, c’est-à-dire à la prévision de déficit structurel pour les deux années 2020 et 2021, nous constatons que nous sommes, pour ces deux années, bien au-delà d’un déficit structurel de 150 milliards d’euros :
- Solde budgétaire négatif pour 2020 (issus de la 3ème LFR) 195,2 Mds €
- Solde budgétaire négatif pour 2021 (prévu par le PLF) 152,8 Mds €
Ce déficit structurel existe, précisons-le, malgré la prise en compte dans le Projet de Loi de Finances (PLF) pour 2021, de recettes « non fiscales » à hauteur de de 10 Mds d’euros ; lesdites recettes étant issues du plan de relance européen (1ère partie du financement).
Rappelons au passage que la dette contractée par l’UE au titre du fumeux « plan de relance européen », va, encore et toujours peser sur les contribuables, certes européens et non strictement français. Notons toutefois que, business as usual,
le ratio coût/avantage de ce plan de relance européen sera très probablement moins favorable pour les français qu’il ne le sera pour les ressortissants des autres pays européens 1. Quoiqu’il en soit de la prétendue justice fiscale entre européens – que nous laissons volontairement de côté – un fait demeure : le capital de la dette européenne issue du plan de relance devra être remboursé et les intérêts afférents à cette dette devront être payés ! Cette charge financière (capital + intérêts) viendra donc mécaniquement alourdir la dette de l’État français – c’est-à-dire de chaque français -, dont on peut grosso modo évaluer l’augmentation à une fourchette allant de 4 à 6 milliards pour le prêt issu de la première partie du « plan de relance européen ». Car il faut, ici encore, apporter une précision importante : une partie de cet emprunt européen sera réalisé via le Mécanisme Européen de Stabilité (MES), dans lequel la France est le deuxième plus gros contributeur, derrière l’Allemagne et devant l’Italie ; concrètement, la France – comprendre l’ensemble des français – contribue au capital du MES à hauteur de 20,3859 % du capital total.
Par ailleurs, à propos de ce plan de relance prétendument justifié par la pandémie de la Covid, écoutons ce qu’en dit un expert averti, Jean-Michel Naulot :
Seuls 30 % des montants alloués, ceux de l’année 2023, seront en effet en lien avec la pandémie. Il aurait été pourtant simple de retenir dès l’année 2021 deux critères simples reflétant la gravité de la situation pour chaque État : le nombre de morts par million d’habitants et la chute du PIB. Ces critères auraient naturellement été pondérés par la population. Dans le système proposé, très complexe si l’on en croit les équations utilisées par les experts, certains pays d’Europe centrale pourraient recevoir des montants significatifs alors qu’ils sont peu affectés par la pandémie. Quant à l’Allemagne, également peu affectée et plutôt prospère, elle recevrait selon l’Institut Bruegel un montant du même ordre que la France. Comprenne qui pourra… Il ne faudrait pas que cette opération soit dans certains cas un jeu à somme nulle ! La nature même des subventions aura plus à voir avec l’écologie et le numérique qu’avec le secteur hospitalier et la relocalisation de l’industrie pharmaceutique. Comme le dit très bien Olivier Berruyer, il s’agit en fait d’un « plan de rééquilibrage macroéconomique de l’UE ». La Commission met à profit l’aubaine du plan de relance pour faire accepter ce qui lui a été refusé dans le cadre du budget ordinaire. Mais elle s’éloigne de la lettre et de l’esprit de l’article 122 (du TFUE).
La France se trouve donc dans le contexte économique dans lequel la dégradation structurelle est conjoncturellement considérablement aggravée par un confinement qui, comme une bombe à retardement multiple, n’en finit pas de produire des effets économiques négatifs.
Nous ne devons pas oublier que la dégradation économique conjoncturelle – qui s’ajoute à la dégradation économique structurelle et agit comme un accélérateur de la dette – est liée à une crise sanitaire prétendument dramatique.
Or, dans ce contexte, la priorité du gouvernement n’est pas de faire un moratoire sur la liquidation du service public hospitalier ou de mettre gratuitement à disposition des français un médicament existant et peu onéreux, le Plaquenil dont la molécule active est l’hydroxychloroquine ! Tout au contraire, ledit médicament peu onéreux en question s’est vu, en tout début d’épidémie (janvier 2020) interdit de prescription car brutalement classé comme substance vénéneuse ! Dans le même temps qu’était largement promu par les pouvoirs publics l’arrivée d’un nouveau médicament très onéreux, n’ayant aucunement fait ses preuves et suspecté de vice caché, le Remdesivir du laboratoire pharmaceutique Gilead.
Mais ce n’est pas tout, car dans ce contexte sanitaire préoccupant, pour le moins que l’on puisse en dire, le PLF pour 2021 nous renseigne sur une des priorités du gouvernement : l’accroissement des moyens financiers du Ministère de l’Intérieur… du Ministère de l’intérieur, vous avez bien lu, pas du Ministère de la Santé ! Ainsi, le Ministère de l’intérieur voit son budget augmenter, par rapport à 2020, de la coquette somme d’un milliard d’euros.
Parmi ce milliard, 35 millions seront affectés à l’équipement… on imagine dès lors que la surveillance sanitaire des grandes villes par drones, comme cela est déjà le cas à Marseille, va être assez rapidement généralisée partout sur le territoire. La France économiquement effondrée va donc se réveiller en pleine dystopie avec des voix tombant des drones intimant à la population de « garder des distances de sécurité » et de porter « le masque ».
Nous voilà en plein carnaval de Venise ; ce qui est normal puisque justement le principe de domination de l’empire vénitien est en train de resurgir à grande vitesse. Avec, aux dernières nouvelles, Christine Lagarde-des banques qui prévient « la zone euro » de se préparer à l’ arrivée d’un « euro numérique ».
Tiens, ça tombe bien car l’année 2021 sera justement l’année de réévaluation du panier de monnaies du FMI appelé DTS (Droits de Tirage Spéciaux). Rappelons que ce panier de monnaie est prévu pour se transformer en monnaie mondiale – ce dont DSK avait fait les frais en son temps, en remplacement du dollar US. Cette réforme des DTS/Phénix sera l’occasion idoine de réévaluer au passage la valeur de chacun des ingrédients monétaires du gros gâteau DTS. Ainsi, l’euro numérique pourra être facilement réévalué en fonction de la richesse réelle nette – c’est-à-dire des actifs réels, déduction faite des dettes bancaires – de la zone euro. Plus généralement, chaque zone monétaire, y compris les États-Unis d’Amérique, verra sa part de DTS réévaluée en fonction de ses actifs réels.
Remettre le problème budgétaire français dans le contexte monétaire international permet de mieux percevoir et apprécier l’avenir de la France, qui se résume en quatre mots : « disparition pure et simple ». Car, en raison du niveau astronomique de la dette publique supportée par la France, le patrimoine public devra intégralement être vendu pour servir de garantie à ses créanciers. Or, de façon mécanique, une France sans patrimoine public n’aura pas d’existence monétaire – rappelons à toutes fins utiles qu’une monnaie est intimement liée à une économie – pas plus que les français n’auront d’existence juridique dans les institutions européennes intégrées.
En parlant des institutions européennes, il importe d’ailleurs, pour les plus ignorants, de bien mettre en avant les « priorités » décrétées par ses dirigeants de paille : il s’agit de l’écologie et du numérique. Ainsi, ni la santé publique, ni la durée de vie ou le niveau de vie des ressortissants français ne sont une priorité… la priorité européenne est l’écologie, dans sa version Club de Rome, et le Numérique. La priorité numérique permettra en effet :
- Que la future monnaie européenne et mondiale puisse aisément circuler,
- Que l’identité des ressortissants européens devienne également numérique,
- Que la santé soit intégrée à l’identité numérique.
Cette intégration se faisant à la faveur de la pression de la Covid, les pouvoirs publics pourront tracer les malades et leurs familles, pour aller vers un carnet de santé numérique et gérer la masse populaire en fonction de critères obscurs tels que, par exemple, l’obtention d’une vaccination forcée.
On comprend que l’alliance des priorités écologique et numérique de l’Union Européenne promet des jours heureux aux habitants de l’Europe, ainsi :
- Le minage de monnaie, c’est-à-dire l’affectation monétaire individuelle, sera conditionnée à la réalisation d’une activité physique déterminée,
- La possibilité de vie sociale sera conditionnée à la soumission individuelle au vaccin ou à toutes sortes d’expériences génétiques ou sanitaires des multinationales de la santé et de l’agro-alimentaire.
Nous examinerons, dans une seconde partie, les conséquences connues de la dette. Ainsi, loin d’être une abstraction, nous verrons que la dette a des conséquences humaines et qu’elle se paye avec le sang. Telle est précisément la raison pour laquelle nous avons intitulé notre article « La dette de sang ».
Source France Soir
Notes
- https://www.les-crises.fr/plan-de-relance-europeen-tout-ca-pour-ca%e2%80%89-par-jean-michel-naulot ; https://www.les-crises.fr/1-l-accord-europeen-du-21-07-un-deplorable-plan-d-endettement-de-750-milliards ; https://www.les-crises.fr/l-accord-europeen-2-2-budget-en-baisse-controle-des-États-par-la-commission-en-hausse ↩