« Les grandes erreurs de la seconde guerre mondiale » aborde les années 1939-1945 sous un angle inattendu: celui des grandes erreurs politiques, diplomatiques et militaires qui ont marqué l’histoire de ce conflit. Le résultat est fascinant. L’ouvrage, réalisé par 12 auteurs sous la direction de deux spécialistes de cette époque, Jean Lopez et Olivier Wieviorka nous fait redécouvrir l’apocalypse à travers les fautes majeures, commises dans un camp ou dans l’autre.
L’ouvrage débute par un rappel des reculades des démocraties face à la montée de l’Allemagne nationale-socialiste à partir de 1934: réarmement de la Rhénanie en mars 1936, l’Anschluss et Munich en 1938 . « L’apaisement, une erreur » Que d’occasions ratées d’interrompre la course folle de la planète vers la grande déflagration. La politique d’accommodation avec les nazis, dans les années 1930, fut l’une des pires erreurs de jugement de la classe dirigeante de l’histoire du XXe siècle,, en tout cas celle aux conséquences les plus désastreuses.
Il lève le mystère sur le débarquement de Dieppe le 8 septembre 1942. 6700 Canadiens et Britannique tentent ainsi un débarquement éclair destiné à prendre les Allemands par surprise. Après des succès initiaux l’ennemi se ressaisi. Le fiasco est complet et le taux de perte de 60% (prisonniers et tués). Longtemps le mystère a régné sur l’origine de cette intervention suicide: avant tout, une opération commando destinée à s’emparer d’une machine à crypter les communications avec les sous-marins (Enigma).
Le livre fourmille de révélations, d’analyses passionnantes. Sa lecture mène de surprise en surprise. L’opération Torch, le débarquement américain en Afrique du Nord, le 9 novembre 1942, était selon M. Wieviorkia d’une opportunité discutable. Exigé par Churchill pour apaiser la pression sur les forces britanniques combattant dans le désert libyen, cette intervention a peut-être eu pour effet de retarder d’un an le débarquement en Normandie, donc la Libération de la France. Or, en 1943, le mur de l’Atlantique n’était pas achevé et les défenses allemandes, comme le démontre l’historien, moins puissantes qu’en juin 1944.
« La surprise de Barbarossa » raconte la chute de Staline dans la paranoïa au moment de l’attaque allemande du 20 juin 1941, envoûté par ses relations cordiales avec l’Allemagne hitlérienne, il sombre dans le déni de réalité, menace les généraux et dirigeants soviétiques qui lui apportent la nouvelle de l’invasion, refuse de les croire, donne des ordres de ne pas réagir à ce qu’il croit être une provocation.
A l’inverse, Jean Lopez fait le récit des errements d’Hitler et de ses généraux, dès juillet 1942 entre la prise symbolique de Stalingrad et celle de Bakou et ses champs pétrolifères. L’indécision, les volte-face, les choix contradictoires, l’incohérence de la stratégie suivie conduisent à la destruction des 250 000 hommes de la VIe armée de Von Paulus pendant l’hiver 1942-1943 et ouvrent la voie à l’échec de l’Allemagne hitlérienne.
Les autres chapitres concernent l’invasion de la Chine; l’alliance d’Hitler avec l’Italie; la manœuvre Dyle-Breda (l’offensive franco-britanique par la Belgique ouvrant la voie à la percée des Ardennes); l’arrêt des Panzer devant Dunkerque (une erreur irréparable de Hitler?); l’intervention italienne en Grèce; ne pas capturer Malte; la défense de Singapour; Midway, la mauvaise bataille au mauvais endroit; Hitler et le Moyen-Orient; le bombardement de Monte-Cassino; le bombardement stratégique (anglo-américain sur l’Allemagne); la capitulation inconditionnelle, erreur évitable ou préalable indispensable à la victoire alliée; l’échec de l’insurrection de Varsovie; « Marquet Garden » septembre 1944, les dessous d’un magnifique désastre. »
Tous les chapitres sont plus passionnants les uns que les autres, racontés comme un récit d’aventure et fourmillant de découvertes et de surprises. Les auteurs soulèvent en général davantage de questions et ouvrent davantage de débats qu’ils n’apportent de solutions définitives. Un livre essentiel pour les amateurs d’histoire de la Deuxième guerre mondiale.
Maxime TANDONNET