Un journaliste qui vote Hollande passerait presque pour être de droite ! Nos médias sont doublement soumis, à l'argent et à la pensée unique. C'est si confortable, la gauche…
C’est devenu classique ! Qu'il entre au bistrot ou chez un commerçant, le journaliste est accueilli par une boutade, pas toujours la même, mais qui, sur un ton entendu, signifie toujours la même chose. ces journaleux racontent n'importe quoi. Quand ils ne racontent pas simplement ce qu'on leur demande de raconter - quitte à prendre des libertés, façon record du monde du grand écart, avec la réalité. Cet « on », c'est bien sûr le système. Les éclats de voix entre politiques et média, c'est bien connu, ne sont là que pour épater la galerie. En fait, tout ce petit monde s'entend, dans la pratique, comme larrons en foire. Et pour cause; puisque, formés quasiment tous à la même école, les journalistes revendiquent une uniformité d'expression et d'idéologie. Façonnés par les mêmes « valeurs », ils expriment une pensée qui n'est pas même leur, une pensée unique, réalité intangible qui avait poussé l'hebdomadaire Marianne, en son temps, à évoquer « le clan des clones ». Contrairement à ce que l'on pourrait croire de média qui récusent avec véhémence l'idée d'appartenir à la presse « d'opinion », ces supports ne sont pas neutres. Ils véhiculent une bien-pensance fondée sur l'anti-racisme, le mondialisme, la repentance, etc. et le rejet de tout ce qui, de prêt ou de loin, pourrait ressembler à une tradition, forcément convaincue d'être réactionnaire.
L'alliance du trotskisme et du capitalisme
Ce monde à part a sa propre grille de lecture, tristement linéaire, directement héritée des directives publiques, et dont la Fondation Polemia(1) donnait tout dernièrement un exemple flagrant au premier tour de la dernière présidentielle, 71 % des élèves du CELSA et 85 % de ceux de l'ESJ de Lille, deux des principales écoles de journalisme, ont voté à gauche, voire à l'extrême gauche (pour la moitié d'entre eux). Sans parler de ceux qui, en outre, sont encartés.
A l'ESJ, la moitié des étudiants votaient ainsi pour Jean-Luc Mélenchon ou pour Eva Joly, alors qu'au premier tour de la présidentielle, ces deux candidats ont totalisé sur leurs noms à peine plus de 13 % des suffrages (2,3 % pour Joly et 11,1 % pour Mélenchon). Si l'on pense qu'il s'agit des futurs journalistes, la réconciliation des Français et des médias n'est pas pour demain.
Polemia observait d'ailleurs dans un petit ouvrage publié récemment sous la plume de Claude Lorne Les médias en servitude, que le métier d'information subit ainsi une « alliance du trotskisme des salles de rédaction et du capitalisme financier ». Il y a dix ans, Marianne évoquait déjà le poids de l'argent comme l'une des contraintes qui pèsent le plus lourdement sur l'indépendance d'une profession, dans laquelle, finalement, mieux vaut suivre Panurge (et sa diversité de titres) que de prendre le risque, prétentieux qui plus est, d'avoir raison.
Interrogés à l'époque par l'hebdomadaire, seuls 6 % des journalistes envisageaient de voter « à droite », c'est-à-dire - il ne faut pas exagérer ! - pour Chirac, Madelin ou Bayrou. Au terme du mandat de Nicolas Sarkozy, gageons que les choses n'ont pas évolué..
Les clones continuent, quoi qu'il en soit, à présenter le monde tel qu'il devrait être. Et tant pis pour les faits, dont Lénine disait pourtant qu'ils sont têtus. Le journaliste français est sans doute la seule personne à être encore plus têtue qu'eux.
1). www.polemia.com
Olivier Figueras monde&vie 26 mai 2012 n°860