Qu'est-ce que l'Union Européenne ? Cette question est essentielle. Elle est trop souvent remplacée par une autre question : doit-on sortir de européenne ? Question littéralement inaudible tant que l’on n’a pas répondu efficacement à la première.
Après 20 ans de la politique du voleur chinois, nous nous sommes laissé dérober beaucoup de notre souveraineté. Nous nous trouvons aujourd'hui saucissonnés dans les transferts de souveraineté, ligotés, incapables de la moindre politique française.
Et pourtant, la première chose à faire n’est pas forcément de sortir de l'Union européenne. Il faut reconquérir pied à pied notre indépendance, comme l'Italie est en train de le faire par la bouche de Matteo Salvini, rappelant par exemple que « la Russie est notre allié fondamental » ou que « nous n’ouvrirons pas nos ports » à n'importe quel bateau de migrants…
Si (pur fantasme), Emmanuel Macron, ou disons un président français développait la même politique volontariste et nationale que Giuseppe Conte, le président du Conseil italien, alors, on pourrait penser que cette nouvelle Union soviétique qu’est l'Union européenne aurait bientôt cessé d’endormir les peuples. Si, au contraire, nous cédions au mirage dont se repait depuis des décennies le fameux couple franco-allemand, cela signifierait que nous laisserions l'Allemagne mener une politique de puissance à son profit (y compris à nos dépens), et que nous continuerions d’être les victimes de la casse européenne. Jusqu’où ?
La question n’est pas d abord de sortir de l'UE mais de faire la vérité à son propos, d'opérer ce que les Russes d'Union soviétique avaient appelé la glasnost. Le dissident Vladimir Boukovsky s’est posé naguère cette question de la vérité et l'Union européenne lui rappelait irrésistiblement l'Union soviétique, quant au déni de démocratie qu'on y constate : « L’URSS était gouvernée par 15 personnes non élues qui se cooptaient mutuellement et ne devaient rendre de comptes à personne. L’UE est gouvernée par deux douzaines de personnes qui se cooptent mutuellement, se réunissent à huis clos, ne doivent rendre de comptes à personne et que l’on ne peut limoger ». Même centralisme administratif. Même super-classe dirigeante. Les deux monstres administratifs ont aussi la même politique migratoire. L'URSS organisait une sorte de tournante horrible des peuples qui la compose, expédiant les uns et les autres aux quatre coins de son immense domaine. L'UE, elle, importe sa main d'oeuvre, elle fait rentrer en son sein, par millions, des populations qui ne pourront être que les serfs du Progrès global. Boukovsky le note : « Tout comme l'Union soviétique, l'Union Européenne porte en elle les germes de sa propre perte. Malheureusement, quand elle va s'effondrer […] elle laissera derrière elle d'immenses destructions et de gigantesques problèmes économiques et ethniques » De façon étonnante, Boukovsky montre que face aux deux monstres administratifs, la seule solution immédiate est la résistance, cette résistance dont l'Italie a entrepris de nous donner l’exemple aujourd'hui. Les paroles du dissident résonnent étrangement à nos oreilles : « Le système soviétique était incapable de se réformer tout comme l'UE. Mais il y a une alternative […] : l'indépendance. Vous n’êtes pas obligés d'accepter ce qu'ils ont prévu pour vous. Après tout, on ne vous a jamais demandé votre avis »
De plus en plus aujourd'hui, les pays membres de l'Union européenne comprennent que la seule attitude qui ne soit pas suicidaire n'est pas de quitter ce navire fantôme dans lequel chacun se trouve comme englué, mais de résister aux ordres de l'équipage administratif qui le représente. Il y a d'abord eu le groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, Tchéquie et Slovaquie) . Le V4 existe depuis 1991, il entend perpétuer l'esprit de l'Empire austro-hongrois, et cultive un conservatisme de bon aloi. Le groupe s’est insurgé contre l'idée des quotas de migrants par pays et il a sur ce point donné l’exemple de la désobéissance à l'UE. La Slovénie aujourd'hui et l’Autriche se rapprochent des positions du V4. L’Allemagne elle-même, à travers son nouveau ministre de l'intérieur, le conservateur bavarois Horst Seehofer, contre l'avis de la chancelière Angela Merkel, annonce un axe des volontaires, avec Rome et Vienne, sans même se soucier, apparemment, d'avoir repris pour ce faire le terme historiquement connoté d'axe.
À côté du réalisme des différents pays européens, l’européisme chimérique d'Emmanuel Macron fait de la peine à quiconque croit encore un peu dans la France. Après sa valse-hésitation avec l'Espagne à propos des 600 migrants de l’Aquarius, notre président risque de se retrouver bien seul. Déjà la statue du surdoué s’écaille. Ses échecs successifs, auprès de Trump, qui n’a eu que faire du petit Français dans l’affaire iranienne, auprès de Poutine qu'il a maladroitement humilié, font apparaître de plus en plus le macronisme comme un art de l'illusion politique et une tentative désespérée de maintenir le statu quo européen, alors que tout change et que l'Union européenne est en train d'imploser.
Alain Hasso monde&vie 21 juin 2018 n°957