L’un des signes de la décadence réside dans la disparition des buts qui justifient une institution. Celle-ci tourne à vide. Ses actions ne sont plus que des rites. C’est le triomphe des bulles qui tournent en rond avant d’éclater. Les objectifs poursuivis par l’institution s’estompent alors que le décor seul subsiste. Ainsi en est-il de la Présidence de la République, restaurée en 1958 par le Général de Gaulle pour redonner à la France une direction claire avec un Chef de L’Etat qui ne soit pas ce qu’étaient les locataires de l’Elysée sous les deux républiques précédentes : un personnage symbolique paradoxalement dénué de relief puisqu’élu par ses collègues politiciens en raison d’une médiocrité rassurante.
Le Président de la Ve République choisi par le peuple lors de l’élection qui rassemble le plus grand nombre d’électeurs devait être une sorte de monarque élu, un arbitre suprême garant de l’indépendance nationale, une vigie de la France au long cours. C’est aujourd’hui un haut fonctionnaire qui a commencé par pantoufler dans la banque et est parvenu au pouvoir sans le moindre mérite dans une vie encore trop bréve, grâce à de puissantes amitiés et un coup d’Etat judiciaire qu’une presse complaisante a rapidement enterré. La présidence de la Ve République réclame un homme exceptionnel. Ce sont désormais les médias courtisans qui le fabriquent à coups de faux-semblants et de mise en scène.
La France se flattait de la puissance planificatrice et organisatrice de son Etat centralisé. La crise sanitaire a montré la déficience de cet Etat et de ses nombreuses et coûteuses institutions, de ses organismes tentaculaires, de ses administrations pesantes. Retards sur les masques, sur les tests, sur les vaccins, sur les lits de réanimation. Le système sanitaire a révélé ce qu’était devenu notre pays, coupé en deux avec en bas des hôpitaux et des personnels médicaux surchargés et en haut un appareil d’Etat occupé par les amis du pouvoir en place, nos apparatchiks, spécialistes de la trilogie d’Edgar Faure : litanie, liturgie, léthargie, pratiquée chaque soir par ses grands prêtres Salomon et Veran. Pas une fois la France ne s’est montrée capable d’innover, de faire face à la crise de manière intelligente et créatrice. Son déclin objectif s’est révélé par l’absence d’un vaccin français, la décadence de ses “élites” s’est traduite par un suivisme consternant dans le confinement massif et aveugle. En revanche, la lourdeur d’un Etat obèse et impuissant a multiplié les contraintes, les interdictions et les obligations jusqu’à changer l’image de notre pays, l’art de vivre de ses habitants, et l’état d’esprit de sa culture animé de liberté et d’hédonisme. La France de Descartes et de Napoléon obéissait à un ordre politique central garant de la rationalité de son organisation, de la cohérence de ses règles, compensée par la légèreté légendaire du fonds gaulois. L’Etat s’est acharné au contraire à produire un nouveau pays, un Absurdistan où à défaut de fermer les frontières, notamment aux clandestins, on enfermait sous la menace de sanctions les Français chez eux, où à défaut de peines planchers pour les malfrats, de sanctions appliquées pour les multirécidivistes des banlieues, on n’hésite pas à taxer de manière automatique et sans véritable recours le citoyen et automobiliste, coincé sur l’autoroute par un embouteillage au-delà du couvre-feu.
L’autre signe de notre décadence est le règne du flou et de la confusion. Depuis un certain temps, le doute prenait corps. La France est-elle une démocratie ? Chaque jour qui passe confirme qu’elle ne l’est pas. C’est une certitude douloureuse dont l’habituelle arrogance française a du mal à se convaincre. La France est une oligarchie dominée par un microcosme essentiellement parisien composé de propriétaires de médias, de journalistes, de la nomenklatura des énarques et autres courtisans du pouvoir que celui-ci a semés dans des organismes destinés à leur pantouflage bavard. Autour d’elle gravite une bonne partie du monde du spectacle qui se sent chez elle puisque la politique n’est plus qu’un spectacle. Cette caste cultive trois marottes : d’abord, faute d’un intérêt sincère pour les Français qui connaissent de vraies difficultés, sa passion prééminente est l’avancée “sociétale”, le dérèglement des moeurs, la destruction des institutions, le prétendu “progressisme” ; ensuite, la détestation des racines la conduit à l'”autrisme” militant qui refuse l’identité nationale, l’idée d’une culture française et veut déconstruire une histoire qui doit justement être le creuset de l’unité de la nation ; enfin, le jeunisme : le passé est dépassé. Les jeunes dépourvus d’expérience et coupés des traditions qu’on ne sait plus leur transmettre vont inventer un monde meilleur. La conséquence en est par exemple ces ministres passés d’un cabinet politique à un conseil d’administration d’une entreprise liée à l’Etat et qui osent insulter des militaires qui ont risqué leur peau et servi la France avant de devenir des généraux.
On ne peut gouverner un pays comme la France avec bonheur qu’en mobilisant les Français vers un avenir qui les rende à nouveau fiers de leur nation et qui soit à la hauteur de son histoire. Les gouvernants actuels, ce salmigondis de socialistes recyclés, de technocrates prétentieux, et d’opportunistes plus ambitieux pour eux-mêmes que pour le pays, sont les acteurs de notre déclin et de notre décadence. Il est vital pour la France de s’en débarrasser au plus vite !