Plus les élections approchent et plus Emmanuel Macron s’agite, débordant soudain d’idées et d’initiatives. Dernière en date : la création d’une commission chargée de lutter contre les deux hydres du populisme que seraient les « fake news » et le « complotisme », deux termes suffisamment vagues et nébuleux pour pouvoir englober à peu près tout et n’importe quoi, à commencer, bien sûr, par toute pensée et expression dissidentes et non conformes.
Cette commission, officiellement censée « réfléchir aux impacts de la révolution numérique sur notre société et notre démocratie », sera composée de 14 experts – sociologues, historiens, politologues, professeurs, journalistes – et présidée par le sociologue Gérald Bronner, auteur du livre Apocalypse cognitive sorti au début de l’année.
La chasse aux vilaines « fake news » et aux méchants « complotistes » n’est pas nouvelle mais jusqu’à présent elle était effectuée par des entités associatives ou des entreprises privées. On pensera ici aux divers organes de presse, du type Le Monde ou Libération, qui s’étaient arrogé le droit d’accorder les bons et les mauvais points en matière d’information (à travers leurs articles de prétendu « décodage » ou de « vérification »), ce qui ne manquait pas de sel pour des médias maintes fois pris en flagrant délit de mensonge ou de manipulation (les Bobards d’or sont là chaque année pour le rappeler).
Mais aujourd’hui un nouveau cap est franchi, c’est désormais l’Etat qui prend les choses en main pour imposer ce qui ressemble fort à une « vérité officielle » devenant par nature incontestable.
Pourtant, s’il est indéniable que le développement des réseaux sociaux a favorisé la propagation d’un certain nombre de fausses nouvelles, de mensonges et de ragots (qui ont existé et circulé de tout temps…), la hargne des autorités contre ce qu’elles appellent les « fake news » et le « complotisme » ressemble surtout à une volonté de restreindre encore un peu plus la liberté d’expression et de criminaliser toute pensée hétérodoxe. Car sur quelle base « objective » attribue-t-on ces qualificatifs infamants et disqualifiant à tel ou tel ? Et quelle est la légitimité de ceux qui prétendent faire le tri dans l’information et son interprétation afin que les imbéciles que nous sommes ne risquent pas de faire de « mauvais choix » ? Dans les deux cas la réponse est : aucune.
Rappelons d’ailleurs que, à peine quelques mois avant que Brahim A., Tunisien arrivé en France via Lampedusa et les filières de migration, ne commette un abominable massacre à Nice, le fait d’affirmer que de potentiels terroristes pouvaient se trouver parmi les cohortes de migrants arrivant sur notre sol était doctement qualifié de « fake news » et dénoncé comme un « fantasme d’extrême droite ». On voit donc bien ici qu’il ne s’agit nullement d’un enjeu de vérité, mais bien d’une stratégie de contrôle de l’information et de formatage des esprits.
Dans toutes les dystopies, littéraires ou cinématographiques, imaginant un futur totalitaire, les citoyens n’ont plus besoin de penser, l’Etat le fait pour eux. Nous y sommes.
Xavier Eman
Article paru dans Présent daté du 4 octobre 2021