Deuxième erreur du progressisme. Les valeurs sur lesquelles il repose sont pour l’essentiel autant de chimères. L’égalité, tout d’abord, ne correspond à rien de naturel : l’égalité n’existe pas dans la nature. De même aucune égalité n’est possible entre les hommes. C’est au contraire les différences et les inégalités qui dominent (du point de vue de la santé, de la beauté, des aptitudes et des dons, des héritages familiaux…). La recherche de la justice et le souci de permettre aux pauvres de bénéficier de conditions de vie humaines sont des éléments importants de la civilisation européenne : la poursuite d’une égalité des conditions est en revanche illusoire et perverse. Antinaturelle, elle ne peut déboucher que sur l’oppression.
La liberté comme absolu est, elle-aussi, un leurre. L’individu possède bien sûr des droits et la tyrannie est évidemment à proscrire. Sous l’ancien régime, contrairement à ce qu’affirme la propagande progressiste, l’individu avait des droits, protégés par les lois : c’est ainsi que quelques semaines avant sa destitution, Louis XVI dénonçait les exactions révolutionnaires, en particulier la détention arbitraire, qui, affirmait-il, constitue le pire des crimes. Pourtant, si la liberté individuelle est précieuse, elle ne peut être évidemment sans limites. Les droits de l’individu sont restreints par ses devoirs envers la société et par l’obligation de se conformer aux différentes règles et coutumes qui l’encadrent et la rendent homogène et solide. La démocratie est un leurre également : une société solide repose sur l’attribution aux différentes strates sociales de fonctions différenciées. Le gouvernement est la fonction même de l’élite : imaginer le confier au peuple est le summum de la démagogie. Dans les sociétés contemporaines tout montre au demeurant que la démocratie n’est qu’apparence et hypocrisie. Le peuple est manipulé, formaté par la propagande et vote sans disposer des moyens de se prononcer de façon rationnelle et éclairée. Il en est de même de l’idée de progrès, tout aussi illusoire dès lors qu’elle est sacralisée. L’individu au cours de sa vie progresse, sans doute, dans la connaissance de la vie, mais c’est pour mieux dépérir ensuite, régresser et mourir. De même les sociétés et les civilisations progressent, jusqu’à atteindre une certaine apogée, mais elles connaissent ensuite une phase de déclin et finissent par disparaître. Dans le domaine des techniques, il est évident que certaines technologies peuvent constituer de faux progrès et de vrais dangers. Quant à l’universalisme des modernes, il s’agit là encore d’un leurre. L’homme universel n’existe pas. Pour l’individu, les cadres de proximité ont une réalité, sa famille, son clan, son village, son pays, sa religion, sa civilisation. Tout cela est concret, charnel et a une implication directe dans la vie de chaque jour. L’appartenance à l’humanité constitue en revanche une idée abstraite, sans conséquence directe, sauf chez les idéologues, sur la vie de chacun. En un mot, tous les concepts qui constituent les valeurs de la modernité sont des illusions et des chimères, parce qu’ils ne correspondent pas à la nature humaine (voir cette chronique et celle-ci).
Le progressisme est une impasse pour une troisième raison. Contrairement à ce que pensent les progressistes, la morale privée et les principes du gouvernement n’ont le plus souvent rien en commun. Dans la vie personnelle et sociale, il s’agit de se conformer à la morale et aux mœurs communes : d’abord bien sûr de ne pas nuire à autrui, mais aussi se montrer pacifique, savoir partager, être attentif aux autres, notamment aux personnes en difficulté. Ces principes sont ceux de la morale chrétienne, l’un des principaux fondements de la civilisation européenne. Or, nous évoquions déjà plus avant ce point décisif, ces principes d’inspiration chrétienne n’ont pas lieu d’être dès lors qu’il s’agit de gouverner un peuple et une nation. Ce sont des principes différents et même souvent inverses qui doivent alors s’appliquer : pour cette raison que le but du gouvernement légitime est de servir les intérêts du groupe, du peuple, de la nation dont il émane, et d’abord de favoriser autant que possible leur pérennité. Cette politique implique le plus souvent de concurrencer les autres nations et les autres peuples, de s’en protéger, de se défendre contre eux en cas de danger. Un gouvernement peut être amené à coopérer avec d’autres, dont il se sent proche ou avec lesquels il est allié : cette politique ne repose pas sur la morale mais simplement sur les intérêts bien compris de la nation. Machiavel l’a établi clairement : le gouvernement d’un peuple ne répond pas aux règles morales que doivent s’imposer les individus. Si une société se met à appliquer pour son gouvernement les principes de la morale privée, elle s’affaiblit, devient une proie et est vouée à être conquise à brève échéance (voir cette chronique et celle-ci).
La dernière erreur du progressisme est la principale : une société pérenne ne peut reposer que sur le collectif et les devoirs des individus envers celui-ci. Ainsi que l’illustre l’histoire contemporaine de la France, une société fondée sur l’individualisme et les droits des individus est vouée à se dissoudre. L’individualisme conduit par exemple à ces deux comportements catastrophiques et suicidaires. C’est avant tout par souci individualiste et hédoniste que les Européens choisissent désormais de ne plus avoir qu’un nombre très faible d’enfants. Ce choix les place en position de faiblesse face aux populations immigrées, caractérisées notamment par leur dynamisme démographique. De même, si les populations européennes se laissent envahir par l’immigration sans réagir et sans se débarrasser de leurs gouvernements immigrationnistes, c’est certes parce qu’elles sont victimes de la propagande immigrationniste du Système. Elles sont également influencées par la religion progressiste, fondée comme on l’a dit sur une lecture au pied de la lettre de l’Evangile, qui donne la priorité à l’Autre. Mais c’est aussi et surtout par individualisme et absence de sentiment d’identité et d’appartenance que les populations européennes se laissent envahir sans aucune réaction.
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La révolution française continue donc. Les progressistes veulent depuis deux cents ans détruire l’ancienne société. Les antifas et autres black-blocs ont ainsi succédé aux sans-culottes. On retrouve de même aujourd’hui, dans toutes les luttes pour le progrès et l’émancipation, les francs-maçons et les protestants, déjà en première ligne en 1789. Ils sont notamment la pointe avancée du camp immigrationniste. Avec l’invasion migratoire, les progressistes ont en effet trouvé le moyen radical de parvenir à leurs fins.
Sur l’autel des valeurs, ils vont ainsi détruire la société hautement civilisée et aboutie qu’était la société européenne. Au nom du Bien et du Progrès, ils vont créer l’enfer, dont on sait bien qu’il est le plus souvent pavé de bonnes intentions. Pour avoir voulu inventer un homme nouveau et faire naître un monde meilleur, ils vont permettre aux populations venues d’Afrique et d’Orient de conquérir et de dominer l’Europe en appliquant les principes les plus ancestraux qui soient : la loi du nombre, la loi du plus fort, la loi du plus violent.
Ramassons tout cela d’un mot. La disparition probable de la civilisation européenne a plusieurs causes, nous y reviendrons. Mais c’est d’abord à la révolution française et aux progressistes qui en sont issus qu’elle devra sa fin, sans doute désormais inéluctable et prochaine.
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