Le mot « shrinkflation » est une contraction du verbe to shrink (« réduire », en anglais) et du mot « inflation ». C’est la tablette de chocolat qui a gardé le même nombre de carrés et son prix mais a perdu un demi-centimètre de chaque côté ; c’est le pot de fromage blanc ou de rillettes dont le fond remonte désormais jusqu’à la moitié ; le tube en carton des rouleaux de toilette qui a pris du diamètre ; les kilos qui ne font plus que 980 grammes, les céréales qui se baladent à l’aise dans leur boîte en carton ou certaines bouteilles d’eau minérale qui ne contiennent plus que 1,15 litre, contre 1,25 hier et 1,5 avant-hier. Etc.
Même sans y être particulièrement attentif, nous avons tous fait ce constat : à prix identique, on a aujourd’hui moins de marchandise qu’hier. « C’est une augmentation du coût du produit qui ne se fait pas par le prix du produit mais par la réduction de la quantité, pour le même prix », dit, aux Échos, Pierre Chandon, professeur de marketing au prestigieux INSEAD [Institut européen d'administration des affaires, NDLR].
Bref, de « l’inflation masquée » et l’ONG Foodwatch publie, ce jeudi, un rapport sur le sujet, dénonçant cette astuce qu’ont trouvée les industriels de l’agroalimentaire pour dissimuler la hausse des prix. « Il s’agit de réduire la taille des produits avec un tarif à l’unité qui n’augmente pas ou peu, mais un prix au kilo ou au litre qui s’envole », dit Foodwatch, cela, « alors que les prix à la consommation augmentent déjà de 5,8 % sur un an, selon les chiffres de l’INSEE publiés ce mercredi », souligne Le Parisien. Alors, en parallèle de son rapport, l’ONG lance une pétition à faire signer aux consommateurs floués (dans le cadre de l’émission « Complément d’enquête », sur France 2).
Reste que « du moment que l’étiquetage est conforme, il n’y a rien d’illégal », souligne notre professeur de marketing. Sans doute, et c’est au consommateur d’être attentif et de ne pas se laisser berner par de pseudo bonnes affaires dont on sait bien qu’elle sont souvent tout sauf une bonne affaire, justement.
Si l’on écoute les industriels, ils ont évidemment de bons motifs à invoquer pour recourir à ce système : changement d’emballages pour satisfaire aux nouvelles injonctions écologiques, changement de recettes, etc. Cela à conjuguer avec la forte hausse du coût des matières premières.
Ce qui surprend ici, c’est bien qu’on feigne d’être surpris, car il y a belle lurette qu’on subit cette politique, et pas seulement dans le domaine alimentaire. Depuis combien de décennies a-t-on vu arriver sur le marché – un exemple – des vêtements dont les coutures se défont parce que le fil ne vaut rien et parce qu’il n’y a « rien dans la couture » (parfois juste 1 mm de tissu), comme on disait autrefois ?
Nous avons fabriqué cette société dont l’alpha et l’oméga sont la consommation. On nous l’a même vendue comme vertu citoyenne. Nos célébrités ne sont plus des gens de talent, grands scientifiques, penseurs, artistes… mais des « influenceurs » que les marques chouchoutent et couvrent d’or pour entraîner les gogos dans leur sillage.
Il est temps que la ménagère et le ménager lâchent leur smartphone et réapprennent à lire les étiquettes. Malheureusement, avec 7 % d’illettrés dans la population adulte et 20 % des jeunes qui quittent l’école sans vraiment savoir lire, ce n’est pas demain qu’on aura des consommateurs avertis…
Marie Delarue
https://www.bvoltaire.fr/la-shrinkflation-cette-arnaque-tapie-dans-les-rayons-de-vos-supermarches/