De telles mesures étaient évidemment à hauts risques, depuis le naufrage d’un bateau d’immigrés clandestins, afghans pour la plupart, ce 26 février, aux alentours de Cutro, dans le Sud de l’Italie. Bilan ? 72 victimes à déplorer. Si une telle tragédie était survenue sur les côtes françaises, nul doute que nos autorités, après avoir joué les pleureuses, auraient illico promis une loi nouvelle visant à renforcer le contrôle technique sur les navires passablement fatigués.
La pétulante Giorgia Meloni prend une toute autre voie, proposant au contraire une loi permettant d’infliger des peines de prison allant jusqu’à trente ans pour les passeurs : « Nous voulons combattre l’esclavage du troisième millénaire incarné par ces organisations criminelles. » On notera que le pape François, sortant pour une fois de son ambiguïté coutumière – jésuite un jour, jésuite toujours – a été droit au but ce 5 mars : « Que les trafiquants d’êtres humains soient arrêtés, qu’ils ne puissent plus disposer de la vie de tant d’innocents. »
Ficelle comme à son habitude, c’est précisément cette phrase que Giorgia Meloni a choisi de graver dans le marbre de la stèle érigée sur les lieux de ce naufrage. Et d’en profiter au passage pour proposer une restriction drastique des droits jusque-là accordés à la masse des indésirables. Parmi ces restrictions, les permis de séjour, à l’en croire trop généreusement attribués pour des raisons humanitaires souvent assez vagues. Dans la foulée, la nouvelle dame de fer italienne, tient en ligne de mire ces pays qui « collaborent », de près ou de loin, au juteux bizness de la misère, leur promettant, s’ils persistent, une réduction drastique des visas de leurs ressortissants.
Sans grande surprise, son opposition ronchonne. Mais pas trop fort non plus, car sa politique est plus que populaire dans ce pays placé en première ligne face à la déferlante migratoire. Ainsi, Laura Boldrini, député du Parti démocrate (centre-gauche) et ancienne porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés, assure-t-elle une sorte de service minimum en affirmant : « Rien n’est fait pour une bonne politique italienne de gouvernance de l’immigration. » Dans le registre C’est pas parce qu’on n’a rien à dire qu’il faut fermer sa gueule, le fameux film de Jacques Besnard tourné en 1975, la déclaration ne peut que faire sourire.
Prévenant les critiques à venir, Antonio Tajani, patron de la diplomatie italienne, affirme, non sans raison : « Ni l’Italie, ni aucun autre pays n’est capable d’affronter seul des situations internationales complexes. » Seule, non. Mais seule, l’Italie l'est de moins en moins.
Ainsi, l’Angleterre, autre pays européen, ne l’est certes que lorsque cela l’arrange. Mais il sert aussi la vis de l'immigration. Comme la Hongrie, l’Autriche, la Suède, le Danemark, et d’autres qui pourraient bien basculer à courte échéance. Bref, il n’est pas improbable que le Vieux continent finisse par sortir de cette torpeur à base d’angélisme niais et de ces vilaines arrière-pensées voulant qu’une immigration de masse puisse résoudre ses problèmes de natalité, de retraites et de main d’œuvre peu qualifiée.
En ce sens, il n’y a guère, entre les trafiquants de l'immigration et Ursula von der Leyen, matrone de la Commission européenne, qu’une menue différence : elle veut importer des immigrés en masse. Qui pourrait s’indigner que des aigrefins les lui fournissent sur un plateau ?
Nicolas Gauthier