Il existe, en réalité, deux types de réactions. La première consiste à dénoncer immédiatement, à s’indigner devant cette horde de gauchistes décérébrés qui ne souhaitent qu’une seule chose : le chaos. La seconde façon de réagir consiste, cette fois-ci, à « seulement » regretter ces affrontements tout en expliquant que le véritable responsable est le président de la République. Il serait l’unique fautif de cet immense brasier qu’il décide d’attiser au gré de sa suffisance.
Ces personnes, du second groupe, rêvent secrètement, ou non d’ailleurs, d’une nouvelle Révolution (française ou nationale). On aurait, en effet, parfois tendance, avec un peu de romantisme, à imaginer un renversement total des institutions du pays. Que ceux qui choisirent, un jour, d’échanger leur dignité contre un poste soient exclus par la violence.
Mais sans doute qu’il est souhaitable que cela n’arrive jamais. Pour cela, il faudrait que l’un des pouvoirs constituant notre démocratie s’empare avec sérieux de la problématique. Ce pouvoir, c’est évidemment le pouvoir judiciaire. C’est à lui que revient la tâche de décider ce que l’on doit faire de ces personnes en mal de sensation et de sens. En réalité, les juges disposent d’un arsenal juridique extrêmement élargi, s’ils souhaitaient, vraiment, mettre hors d’état de nuire les Black Blocs.
Il existe toutes les infractions classiques auxquelles on assiste à la télévision : la fabrication d’objets explosifs ou incendiaires, la détention de ces mêmes objets ou de toute autre arme par destination, les violences volontaires commises à l’encontre des militaires ou des policiers, et la tentative d’homicide. Pour ces faits, les auteurs peuvent encourir jusqu’à trente années d’emprisonnement.
Mais on pourrait pousser le raisonnement de la qualification juridique encore plus loin. L’article 412-1 du Code pénal qualifie d’actes terroristes les atteintes volontaires à la vie ou à l’intégrité de la personne, lorsqu’elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur.
Or, les Black Blocs n’ont-ils pas comme seul et unique objectif de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur en portant des atteintes volontaires à la vie ou à l’intégrité des personnes ?
La lâcheté gouvernementale consiste en l’emploi de termes empruntés au fascisme, comme « factieux », pour condamner les actions. Mais jamais ils ne tentent de qualifier juridiquement ce qui est en train de se dérouler sous leurs yeux.
Quant aux magistrats, il faut distinguer le parquet des juges du siège. C’est le procureur de la République, dont il faut rappeler qu’il dépend hiérarchiquement du garde des Sceaux, ministre de la Justice, qui décide des poursuites et des qualifications pénales. Autrement dit, il choisit soit la comparution immédiate, soit l’ouverture d’une information judiciaire, soit une convocation à venir se présenter devant la juridiction mais plus tard, soit tout simplement de relâcher la personne en garde à vue. C’est lui, également, qui choisit la ou les qualifications pénales : violence volontaire, dégradation, tentative d’homicide, acte de terrorisme…
Une fois passée cette étape, ce sont les juges du fond qui décideront de la peine à prononcer, grâce au fameux principe d’individualisation. Ce principe signifie que l’on prend en compte la personnalité de l’auteur de l’infraction (son passé judiciaire, son insertion dans la société, sa vie de famille, etc.) et les circonstances de cette même infraction.
Par conséquent, si le magistrat estime, en fonction de ses propres opinions politiques, qu’au fond, envoyer un cocktail Molotov, sur certains crânes rasés de la BRAV-M, n’est pas si grave, la peine pourra être allégée.
C’est cela, la réalité et l’hypocrisie de la justice. Il faudra certainement, dès lundi, se déplacer dans les salles d’audience de comparution immédiate, pour connaître les intentions judiciaires des magistrats qui auront à statuer sur les actes de certains Black Blocs.
La seule solution serait de rétablir les peines planchers et d’obliger les juges à les appliquer sous peine, pour eux, de véritables sanctions.
Maître Alain Belot
https://www.bvoltaire.fr/que-risquent-vraiment-les-black-blocs/