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Politique. Le clivage gauche-droite a-t-il un sens ?

Quand nous parlons de politique, très rapidement, nous parlons des personnes de gauche et des personnes de droite. Dans un article paru dans l’Incorrect1 ou un autre paru dans les 4 vérités2, à la question « Le clivage gauche-droite a-t-il encore un sens ? » ils répondront que ce clivage existe bel et bien, mais qu’il n’est pas vraiment définissable. Mais en fait, pour répondre constructivement à cette question, il serait peut-être nécessaire de commencer par définir ce qu’est la droite et ce qu’est la gauche… C’est ce que nous allons tenter de faire au travers de cet article.

La notion populaire de gauche et de droite

Pour commencer, tentons de donner des éléments qui définissent ce qu’est la gauche et la droite d’une manière générale, de manière à correspondre à ce qu’en pense le plus grand nombre. En relevant les avis, il est très intéressant de voir que les individus de « gauches » ne donnent pas les mêmes éléments que les individus de « droites ». Déjà ici, la définition diverge…

En effet, pour les personnes se disant plutôt de droite, la « gauche » serait un mouvement politique qui recherche le progrès et l’égalité à tout prix, au-delà des valeurs nationales. Elle serait également incohérente et détachée du réel. Elle n’aurait aucune attache aux valeurs traditionnelles et rejetterait toute idée de frontière par exemple. Quant à la « droite », il s’agirait d’un mouvement politique recherchant plutôt la stabilité et la légitimité de l’autorité. Elle chercherait à préserver de manière traditionnelle la culture du pays, à défendre ses intérêts sur la scène internationale et à promouvoir une France aux valeurs fortes.

Pour ce qui est des personnes se disant de « gauche »3, la droite serait un mouvement politique qui promeut un individualisme mortifère, où chacun ne pense qu’à lui à travers une surconsommation et une promotion intégrale du système capitaliste. Il promouvrait de ce fait les inégalités salariales, et serait favorable à l’enrichissement démesuré des patrons contre les ouvriers. En revanche, la gauche serait un mouvement politique qui promeut l’égalité de tous, quitte à imposer la redistribution de l’argent de tous patrons. Elle veut favoriser une forme de mondialisme pour qu’aucune culture ne s’impose plus qu’une autre où que ce soit. Et enfin, respecter davantage la planète contre le système actuellement en place.

Il est intéressant de noter que certains éléments des définitions données par les deux groupes ne se contredisent pas forcément. Cependant d’autres se contredisent. Quant à appliquer les définitions selon données par la « droite » ou celles de la « gauche » relève de l’impossibilité totale. Dans les deux cas, il est assez facile de prendre une personnalité quelconque du domaine politique et de la placer à la fois comme étant de droite ou de gauche, en sélectionnant judicieusement les éléments pour le définir.

La question devient donc : comment définir ce qu’est la gauche et la droite de façon à ce que nous puissions déterminer précisément le camp politique de n’importe quelle personnalité ?

Le problème de la définition

Avant de tenter de définir ces deux notions, notons que définir quelque chose correspond au « fait de déterminer les caractéristiques d’un concept, d’un mot, d’un objet, etc., ensemble des propriétés essentielles de quelque chose »4. En philosophie, nous disons que la chose EST.

Cependant, les définitions données ci-dessus sont construites sur l’observation des actions menées par les deux groupes politiques. Or l’action, c’est le « fait ou [la] faculté d’agir, de manifester sa volonté, en accomplissant quelque chose »5. Dans notre cas, de mettre en mouvement le système politique présent pour le faire changer dans une certaine direction. Or en philosophie, Saint-Thomas d’Aquin décrit : « être en mouvement, c’est tout ensemble Être et n’Être pas ». C’est en effet logique, car comment définir le mouvement autrement, sans être obligé de se fixer à des points de départs ou de fins dépassant de fait le cadre de cette notion.

Les éléments populairement utilisés pour donner sens aux notions de droite et de gauche n’ont donc aucune valeur pour définir le spectre politique, étant contraire à une définition fixée de ce qu’elles sont. En effet, il n’est pas possible de définir quelque chose sur son action pure, ce serait contraire au principe même de vérité.

Définition de la droite et de la gauche

Pour définir ce qu’est la droite et la gauche, partons d’un constat simple et évident sur lequel tout le monde sera d’accord : la droite s’oppose à la gauche. Si nous ne sommes déjà pas d’accord dessus, alors la notion de droite-gauche n’a déjà plus aucun sens.

Comment faire en sorte de dissocier la définition de chacun des deux courants politiques, de leurs actions purement politiques ? La réponse est simple : en les définissant sur leurs bases idéologiques, sur ce qui est à l’origine de leurs actions politiques. Ainsi, toute action politique sera inclus dans la définition même de ce que sont la droite et la gauche. Et toute tentative de récupération politique d’une action serait vaine de la part d’un des deux groupes. En effet, il est tout à fait concevable qu’une action politique puisse appartenir au deux bords « extrêmes » sans qu’elle appartienne aux groupes centraux. Cela n’en fait pas pour autant une action plus de gauche ou plus de droite, et peut très bien naître des deux groupes. Cependant, il est très probable que cette action commune n’aura pas la même base idéologique, et ne sortira pas d’une même volonté. D’où la pertinence de baser la définition sur les fondements philosophiques de chacun des groupes.

En conciliant ces deux constats, il est donc nécessaire de trouver les deux idéologies qui s’opposent le plus. Et en France, il paraît évident que les deux systèmes dont les principes philosophiques s’opposent en tout est le catholicisme d’un côté et le marxisme de l’autre.

Cette opposition se caractérise par un principe premier, qui influe tout le reste du courant philosophique : la vérité. D’un côté le marxisme rejette « tout ordre que l’homme n’a pas établi et dans lequel il n’est pas roi et Dieu tout ensemble »6. À l’opposé, le catholicisme accepte et cherche l’unique vérité qui est Dieu, et où l’homme est créature de Dieu.

Ainsi, le marxiste rejettera toute forme de vérité qu’il n’a pas lui-même construite, et toute forme de transcendance qui dépasserait l’homme. Dès lors, de manière cohérente, s’il venait à l’homme d’établir quelque chose comme vrai qui le dépasse, il faudra le détruire pour reconstruire autrement. Toujours en recherchant cette même cohérence, la définition des choses ne doit pas être fixée dans ce qu’elles sont, « et les mots eux-mêmes ne seront plus utilisés pour l’être qu’ils désignent, mais pour la force qu’ils dégagent. Une sorte de vertu incantatoire. Sens dynamique, non littéral. »7. C’est ici que naît cette notion de « Révolution permanente » développé par Marx. Ainsi, « rien n’existe pour elle que le processus ininterrompu du devenir et du transitoire »8, disait Engels. Et Bergson lui-même dira : « Il n’y a pas de choses, il n’y a que des actions »9. En fait, la définition des choses se fait par l’action, se passant ainsi de toute forme de vérité. De plus, pour éviter que l’action n’amène naturellement certains hommes à y déceler une forme de vérité, le marxisme entretient la contradiction de l’action. « D’où la formule de « philosophie de la contradiction » accolée parfois au marxisme »10 ajoutera Ousset.

À l’extrême opposé, nous avons le catholicisme, une religion qui, par nature même, est contemplative et transcendante. Nous cherchons la Vérité, et ce qui est établi comme vrai l’est pour l’éternité. Cette vérité peut être découverte par l’acte d’intelligence et de volonté de l’homme. La vérité n’est pas faite par l’homme, mais il peut la trouver : elle EST. Cependant, comme le monde terrestre n’est pas parfait, l’homme est amené à agir, non de cette même manière que le marxiste, mais d’une manière chrétienne, avec un but définit : la sainteté. Il reste de fait tout à fait possible que des changements soient apportés à la compréhension que nous avons de la vérité. Contrairement au marxiste, il ne s’agit pas d’une simple envi de changer la vérité, mais d’un apport fait à la compréhension que nous avons de la vérité. De même, le catholique cherchera une certaine cohérence dans ses actes, comme étant le témoin d’une vérité qui le dépasse, et qui le pousse à agir de la sorte.

Nous comprenons à présent pourquoi le marxisme et le catholicisme s’opposent en tout. Ils sont tous les deux sources des fondements philosophiques importants.

Nous pourrions donc très simplement définir la droite comme étant ce qui relève d’une idéologie catholique (sans toute fois être obligé d’être baptisé, mais en adhérant simplement à ces principes philosophiques). Et la gauche comme étant ce qui se construit sur le marxisme.

Cette fois-ci la définition éclaircie le champ politique actuelle, et permet de placer les personnalités dans un spectre politique clair, où il est possible de réfléchir de manière constructive. De cette manière, nous retrouvons une droite défendant des valeurs traditionnelles (la transmission d’une manière d’agir et de penser d’une génération à l’autre, liée par le principe de vérité). Et nous retrouvons la gauche favorisant un progrès et un égalitarisme dont on ne comprend par toujours le but (pour nous personnes de droite).

Notons qu’en plaçant ainsi la définition de gauche et de droite, une grande partie des personnalités gardent leurs places respectives populairement reconnues. Il est intéressant aussi de voir que le discours de Zemmour proclamant « je suis le seul homme de droite » prend ici tout son sens. Il était en effet le seul candidat à n’avoir fait presque aucun compromis dans son programme politique, ni dans ces discours médiatiques. Il est aussi le seul à s’attacher explicitement à ses valeurs et à la vérité (son meeting du Trocadéro était dédié à la défense de la Vérité). Enfin, Macron se retrouve à l’extrême gauche, la définition de la gauche n’étant ici pas attachée à un système économique en particulier). Il s’est en effet lui-même déclaré comme étant un « humaniste », réclamant toujours plus « d’humanisme » lors de son meeting à la présidentielle 2022. Or l’humanisme est un fondement du marxisme en tant que philosophie plaçant l’homme au centre et au-dessus de tout. Ainsi, le mot « humanisme » est moins connoté comme étant de gauche que « marxisme ». De plus, en se réclamant ainsi de ce courant de pensée, il entre dans le cadre restreint des « marxistes conscients » si cher à Marx. Marx considérait deux groupes de marxiste : ceux qui suivait le marxisme sans en avoir conscience, et ceux qui le suivaient de manière pleinement consciente et qui pouvait donc le promouvoir de manière totale. Macron entre ainsi dans cette seconde catégorie.

Définir la droite et la gauche n’a pas de sens

À présent, nous tenons une définition claire et convenable de ce que sont la droite et la gauche, sans avoir trop bouleversé le champ politique tel que perçu actuellement par la majorité.

Le problème : cette définition est fondée sur une réflexion de droite et ne peut convenir aux personnes de gauches. (Notons à partir d’ici que nous retiendrons la définition obtenue précédemment pour définir ce qu’est une personne de gauche ou une personne de droite). En effet, nous définissons ici les deux bords politiques dans une logique chrétienne de recherche de la vérité. Ce qui, de fait, est contraire à la pensée marxiste rejetant toute forme de vérité, et que nous définissons comme étant de gauche. Or le marxiste définit les choses dans leurs actions. Ainsi une personne de gauche ne pourra en aucun cas obtenir la même définition de ce que sont la droite et la gauche. Et inversement.

En fait, la manière même dont on choisit de définir ces deux notions contient l’idéologie même à laquelle nous adhérons.

Donc, la droite et la gauche ne pourront JAMAIS s’accorder sur ce qu’ils sont, car les fondements philosophiques mêmes et la manière même de penser sont divergentes par nature. La gauche ne pourra jamais accepter que temporairement cette définition qui vient d’être faite, et la droite ne pourra jamais accepter la définition venant de la gauche.

Le principe de droite et de gauche n’a ainsi jamais eu de sens, car personne ne pourra jamais s’accorder sur ce qu’ils sont.

Seul le débat d’idée compte et peut permettre d’apporter des solutions à notre monde ! Cette notion de « droite » et de « gauche » empêche toute émergence d’idées et tout débat constructif. Il est temps de dépasser ce cadre-là !

Définition d’extrême

Ajoutons que le mot « extrême » n’a plus de sens non plus dans sa manière d’être utilisé ces dernières décennies. Nous ne savons plus trop aujourd’hui si ce mot veut dire que la personne va au fond de ces idées ou s’il veut les imposer sans réflexion, par la force… Il s’agit peut-être d’un mélange des deux. Tentons de définir succinctement ce qu’est un mouvement extrémiste, sans pour autant devoir le fixer à des groupes dont les fondements idéologiques sont forts, permettant ainsi de définir quelqu’un du « centre » comme extrémiste. Pour cela, nous nous baserons sur les études psychologiques menées après la guerre, et vulgarisées par le groupe « Horizon Gull »11 à travers sa série « les autoritaires ».

Ces études ont montré que l’extrémisme dans le domaine politique relève de trois caractères12 : le conventionnalisme (fait de se conformer au groupe sans directive particulièrement explicite) ; l’agressivité autoritaire (fait d’imposer les lois par la force plutôt que le débat d’idée) ; et la soumission à l’autorité (fait pour le peuple de se soumettre sans remise en question aux directives non légitime de la hiérarchie). Nous remarquerons que ces trois caractéristiques relève du manque de débat constructif d’idée, rejetant aussi toute forme de différence par la force plutôt que par la confrontation d’idée réaliste et logique.

Conclusion

Pour éviter de tomber dans un régime extrémiste, nous pouvons voir qu’il est important de faire croître le débat d’idée de manière constructive et attentive.

La notion de droite-gauche a une tendance dangereuse de fermer le débat à ces deux seules notions, qui de fait ne sont pas définissables de manière consensuelle. De cette manière les individus ne sont jamais complètement libres d’écouter les personnalités dont les idées seraient du bord opposé. Ces deux notions sont donc un vrai parasite à la construction d’idée et à la formation de l’opinion.

La notion de « Sealioning »13 née en 2014 en est d’ailleurs un indicateur important. L’existence même de ce mot prouve que le débat d’idée est en train de perdre du terrain, et que le monde s’enfonce dans un totalitarisme profond, probablement inégalé dans l’histoire.

C’est aujourd’hui une urgence capitale que de reprendre de vraies discussions entre les personnes de différents spectres politiques, en acceptant de dépasser enfin la notion liberticide de gauche et de droite.

Xavier Lanne

3La définition gauche-droite m’a été personnellement donnée par un certain nombre de personnes de gauche. Cette définition n’a en rien été exagérée.

6La révolution, recherche historique, Monseigneur Gaume, 1877.

7Marxisme et Révolution, Jean Ousset.

8Discours d’Engels aux funérailles de Marx.

9L’évolution créatrise, Bergson, 1907.

10Marxisme et Révolution, Jean Ousset.

12Les autoritaires, partie 2 (1h02m09s) : https://www.youtube.com/watch?v=o2DEESuEOJk&t=3729

13« Consiste à importuner des gens par des demandes insistantes d’arguments ou bien des questions répétées, tout en maintenant une apparence de courtoisie et de sincérité », https://fr.wikipedia.org/wiki/Sealioning

https://www.breizh-info.com/2023/04/17/218681/politique-le-clivage-gauche-droite-a-t-il-un-sens/

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