Ce que le monde agricole est en train de vivre est inédit à plus d’un titre.
Tout d’abord, car il est empêché dans son quotidien et dans ses activités.
Ensuite, car il est désigné quasi systématiquement dès que sont évoquées les questions liées à l’environnement. Enfin, car il perd pied au plan international avec, notamment dans les filières fruitières, légumières, porcines, bovines, ovines, avicoles et bientôt sucrières, une hausse préoccupante des volumes importés et, ceci expliquant certainement cela, une chute exponentielle de sa compétitivité. En marge des événements grand public, comme le Salon de l’agriculture et toute la médiatisation qui lui est corrélée, le capital sympathie dont bénéficient (soit-disant) les paysans caracole aux alentours de 80 %. Seulement voilà, dès que les présentoirs sont rangés et que les animaux sont retournés à la ferme, c’est une autre musique qui prend le relais, avec une succession de dispositifs juridiques qui tendent à contraindre l’agriculteur, à juguler les pratiques et à déstabiliser le métier.
À l’origine de cet acharnement, l’écologie bien entendu, qui déambule avantageusement de plateaux de télévision en studios d’enregistrement, avec une cadence qui équivaut à un matraquage à plein temps, avec des images systématiquement à charge et des reportages anxiogènes destinés à convaincre ceux qui trouvent encore des circonstances atténuantes à ceux qui remplissent nos garde-manger.
De la séquence météo qui nous fait culpabiliser parce que nous n’avons peut-être pas bien refermé le robinet à cette émission diffusée, de surcroît sur des chaines du service public, qui nous explique comment l’agriculteur passe son temps à nous empoisonner, difficile de ne pas basculer dans le doute et la suspicion à l’égard de ces paysans qui ne sont peut-être pas si vertueux que ça.
Alors, de ces jeunes gens qui, dans un sursaut d’héroïsme, vont saccager les vilaines bassines à ces défenseurs de la cause animale qui “visitent” les étables où l’on assassine, en passant par les réseaux sociaux où la désinformation tutoie la violence du propos, l’opinion évolue vers une forme de détestation larvée, de méfiance inavouée.
Insidieuse, au fil des années, la fracture s’est démocratisée. La suspicion envers le paysan est, pour ainsi dire, passée dans le langage courant. Il n’est plus ce bouseux anachronique, chez qui l’on venait passer quelques jours de vacances en été et pour qui, en employant un air suffisant et un ton condescendant, l’on éprouvait quelque sympathie. Non, il est devenu cet individu dangereux dont il faut désormais se méfier car, à bien y regarder, il ne pense qu’au profit. Et voilà que d’indispensable, en quelques mois seulement, il est redevenu détestable
Ou comment l’image du paysan radin et retors refait surface à l’aune d’une époque où, il n’y a pas si longtemps et en plein confinement, chacun louait ses mérites et vérifiait qu’il ait bien pris soin de cultiver son champ. J’écrivais ici même voilà deux ans : de détestable il est devenu indispensable. Et voilà que d’indispensable, en quelques mois seulement, il est redevenu détestable.
Alors, bien sûr, demeurent les grandes intentions. Le “Farm to fork” (de la ferme à la fourchette) européen, même s’il est toujours d’actualité est, pour l’instant, mis de côté. Et les “Grands débats” qui n’ont servi à rien sont soigneusement rangés sur ces étagères en attendant que d’autres marchands de raisonnements viennent les dépoussiérer. Pendant ce temps, l’agriculture française décline et des pans entiers de son activité sont en train de s’effondrer. Ce n’est pas un constat qu’il faut considérer à la légère, car il en va, bien sûr, de notre autonomie alimentaire, mais également de notre cohésion sociale.
Le jeu dangereux auquel se livrent les écologistes est en train d’exacerber les tensions au sein d’une société qui considère l’agriculteur comme étant un rentier et souhaite le déposséder de son outil de travail, de la terre sur laquelle il est installé et, en l’occurrence, de l’eau dont il se sert pour irriguer.
C’est ce discours qui est bien souvent usité par ceux qui prônent “le partage des biens communs”. Séduisant, il peut l’être pour ceux qui confondent usurpation et propriété, labeur et oisiveté. Risqué, il l’est également, car l’activisme de ceux qui dénoncent le productivisme est perméable à toutes les idéologies. En voulant façonner une société mêlant pelle mêle écologie, wokisme, véganisme et autre antispécisme, ceux qui cosignent des tribunes à l’avenant parce qu’ils revendiquent un statut scientifique, intellectuel ou artistique seront-ils aussi nombreux le jour où il faudra se demander qui sont les responsables du déclin agricole et de notre totale dépendance aux productions importées ?
Pas si sûr. Ce jour-là, le jour où après la fracture nous devrons acquitter la facture, nous serons bien obligés de constater que les effets de mode sont souvent très chers payés.
De la séquence météo qui nous fait culpabiliser parce que nous n’avons peut-être pas bien refermé le robinet à cette émission diffusée, de surcroît sur des chaines du service public, qui nous explique comment l’agriculteur passe son temps à nous empoisonner, difficile de ne pas basculer dans le doute et la suspicion à l’égard de ces paysans qui ne sont peut-être pas si vertueux que ça.
Alors, de ces jeunes gens qui, dans un sursaut d’héroïsme, vont saccager les vilaines bassines à ces défenseurs de la cause animale qui “visitent” les étables où l’on assassine, en passant par les réseaux sociaux où la désinformation tutoie la violence du propos, l’opinion évolue vers une forme de détestation larvée, de méfiance inavouée.
Insidieuse, au fil des années, la fracture s’est démocratisée. La suspicion envers le paysan est, pour ainsi dire, passée dans le langage courant. Il n’est plus ce bouseux anachronique, chez qui l’on venait passer quelques jours de vacances en été et pour qui, en employant un air suffisant et un ton condescendant, l’on éprouvait quelque sympathie. Non, il est devenu cet individu dangereux dont il faut désormais se méfier car, à bien y regarder, il ne pense qu’au profit. Et voilà que d’indispensable, en quelques mois seulement, il est redevenu détestable
Ou comment l’image du paysan radin et retors refait surface à l’aune d’une époque où, il n’y a pas si longtemps et en plein confinement, chacun louait ses mérites et vérifiait qu’il ait bien pris soin de cultiver son champ. J’écrivais ici même voilà deux ans : de détestable il est devenu indispensable. Et voilà que d’indispensable, en quelques mois seulement, il est redevenu détestable.
Alors, bien sûr, demeurent les grandes intentions. Le “Farm to fork” (de la ferme à la fourchette) européen, même s’il est toujours d’actualité est, pour l’instant, mis de côté. Et les “Grands débats” qui n’ont servi à rien sont soigneusement rangés sur ces étagères en attendant que d’autres marchands de raisonnements viennent les dépoussiérer. Pendant ce temps, l’agriculture française décline et des pans entiers de son activité sont en train de s’effondrer. Ce n’est pas un constat qu’il faut considérer à la légère, car il en va, bien sûr, de notre autonomie alimentaire, mais également de notre cohésion sociale.
Le jeu dangereux auquel se livrent les écologistes est en train d’exacerber les tensions au sein d’une société qui considère l’agriculteur comme étant un rentier et souhaite le déposséder de son outil de travail, de la terre sur laquelle il est installé et, en l’occurrence, de l’eau dont il se sert pour irriguer.
C’est ce discours qui est bien souvent usité par ceux qui prônent “le partage des biens communs”. Séduisant, il peut l’être pour ceux qui confondent usurpation et propriété, labeur et oisiveté. Risqué, il l’est également, car l’activisme de ceux qui dénoncent le productivisme est perméable à toutes les idéologies. En voulant façonner une société mêlant pelle mêle écologie, wokisme, véganisme et autre antispécisme, ceux qui cosignent des tribunes à l’avenant parce qu’ils revendiquent un statut scientifique, intellectuel ou artistique seront-ils aussi nombreux le jour où il faudra se demander qui sont les responsables du déclin agricole et de notre totale dépendance aux productions importées ?
Pas si sûr. Ce jour-là, le jour où après la fracture nous devrons acquitter la facture, nous serons bien obligés de constater que les effets de mode sont souvent très chers payés.