Ironie, puisque Frank Allisio est lui-même un ex-LR (qu'il a quitté en 2015) et que le RPR, fondé par Jacques Chirac en 1976, a été fondu dans l'UMP par Alain Juppé en 2002. Quant à la marque, le RN avait pris soin de la racheter il y a un an. De quoi remuer le couteau dans la plaie béante des trahisons des LR, même pas fichus de préserver l'écrin...
Mais c'est aussi une révolution stratégique du côté du RN : tout en refusant l'union des droites chère à Éric Zemmour, Marine Le Pen et Jordan Bardella, qui soutiennent l'opération selon Allisio, sont bien conscients que la conquête du pouvoir, à tous les échelons, et notamment dans le sud-est, passe par une alliance, une ouverture vers l'électorat LR. Le RPR, cela devrait parler à ces électeurs d'un certain âge. Certes, il y avait déjà eu le Rassemblement Bleu Marine, puis le Rassemblement national, mais offrir une structure baptisée RPR marque un pas de plus. Le lancer au niveau local, dans la perspective des prochaines municipales, est plutôt bien vu. En tout cas, les choses bougent à droite, et c'est très bien. L'activisme d'un Éric zemmour est finalement un excellent stimulant.
Est-ce pour autant, pour le RN, un renoncement à la stratégie bloc populaire contre bloc élitaire, encore promue ces jours-ci par son théoricien Jérôme Sainte-Marie, dans un entretien à Livre noir, au profit d'un retour au clivage droite-gauche ? Pas vraiment, puisque la marque RPR représente justement un dépassement populaire du clivage, et Franck Allisio tient à souligner la dimension sociale de l'entreprise : « On ne revendique pas l'union des droites dans sa version idéologique comme certains, mais la défense de valeurs communes que sont le patriotisme, l'autorité et la méritocratie. On revient aux sources de cette droite populaire, un parti patriote, populaire et de masse, avec une fibre sociale. »
Plus subtilement, cette initiative locale montre que le RN peut avancer sur deux jambes stratégiques : celle des blocs et celle des droites. Certainement un « en même temps » prometteur. En tout cas, le RPR est une nouveau jalon sur le chemin de l'alternance.
Et il n'est qu'à entendre les cris qu'a suscités l'initiative de Franck Allisio chez ses adversaires pour en mesurer déjà la portée.
Éric Ciotti a opposé, dans un tweet, LR parti « de gouvernement » au RN « parti de slogan », ce qui est tout de même assez drôle, vu la situation actuelle de LR.