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Productivité, déficit commercial, dette… La France au bord du gouffre

Productivité, déficit commercial, dette… La France au bord du gouffre

Chute de la productivité, creusement du déficit du commerce extérieur, accroissement considérable de la dette publique… l’économie française a plongé de 1998 à 2018. Après un passionnant dossier sur la macro-économie française publié en août 2022, André-Victor Robert, conseiller statistique de Polémia, étudie de manière factuelle et rigoureuse l’accentuation du plongeon dans un nouveau dossier. Une étude qui paraît d’une particulière actualité alors que le coût de la reconstruction dans les quartiers de l’immigration après les émeutes s’annonce faramineux…
Nos lecteurs trouveront ci-dessous les principales conclusions de l’étude résumées et un lien vers le PDF du dossier dans son intégralité.
Polémia

Résumé

Faisant suite à un précédent dossier publié sur Polémia au sujet des questions macro- économiques, le présent dossier traite plus particulièrement de la chute de la productivité, du creusement du déficit du commerce extérieur et de l’accroissement considérable de la dette publique. La productivité d’un pays est intéressante et importante à analyser, car elle constitue à moyen et long terme le principal déterminant de l’évolution du niveau de vie de la population de ce pays. Dans un système de changes fixes comme c’est le cas pour la France au sein de la zone euro, la productivité détermine aussi très largement la compétitivité des entreprises françaises vis-à-vis de leurs concurrents étrangers, et donc la capacité de notre pays à se procurer les biens qu’il ne produit pas et qui lui sont nécessaires sans pour autant devoir s’endetter vis-à-vis du reste du monde.

Dans le précédent dossier, nous avions évoqué la faible croissance de la productivité en France de 1999 à 2018, significativement inférieure à celle de nos voisins – si l’on fait exception de l’Italie et de l’Espagne. Les nouvelles récentes en la matière sont encore plus mauvaises. À fin 2022, la productivité par tête (rapport entre le PIB et le nombre de personnes ayant un emploi) est inférieure de 2,9 % à son niveau du 4e trimestre 2019 (dernier trimestre complet avant la crise sanitaire), et la productivité par heure travaillée inférieure de 2,2 % à son niveau de fin 2019. Parmi nos voisins d’Europe occidentale, la France est le seul pays où la productivité horaire est en baisse entre fin 2019 et fin 2022. Seuls quatre autres pays connaissent aussi une baisse de la productivité par tête, mais de manière sensiblement moins marquée qu’en France. L’ampleur du choc de productivité (et de PIB) au moment du déclenchement de la crise sanitaire a été inégale selon les pays. Les pays qui ont confiné de manière très stricte leur population (Italie, Espagne, Royaume-Uni, et… France) ont bien sûr connu au 1er semestre 2020 une chute considérable de leur productivité et de leur PIB, quand les pays scandinaves (en particulier la Suède qui n’a à aucun moment confiné sa population) étaient largement épargnés. Ensuite, en France le rebond de la productivité a été partiel, tandis que dans les autres pays la productivité a pleinement rebondi (après tout de même un certain délai dans le cas des Pays-Bas et de l’Autriche).

Reflet de l’érosion de la compétitivité de nos entreprises sous l’effet des faibles gains de productivité, notre commerce extérieur est systématiquement en déficit depuis 1999. Le solde s’est considérablement dégradé depuis la mi-2021 sous l’effet de la hausse des prix de l’énergie et des matières premières, le déficit atteint maintenant 160 Md€ sur les douze derniers mois – ce qui représente pas moins de 7 % du PIB. Le creusement du déficit de notre commerce extérieur a évidemment pour contrepartie un endettement accru de la France (état, entreprises, ménages) vis-à-vis du reste du monde, puisqu’il faut bien financer ce déficit. Fin 2022, la dette publique française se situe à 112 % du PIB ; elle était à 97,4 % juste avant la crise sanitaire. La dette publique en France, rapportée au PIB, se situe ainsi fin 2022 à peu près au même niveau qu’en Espagne, au Portugal et en Belgique, mais reste en deçà de ce qui est observé en Italie (144 %) et en Grèce (171 %, la dette publique grecque a stagné autour de 180 % de 2013 à 2019 avant de culminer à 206 % en 2020). A contrario, la dette publique est bien moindre en Allemagne (66 % du PIB), aux Pays-Bas (51 %) et dans les pays scandinaves.

La variation de la dette publique entre fin 2019 et fin 2022 est très étroitement corrélée aux politiques menées pour combattre l’épidémie de Covid : les pays qui ont confiné leur population pendant de longues semaines, comme la France, l’Italie et l’Espagne, ont ce faisant désorganisé très largement leur production et ont dû consentir à des transferts financiers massifs en direction des entreprises (pour éviter les faillites) et des ménages (pour amortir le choc sur leur revenu). La dette publique s’est ainsi accrue de 14 points de PIB en France, de 15 points en Espagne, et de 10 points en Italie. À l’opposé, la Suède, qui n’a à aucun moment confiné sa population, et la Norvège et le Danemark, qui ont opté pour une gestion souple de l’épidémie, enregistrent non pas une hausse, mais une baisse de leur dette publique mesurée en pourcentage du PIB. L’Allemagne et l’Autriche, qui ont confiné, mais moins longtemps et moins drastiquement que la France, enregistrent une hausse de leur dette publique d’une ampleur intermédiaire.

La croissance de la dette publique française est préoccupante à plusieurs titres. D’abord parce que plus de la moitié de cette dette est détenue par des non-résidents. Ensuite parce que par le passé, ce n’est guère qu’au sortir des deux guerres mondiales et pendant la crise des années trente que l’endettement public avait atteint de tels niveaux. Enfin parce que l’endettement des entreprises et celui des ménages en France atteignent des niveaux inédits et supérieurs à ceux observés chez la plupart de nos voisins. En 2000 l’endettement des ménages et entreprises non financières représentait 83 % du PIB en France, en 2022 c’est 147 %. Dans le même temps, ce ratio en Allemagne est passé de 120 % à 107 %, en Espagne de 92 à 120 %, et en Italie de 71 à 110 %.

Au cours des 20 dernières années, le solde budgétaire de la France hormis les charges d’intérêt (ce qu’on appelle le solde « primaire » des finances publiques) a quasi systématiquement été moins fortement positif ou – selon les années – plus fortement négatif que celui de nos voisins, ce qui atteste d’une gestion laxiste de la dépense publique par les gouvernements successifs, compte tenu du niveau élevé des prélèvements obligatoires dans notre pays comparativement à nos voisins. Avec une dette publique élevée et une incapacité chronique à maîtriser ses dépenses publiques, la France est à la merci d’une remontée des taux d’intérêt, qui l’exposerait à un risque de défaut sur sa dette souveraine. Compte tenu du drame que représente toujours une crise de la dette souveraine, il serait judicieux de se décider enfin à faire tout ce qu’il est encore possible et nécessaire de faire pour éviter de se retrouver en situation d’insolvabilité. Cela passe par une réduction graduelle du déficit public, en faisant en sorte que l’argent public soit bien dépensé et en mettant à profit les années de bonne conjoncture pour se désendetter.

Table des matières

I – La productivité en chute libre…………………………………………………………………………………. 3
II – Déficit commercial et dette publique……………………………………………………………………….. 7
III – La France à la merci d’une remontée des taux d’intérêt………………………………………….. 11

Le dossier au format PDF

La France au bord du gouffre

André-Victor Robert 05/07/2023

https://www.polemia.com/productivite-deficit-commercial-dette-la-france-au-bord-du-gouffre/

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