La part d’ombre.
Nous sommes en mai 1991. Dans l’ancien quotidien belge Le Peuple, l’ex-inspecteur des RG français (Renseignements Généraux) Jean-Marc Dufourg est interviewé :
«Question: Vous confirmez qu’il est de notoriété publique dans les «services» que l’industriel F.D., le conseiller occulte P.B. faisaient et font encore usage de ces réseaux pédophiles en compagnie de Ministres?
Réponse: Oui, mais ceux-ci sont hyper protégés pour des raisons claniques par le Pouvoir. Leurs noms n’apparaissent pas. »
Interrogé à propos de l’affaire Joseph Doucé, ce pasteur homosexuel militant pro-pédophile retrouvé mort assassiné en forêt de Rambouillet en octobre 1990 (l’enquête sur sa mort ne donnera rien, bien entendu), Dufourg répondra : « Je ne sais pas qui en est responsable. Ce qui est sûr, c’est qu’il y avait bien un réseau pédophile. Des photos existent avec l’accord des «acteurs» […].Naturellement , les clichés étaient à usage interne».
A la même époque, dans l’émission télévisée de Christophe Dechavanne Ciel mon Mardi! Dufourg ira plus loin:« Ce sont des proches de l’Elysée qui ont éliminé le Pasteur Doucé». L’accusation est grave, mais aucun nom n’est, bien entendu, donné.
Mais dans L’Humanité du 3/5/91, Dufourg, qui en a décidément gros sur la patate (on verra pourquoi) précise sa pensée: il y avait un homme important du pouvoir, «ni Ministre, ni élu», qui possédait un coffre-fort dans lequel se trouvaient des photos prouvant qu’il entretenait des relations sexuelles avec des enfants bien réels. Ces documents compromettants (à «usage interne»?) disparaissent malencontreusement du coffre et l’homme en question est alors objet d’un chantage: on les lui restituera contre une forte somme d’argent.
Dufourg revient du coup sur l’affaire de l’assassinat de Doucé. Sa certitude est que la mission officielle confiée à lui et à son équipe (surveillance des faits et gestes de Doucé) n’était qu’une couverture. Pendant que lui et ses collègues montaient une manipulation pas très protestante pour coincer notre Pasteur en flagrant délit de relations sexuelles avec un mineur, une autre équipe (des RG?) travaillait en parallèle (mais officieusement) avec un objectif bien différent: mettre fin, d’une façon ou d’une autre, au chantage subi par un haut personnage du pouvoir auquel pouvait être mêlé le Pasteur Doucé ( haut personnage qui n’était autre que P.B., déjà initialement cité plus haut). Dufourg comprend alors pourquoi on se donne tant de mal concernant ce petit Pasteur…
Auteur d’une enquête fouillée sur la mort de Joseph Doucé (Mort d’un Pasteur, Fayard 1994), le journaliste Bernard Violet est interviewé par Rémi Darne dans L’Humanité du 18 mai 1994. Violet y évoque les pressions qui se sont exercées sur lui pour le dissuader de mettre le nez dans une affaire où il est question de réseaux pédophiles et d’hommes de pouvoir. Et notamment un homme fréquentant les plus hauts personnages de l’Etat qui se trouvait empêtré au milieu d’une «gigantesque affaire de trafic de photos pédophiles et de chantage». «C’est le Capitaine Paul Barril qui m’a prévenu que mon enquête dérangeait beaucoup le «Château» (L’Elysée), et que ma ligne téléphonique était sur écoutes» (On faisait ça à l’époque, mais maintenant c’est fini: juré). Bernard Violet raconte que Doucé avait fait la connaissance en 1987 de Michel Caignet, militant néo-nazi notoire, et notoire pédophile:
«Il est exact qu’en 1989 la Brigade des mineurs mit à jour un vaste trafic de photos d’enfants dans lesquelles on retrouve le néo-nazi Caignet, de même qu’un prêtre, Nicolas Glencross. L’inspecteur Dufourg apprend, par Caignet, qu’une personnalité proche du pouvoir socialiste serait plus ou moins impliquée dans une énorme affaire de pédophilie […]. Une des hypothèses est que l’on a voulu faire taire le Pasteur Doucé pour que l’affaire ne soit pas rendue publique. On a donc réduit Doucé au silence tout en s’arrangeant pour faire porter le chapeau à Dufourg».
En effet, ce dernier se verra condamné, passera par la case prison, puis viré de la Police, tandis que ses chefs, pourtant au courant de tout, seront blanchis (d’où le mécontentement de Dufourg, évidemment, qui sera finalement, quand l’affaire se tassera, définitivement dédouané à son tour).
Un homme d’affaires bien entouré.
Paul Barril, justement, cet ex-gendarme du GIGN devenu barbouze à la DGSE (Direction Générale de la Sécurité Extérieure), et spécialiste comme pas mal de ses petits camarades, de tous les coups tordus imaginables, en France comme en Afrique. Paul Barril, ancien responsable de la cellule anti-terroriste de l’Elysée créée par Mitterand, sait forcément plein de choses et aime bien causer. Alors, avec lui, on en prend et on en laisse. Mais comme il faut bien essayer de sortir l’œuf de l’omelette, laissons-le parler. Voilà donc ce que raconte Paul Barril (Les Archives Secrètes de François Mitterand, Albin Michel 2001):
Dans les années 90, aux réunions d’Ensemble Contre le Sida, un ancien chef de section des services spéciaux accompagne un certain Pierre Bergé.
C’est Jean-Louis Faure, ancien comme Barril de la DGSE et devenu Directeur de la sécurité de la Société Yves-Saint-Laurent vers les années 86/88, après une quinzaine d’années passées dans les Services Secrets de l’Etat (après YSL, il rejoindra Sanofi, puis Thalès en Arabie Saoudite et en Lybie, toujours dans le domaine de la sécurité). Selon Barril, Pierre Bergé aurait chargé Jean-Louis Faure, aidé en cela de Pierre -Yves Gilleron (ex-commissaire de la DST-Direction de la Surveillance du Territoire de 1978 à 1987- reconverti lui aussi dans le privé, et associé de Barril qui avait créé avec lui en 1983 la société de surveillance bien nommée Secrets) de récupérer des photos (tiens?) volées dans un de ses coffres. Sur ces photos, apparaîtrait, outre des tas de gens, un certain curé d’une petite paroisse de la Nièvre, Nicolas Glencross. Ce même curé, ami d’Hubert Védrine qui, pour pouvoir se présenter aux élections municipales, se fit domicilier chez lui. Hubert Védrine, grand diplomate, Ministre des affaires étrangères du Gouvernement Jospin de 1997 à 2002. Que vient-il faire dans cette galère mal fréquentée? Pierre-Yves Gilleron s’installera en janvier 93 à Brazaville pour devenir conseiller en sécurité du Président Pascal Lissouba. Il faut dire aussi que Barril en voulait à l’époque à Gilleron, surnommé le «p’tit blond», qui avait fondé une société concurrente (IRIS) et piétinait tranquillement le territoire de Barril.
Quoi qu’il en soit, pourquoi Pierre Bergé ressentait-il le besoin de s’entourer de tels experts? On peut concevoir la nécessité de protéger de grandes entreprises de l’espionnage industriel. Mais on peut penser aussi à la protection de la vie privée (et secrète) de leurs dirigeants.
Dans son livre ( Section Manipulation, de l’Antiterrorisme à l’affaire Doucé, Michel Lafon 1991), l’ex-flic Jean-Marc Dufourg, qui en sait beaucoup plus qu’il n’en dit, résumera, avec beaucoup de prudence et au conditionnel:
«La presse avait dévoilé que Doucé possédait des fichiers précis sur tous les membres, même occasionnels, de son association. De là à imaginer qu’il aurait pu organiser des parties chaudes et exercer un chantage sur quelques personnalités, il n’y avait qu’un pas. Mais,[…] à trop pêcher le gros poisson, on finit par tomber sur un requin […]. On alla même jusqu’à nommer un personnage proche de l’Élysée, aux mœurs particulières, et qui collectionnait des photos très spéciales (…). Ces photos auraient disparu. Le personnage aurait fait alors l’objet d’un chantage (…). Mais le personnage risquait d’avoir réagi. N’avait-il pas parlé de ce chantage à quelqu’un? Avait-on cherché, avec lui, le moyen de récupérer ces photos, voire d’éliminer le maître-chanteur imprudent? Un pédophile, familier des princes… Le peuple ne comprendrait pas. Étouffons le scandale. Et malheur à celui par qui le scandale arrive».
P.B. pourrait-il donc être (si l’on comprend bien) l’éminent et intouchable Pierre Bergé, citoyen bien connu et au-dessus de tout soupçon? Seules les mauvais esprits peuvent imaginer de telles choses. Ce Pierre Bergé dont l’ancien chauffeur Fabrice Thomas disait dans un livre récent et au contenu peut-être discutable (Saint-Laurent et moi: une Histoire intime, Hugo doc, 2017):
«Dominique Strauss-Kahn et Harvey Weinstein, à côté de Pierre Bergé, ce sont des enfants de choeur (…). En France, dès qu’on parle de Pierre Bergé, on a toute une cavalerie d’avocats sur le dos… il a beaucoup de pouvoir» (Ce qui, pour le coup, est exact).
Bon, après tout, si dans le panier une pomme est pourrie, il suffit de l’en ôter. Comme s’interrogeait, à propos d’une autre affaire Marc Toussaint, ancien gendarme belge (auteur avec Xavier Rossey de Tous Manipulés, Bernard Gilson Editeur 2010): «Une compromission de hautes personnalités? On sait que si une personnalité tombe, elle est remplacée». Il ajoutait toutefois: «Par contre, si c’est tout un système qui évolue de manière illégale et au mépris de la sécurité du citoyen, alors là, c’est plus grave».
Dans VSD du 27/3/13, voilà ce que l’on trouve sous le titre: Pédophilie à Marrakech, l’enquête impossible. Certes, VSD reste un journal «people». Ce n’est pas une raison pour ne pas y regarder, un peu comme on le fait quand on attend son tour chez le médecin ou le dentiste:
«En 2011, dit le journal, l’ancien Ministre Luc Ferry accusait sans le nommer un ex-Ministre français de s’être livré à la pédophilie au Maroc. Depuis, l’enquête a été diligentée et classée sans suite». VSD poursuit: «18 mois d’enquête par la brigade des mineurs de Paris, avec une vingtaine de témoins auditionnés, dont un ancien Ministre, des diplomates de haut rang, des responsables policiers, plusieurs journalistes, et même un ecclésiastique […]. Un ancien Ministre aurait été surpris par des policiers à Marrakech lors d’une descente nocturne dans une villa de la Palmeraie où une fête spéciale bat son plein […]. Un journaliste de France Télévision témoignera aussi qu’il se trouvait en permanence à cette époque un soir à sa rédaction. Qu’il avait vu passer une dépêche de l’AFP annonçant la présence de Jack Lang dans un commissariat de Marrakech, suite à son arrestation dans un riad [une villa], avec de jeunes mineurs de 15 ans».
«Problème, dit VSD, cette dépêche aurait rapidement disparu des écrans et les policiers n’ont pu en retrouver la trace nulle part. Et ce, après des recherches auprès de trois agences de presse internationales installées au Maroc, dont l’AFP».
Jack Lang lui-même, ancien Ministre, fut interrogé par les policiers : il n’était au courant d’absolument rien, et ne connaissait pas le nom de ce « Ministre », connu pourtant par tout le monde politique.
Mais au milieu de tous ces témoignages, celui d’un prêtre d’une paroisse du sud de la France, et en vacances au Maroc: il avait reçu des «confidences indiquant qu’au cours de séjour de Français connus […] des événements festifs avaient été organisés dans lesquels des mineurs se seraient livrés à la prostitution». Le prêtre fait état de «prostitution de mineurs à la Villa Marjorelle (luxueuse propriété bien connue de Pierre Bergé), où Jack Lang était régulièrement invité». Interrogé par VSD, le prêtre ajoute: «Dans la médina, des parents de jeunes victimes se sont confiés à moi. Mais, compte tenu du fossé culturel, ils ne s’adresseront jamais aux Institutions [Ah bon?]». Quoi qu’il en soit, faute de témoignages directs, les policiers se trouvèrent donc dans une impasse.
Voilà donc la chose, parmi bien d’autres.
Vie publique et vie privée; risques politiques. On ne peut donc plus s’étonner de la présence récurrente des RG et des services secrets dans ce genre d’affaires de mœurs. Le scandale potentiel autour de la découverte, venant de personnalités connues, d’actes délictueux de nature pédocriminelle, peut devenir un utile moyen de pression s’il est tu, mais risque aussi, s’il est su, de dangereusement déstabiliser le Pouvoir en place et, partant, les Institutions elles-mêmes dont ils sont les représentants. L’édifice tout entier menace alors de trembler sur ses bases, comme ce sera le cas en Belgique autour de l’affaire Dutroux.
Et c’est aussi pour cela que l’on mit soigneusement le boisseau sur les ressorts de l’affaire d’Outreau: ce n’était pas pour protéger des pères incestueux ou des pédophiles de bas-étage, mais pour une raison supérieure qui menaçait, si l’on n’y prenait garde, de faire beaucoup de dégâts politiques.
L’argument avancé sera toujours le même. A défaut de comprendre totalement les tenants et les aboutissants de ces sombres histoires, on saisira toutefois les mécanismes et les méthodes mises en jeu, voire la rhétorique développée. C’est notamment en brandissant le danger politique extrémiste en cas de révélation d’un scandale d’Etat (sous la forme fantasmée d’une sorte de coup d’État possible venant d’une extrême droite à l’affût), qu’on parvint à calmer la colère des Belges. In fine, le levier de la peur reste toujours le plus efficace.
Dans l’affaire présente, qui se situe chronologiquement bien avant, pour justifier le silence absolu, on utilisa la crainte du chaos, d’émeutes populaires, voire de menaces de guerre civile. L’avocat Jacques Vergès, défenseur de Dufourg, et qui est tout sauf un idiot, le dira dans sa préface du livre de Dufourg:
«Le Pasteur Doucé […] a réussi à tisser en France un réseau de relations haut placées, d’où sa force et sa vulnérabilité. Quelqu’un avait intérêt à le faire taire […]. On comprend qu’une enquête [sur les causes de sa mort, si elle avait aboutie] pouvait avoir un effet déstabilisateur pour la «démocratie» […]. Pour éviter ce danger «fasciste», il suffisait que Dufourg endossât la responsabilité d’un crime auquel il était parfaitement étranger. On s’arrangerait pour que cela apparaisse comme une bavure policière».
Ainsi, puisque rien ne se perd et que tout se transforme, ces sordides affaires se montreront-elles beaucoup plus utiles maintenues cachées que révélées au grand jour. Cachées, elles permettront donc d’étouffer un scandale dangereux pour la stabilité des Institutions lorsqu’un personnage de haut niveau est impliqué. Il faudra protéger celui-ci d’autant plus qu’il peut, de son côté, détenir un certain nombre de renseignements gênants. Car ces affaires permettront aussi de constituer les pièces de dossiers sur la personne compromise, mûre alors pour plus facilement céder aux pressions en tous genres: elle sera «tenue».
Il n’en reste pas moins que, pendant des lustres, Bergé sera suivi par tout un troupeau de moutons bêlant:« Des preuves de ce que vous avancez, il n’y en a pas!» Et du vivant de Pierre Bergé, bon courage à qui s’attaque à lui. Ou encore:« Il a tellement fait pour l’Art Contemporain!». Admirateurs aveuglés par l’image lumineuse du Grand Homme? Certes, il a bien dit parfois quelques petites sottises, comme: «Si une bombe explose sur les Champs à cause de la manif pour tous, c’est pas moi qui vais pleurer». Oui, mais n’était-ce pas plutôt, de la part de quelqu’un qui parle à l’oreille des Rois, l’expression un peu vigoureuse de fortes convictions humanistes?
Bref, le masque se retourne parfois et livre, entre Ombre et Lumière, la personnalité moins visible du contre-masque.
Malgré tout, Pierre Bergé, qui est maintenant au Ciel (ou ailleurs) avec David Hamilton , Jeffrey Epstein et les autres, ne s’en sort pas trop mal, car l’image, pour le moment, est sauve.
Vie publique et vie privée
Autre chose, car nous avons là un intéressant paradoxe: des personnages qui sont devenus des personnalités en raison de leurs actions publiques et de leur extrême présence et visibilité médiatique; qui usent et abusent de tous les moyens disponibles pour peaufiner, voire construire leur image. Mais qui, tout en même temps, tiennent à jalousement préserver leur «vie privée» et sont prêts, pour ce faire, à utiliser tous les moyens, y compris les services d’anciens flics rompus à toutes les techniques du renseignement et de l’intimidation. On peut alors se demander si un tel rempart élevé autour de leurs agissements privés n’est pas, en soi, suspect: y a-t-il donc tant de choses à cacher? Protection légitime de la vie privée ne signifie pas impunité (illégitime) devant des crimes.
Sauver les apparences (L’art du masque)
Au lendemain de son décès, commença le concert habituel des dithyrambes. «Autodidacte surdoué, titrait l’Obs du 8/9/17, amoureux des arts et des Lettres, Pierre Bergé fut aussi tout au long de sa vie un homme de causes et d’engagements». Sous la plume frémissant de Jean Daniel: «Ce qu’il y avait d’exceptionnel chez Pierre Bergé. La fidélité était pour lui une façon d’être, une élégance, un art de vivre, car fidèle, Bergé l’était autant à ses passions qu’à ses emportements […]. Il méprisait les grandes trahisons comme les petits reniements». (L’Obs du même jour). Comme tout cela est gentiment dit. François Hollande emboîtera le pas: «Une personnalité exceptionnelle». Jack Lang: «Un ami merveilleux. Un fabuleux mécène, philanthrope, esthète insatiable, génial entrepreneur, homme de culture et de toutes les passions». Même Jean-Luc Mélenchon: «Un homme simple [qui] n’a pas voué sa vie à l’argent qu’il possédait, [qui] a contribué au patrimoine moral de l’insoumission». Rien de moins. Et le Président Macron, qui salue «un passeur sans égal […], un homme occupé de faire naître partout où cela était possible la beauté et l’excellence.[Dont] le génie fut de savoir composer ensemble les époques, les formes, les caractères, les talents pour construire autour de lui un monde qui lui ressemble et où il nous invitait avec une totale générosité». Ouf!
Il restera, en effet, comme l’homme d’affaire envié et ambitieux, le multimillionnaire généreux, le collectionneur d’Art, proche du pouvoir politique et des médias, ami de François Mitterrand, de son neveu Frédéric, copain de Nicolas Sarkozy, d’anciens Ministres comme Jack Lang, de philosophes comme Bernard-Henri Lévy, d’Alain Minc; d’hommes d’affaire comme l’industriel Xaviel Niel et le banquier Matthieu Pigasse; compagnon d’Yves Saint-Laurent et patron de la maison de haute couture du même nom, ancien président de la Chambre syndicale des couturiers et créateurs de mode, financier du PS, de la Fondation Danielle Mitterand; protecteur-mécène des Arts et des Lettres (nommé Grand Mécène des Arts et des Lettres en 2001), créateur et Président du Sidaction, décoré en veux-tu en voilà, notamment en 2016 par le roi du Maroc; défenseur acharné de toutes le bonnes causes, parrain d’SOS-Racisme; Directeur et propriétaire du théâtre de l’Athéné-Louis Jouvet de 1977 à 1982; Président un temps de l’Opéra-Bastille et du Musée Alfred-Dreyfus établi dans la maison d’Emile Zola; préside le Cercle des Amis du Ring (créé à l’occasion de la présentation du cycle wagnérien à l’Opéra National de Paris en 2010); collectionneur émérite, fondateur dans les années 80 du magazine Globe et de Courrier International; «ambassadeur de bonne volonté de l’UNESCO», actionnaire de poids dans différents organes de Presse: participation majoritaire en 2010 dans le Groupe La Vie-Le Monde (Le Monde, Télérama, etc.). Puis, Président du même conseil de surveillance du quotidien vespéral; ancien Président des Amis de l’Institut François-Mitterand (en compagnie de Jack Lang, Laurent Fabius, Pierre Joxe, Julien Dray, etc.), remplacé depuis 2013 par Hubert Védrine… Initiateur, bien sûr de la Fondation Yves Saint-Laurent-Pierre Bergé, qui devint, en 2005, le contraire: Fondation Pierre Bergé-Yves Saint-Laurent.
Pierre Bergé est donc mort et n’a pas réussi à devenir Immortel. En effet, son seul échec fut de ne pas occuper un fauteuil à l’Académie Française. Pourtant, pour ceux qui se sont risqué à lire ses écrits, il avait à peu près autant de talent littéraire que Valéry Giscard d’Estaing, Jean d’Ormesson ou Alain Finkielkraut.
Dans tout cet imbroglio digne du théâtre italien ou du polar, de coups tordus, de manipulations et contre-manipulations à y perdre le sens commun, d’instrumentalisation de la Presse, de chantages, de luttes de clans, d’intérêts politiques, de secrets inavouables, la Lumière de la rampe, au lieu d’éclairer, y aveugle le spectateur et l’Ombre dissimule: dans tous les cas, plus rien à voir…
Source : Mediapart
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