Face à l’hiver démographique auquel est confrontée l’Europe, les choses semblent s’accélérer avec diverses pressions de plus en plus fortes pour encourager l’immigration économique vers le Vieux continent.
En l’espace de quelques mois, ce sont tout d’abord plusieurs grandes entreprises telles Amazon qui ont annoncé leur volonté d’embaucher des « réfugiés » (non sans quelques déconvenues), puis des États comme l’Italie et la Grèce se sont engouffrés dans cette voie en institutionnalisant cette immigration économique.
En France, la régularisation des clandestins employés dans les métiers en tension a fait débat au cours de l’automne dernier dans le cadre du projet de loi immigration, avec une classe politique tiraillée entre la prise en compte d’une opinion publique de plus en plus hostile à de telles régularisations et les pressions de certaines entreprises des secteurs concernés, à commencer par l’hôtellerie-restauration.
Toujours dans l’Hexagone, cette immigration économique a récemment trouvé un soutien de poids en la personne de Patrick Martin, président du Medef (Mouvement des entreprises de France), organisation se présentant comme le « premier réseau d’entrepreneurs de France », qui déclarait sur Radio Classique le 19 décembre dernier que « ce ne sont pas les patrons qui demandent massivement de l’immigration, c’est l’économie ».
Immigration économique : Ylva Johansson en fait la promotion
Ce motif de la pénurie de main-d’œuvre pour inciter à légaliser une partie de l’immigration d’origine extra-européenne s’invitant clandestinement en Europe a de nouveau été évoqué en ce début d’année 2024, cette fois par la commissaire européenne aux Affaires intérieures, Ylva Johansson.
À l’issue d’une conférence intitulée « Solutions européennes au défi commun de l’immigration », qui s’est tenue à Athènes au ministère grec des Migrations, lundi 8 janvier, Ylva Johansson a souligné la nécessité « d’investir dans les voies légales d’immigration régulière » afin de relever les « défis actuels ».
« Nos sociétés et nos marchés du travail ont besoin de ressources humaines, et la migration légale doit se faire de manière organisée », a déclaré la commissaire européenne aux Affaires intérieures lors d’un point presse.
Lors de cette prise de parole, Ylva Johansson a également indiqué que l’Europe accueillait chaque année 3,5 millions de migrants légaux, auxquels s’ajoutent 300 000 personnes entrant de manière irrégulière.
Par ailleurs, les propos tenus (et rapportés par le quotidien grec Kathimeriní) à cette même occasion par le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, membre du parti de centre-droit Nouvelle Démocratie (ND) et jadis à l’origine d’un durcissement de ton sur les questions migratoires après son accession au pouvoir en 2019, ne sont pas passés inaperçus.
Tandis que la Grèce annonçait encore, en janvier 2023, l’extension du mur de clôture à la frontière nord-est du pays avec la Turquie afin de lutter contre l’entrée de clandestins sur le territoire, Kyriakos Mitsotakis a en effet tenu un discours assez divergent : « Nous ne craignons pas le terme d’intégration ; nous sommes une société ouverte qui a prouvé sa volonté d’accueillir ceux qui cherchent à s’intégrer dans la société grecque. Rendre leur séjour ici permanent est une conséquence naturelle ».
Kyriakos Mitsotakis. source : www.europarl.europa.eu
Immigration économique : 1 million de migrants par an ?
Toujours dans l’optique de justifier l’immigration économique, Ylva Johansson a également déclaré à Athènes que « la population en âge de travailler de l’UE diminue d’environ un million de personnes chaque année ».
Aussi, « l’UE a besoin d’un million d’immigrés par an pour combler son déficit démographique », a ajouté la commissaire européenne. « Cela signifie que l’immigration légale devrait augmenter plus ou moins d’un million par an, ce qui représente un véritable défi pour y parvenir de manière ordonnée ».
De plus, un document de la Commission européenne publié en 2016 prévoit des chiffres encore plus élevés, notant que sans immigration, la population active de l’UE passera de 334 millions, en 2014, à environ 238 millions en 2060.
Les dernières projections démographiques d’Eurostat, l’office statistique de l’Union européenne, indiquent que la population de l’UE augmentera jusqu’en 2026, date à laquelle elle atteindra un pic de 453,3 millions d’habitants. Elle devrait ensuite diminuer progressivement pour atteindre 447,9 millions d’habitants en 2050, avant de chuter plus rapidement jusqu’à la fin du siècle (419,5 millions d’habitants en 2100).
D’autre part, toujours selon les projections d’Eurostat, la part de la population âgée de 65 ans ou plus passera de 21,1 % en 2022 à 31,3 % à la fin du siècle.
Enfin, au sujet d’une défiance de plus en plus forte des populations européennes à l’égard de l’immigration, Ylva Johansson a également un avis : elle estime que « le poison et la cause de la xénophobie et du racisme » seraient générés par l’immigration clandestine.
« Je pense que ce que nos concitoyens nous demandent vraiment, ce n’est pas combien de migrants (arrivent), mais si nous le faisons de manière ordonnée, comment nous le gérons, qui contrôle ou qui vient », a-t-elle déclaré.
Des concitoyens européens qui, faut-il le rappeler à la commissaire européenne aux Affaires intérieures, n’ont jamais été sollicités pour exprimer leur point de vue sur ce sujet…
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