Tenu à Paris sous le signe de l’amitié franco-américaine, le défilé du 14 Juillet a marqué le 100e anniversaire de l’engagement américain dans la Première Guerre Mondiale. Quelle est la vérité derrière cet engagement? L’expert de Sputnik Ernst Wolff a analysé les objectifs politiques et financiers de Washington à cette époque.
Dans le cadre de la célébration du 100e anniversaire de l’entrée en guerre des États-Unis dans la Première Guerre Mondiale, marquée en particulier par la participation de Donald Trump et de soldats américains au défilé du 14 Juillet à Paris, le chroniqueur et expert financier de Sputnik Deutschland Ernst Wolff, se lance dans l’analyse des objectifs politiques et financiers poursuivis par Washington et les avantages obtenus lors de la guerre. Selon lui, les résultats de la participation américaine sont impressionnants: la crise des marchés boursiers et la Grande dépression de 1929, qui a déstabilisé l’Allemagne et a ouvert la voie à l’arrivée au pouvoir des nazis.
Première Guerre Mondiale, planifiée à l’avance
La Première Guerre Mondiale a été déclenchée à la suite de l’assassinat de l’héritier du trône austro-hongrois Franz Ferdinand à Sarajevo, la capitale de la Bosnie, en juin 1914. Cependant, sa cause est étroitement liée à des «changements tectoniques» dans les relations entre les grandes puissances, écrit l’expert.
L’Empire britannique, première puissance mondiale au seuil du XXème siècle, éprouvait des difficultés financières importantes, principalement en raison de la Seconde Guerre des Boers. Proclamée en 1871 après la guerre franco-prussienne, l’Empire allemand est devenu un état industriel puissant. Les États-Unis ont également connu une croissance économique rapide.
Dans leur quête pour la domination mondiale, l’Allemagne et les États-Unis suivaient deux stratégies différentes: l’Allemagne menait ouvertement la guerre pour les matières premières, les marchés et les territoires tandis que les États-Unis agissaient avec modération, restant officiellement neutres, avec un gouvernement déclenchant une guerre dans le dos de la communauté internationale. Il a permis aux plus grandes banques américaines d’octroyer les crédits aux belligérants. Ces prêts militaires déguisés en «crédits commerciaux», produisaient non seulement des intérêts mais aussi des commandes pour une industrie militaire américaine croissante. C’est-à-dire que la guerre est devenue extrêmement lucrative pour l’élite financière des États-Unis.
Le Président Woodrow Wilson a gagné sa réélection en 1917, promettant à ses compatriotes que les États-Unis resteraient à l’écart de la guerre. Cependant, peu de temps après son investiture, la guerre a connu une tournure inattendue: on a eu l’impression que l’Allemagne pourrait la gagner. Wall Street a sonné l’alarme: les banques américaines avaient peur que la Grande-Bretagne, la France et l’Italie ne soient pas en mesure de rembourser leurs dettes. Cette situation a défini clairement qui possédait le pouvoir aux États-Unis: Wall Street demandait une guerre au Président.
Comment préparer le peuple à la guerre
Comment pourrait-il expliquer aux Américains pourquoi il a brusquement changé d’avis? Le 13 avril 1917, le Président Wilson a fondé le Comité d’information publique, dont le seul but était de préparer la population à la guerre.
Le secrétaire d’État, le ministre de la Guerre et le ministre de la Marine ont administré le Comité, appuyés par de grandes figures médiatiques, des milieux universitaires, et d’art. En fin de compte, il a demandé au Comité de créer des slogans patriotiques et de diffuser des information négatives envers l’Allemagne.
Par exemple, la presse publiait délibérément des rapports sur des atrocités commises par des soldats allemands. L’administration a distribué des affiches provocatrices dans l’ensemble du pays, qui devaient inculquer aux gens le sentiment que leur propre sécurité est menacée par le militarisme allemand. On a même impliqué Hollywood, qui a contribué à la campagne avec des films tels que «Dans les griffes des Huns», «Kaiser — Bête de Berlin» et «Fils de p*te prussien».
Wall Street, vainqueur absolu de la guerre
La campagne a été couronnée de succès, en premier lieu en raison du faible niveau de formation de nombreux immigrants: leur position sociale difficile les rendait sensibles aux slogans simples et imagés de l’ennemi. Des centaines de milliers de jeunes chômeurs sont entrés dans les rangs de l’armée et espéraient assurer à la nation un avenir meilleur. Plusieurs dizaines de milliers d’entre eux ont trouvé la mort sur les champs de bataille en Europe.
En fin de compte, les États-Unis et leurs alliés ont vaincu l’Allemagne. Comme les alliés étaient insolvables en raison des dépenses militaires, le gouvernement américain a fait une nouvelle intervention: il s’est soucié d’inclure des engagements de réparation aux parties britannique, française et italienne dans le traité de Versailles. Cependant, ces réparations n’allaient pas aux victimes de la guerre: les gouvernement à Londres, Paris et Rome les envoyaient immédiatement aux banques américaines pour rembourser leurs dettes.
L’avidité de Wall Street ne s’est pas arrêté là: car l’Allemagne ne pouvant pas payer les réparations, les banques américaines octroyaient de nouveaux prêts, cette fois-ci à l’ennemi déjà vaincu. Quand ils ont demandé leurs remboursements après la crise boursière de 1929, ils ont déstabilisé l’Allemagne et ont ainsi préparé le terrain pour la montée du Parti national-socialiste des travailleurs allemands.