En France, si vous êtes fiché journaliste de droite, vous êtes fichu : c’est ce que Reporters sans frontières veut nous faire comprendre. Il suffit de lire l’édito de Gabrielle Cluzel, ce mardi 13 février, pour saisir toute la problématique de la « fatwa » lancée par Christophe Deloire, directeur général de Reporters sans frontières, et le Conseil d’État contre CNews, en passe de devenir la première chaîne d’information de France et pour les Français.
Reporters sans frontières : une auto-trahison
« Quand on a créé Reporters sans frontières, c’était exactement pour pas avoir cette attitude-là », lance, « atterré », Robert Ménard, l’un des co-fondateurs de cette organisation non gouvernementale (qui a vu le jour en 1985), à l’actuel secrétaire général de RSF qui s'est invité sur le plateau de CNews. L’actuel maire de Béziers et, par ailleurs, l'un des fondateurs de BV, a voulu rappeler l’origine du projet de RSF : « Qu’un certain nombre de points de vue jamais entendus » le soient enfin, le « boulot » n’étant pas d’être « l’arbitre des élégances ou de dire ce qu’il convient de faire, ou de ne pas faire ». Et d’insister, enfin, sur la nécessaire publicité d’opinions parfois dérangeantes. Au cœur de la réflexion - et du coup de gueule ! - de Robert Ménard, cette même philosophie qui l'amena à la création de notre média en 2012, aujourd’hui vaillamment porté par Gabrielle Cluzel et toute l'équipe de rédaction. Philosophie illustrée par cette sentence, improprement prêtée à Voltaire : « Je défendrai mes opinions jusqu'à ma mort, mais je donnerai ma vie pour que vous puissiez défendre les vôtres »).
Mais cette trahison des valeurs mêmes qui étaient à l’origine du projet de Reporters sans frontières ne se limite pas à cette inquiétante et récente dérive (quoique certainement mijotée depuis un moment) : c’est une trahison du sens même du journalisme, comme l'ont rappelé à Christophe Deloire les invités de droite (et de gauche !) du plateau de Pascal Praud, ce mercredi matin. « À partir de quand considérez-vous que nous sommes dans le commentaire et non dans l’énoncé de faits ? » lui somme de répondre Charlotte d’Ornellas. « Vous dites "CNews teste la démocratie" mais vous n’êtes pas fichu de nous expliquer en quoi », assomme à son tour l’homme de gauche Éric Naulleau.
Boycottés contre notre gré
Au-delà des considérations techniques et du débat (certainement intéressant) sur ce qu’est et ce que doit être le journalisme, la véritable question au cœur de cette polémique est posée par l’homme fort de CNews, Pascal Praud : « Quand Sophie Binet voit un micro de CNews et refuse de parler, comment je fais ? Quand j’invite Sandrine Rousseau et qu’elle ne veut pas venir, comment je fais ? C’est eux qui ne veulent pas venir ! » À qui la faute ? À qui la responsabilité sur ce « manque de pluralisme » imputé à la chaîne ? À ceux qui remuent ciel et terre pour avoir Mathilde Panot ou Danièle Obono en plateau, où à ceux qui refusent prestement ces invitations ? À La France insoumise qui va, toute honte bue, là où on ne veut pas d’elle mais refuse les lieux où on ne cesse de la quémander ? La réponse est dans la question.
Pourquoi CNews et BV dérangent
Christophe Deloire est venu sûr de lui et confiant (et de sa propre initiative) pour s’expliquer, ce mercredi matin, chez CNews. Il n’a commis qu’une erreur : celle d’avoir sous-estimé les journalistes et chroniqueurs de l’antenne, qui ont précisément fait leur travail en lui posant les questions qu’il fallait. Résultat : tout le monde a compris. Chaque spectateur aura bien compris ce qui dérangeait, au fond, Reporters sans frontières, le Conseil d’État et l’Arcom : que des médias, enfin, permettent aux Français d’accéder à une information vérifiée, authentique, fiable, mais surtout représentative du réel. Et avec un certain succès.
Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 15/02/2024 à 22:01.
Jordan Florentin
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