Etre secrétaire dans un cabinet d’avocats de Guingamp, c’est bien, mais devenir député c’est mieux ! Voilà ce que devait penser Murielle Lepvraud (LFI) en 2022 après avoir battu le député sortant Yannick Kerlogot (majorité présidentielle) au second tour. Certes l’examen des chiffres montre que cette victoire fut permise grâce au renfort des électeurs RN du premier tour (ils étaient 7 027) – évidemment l’insoumise Lepvraud a toujours évité de s’en vanter, pourtant sans eux, elle ne serait pas passée de 11 852 voix (27,21 %) à 21 716 voix (53,42 %).
En 2024, elle est réélue grâce au désistement du candidat de la majorité présidentielle Cyril Jobic (il a obtenu 17 555 voix). Murielle Lepvraud est donc habituée à recevoir des coups de main. Après sa réélection, sa première réaction a été de saluer « les électeurs qui ont glissé le bon bulletin dans l’urne pour empêcher le RN de remporter cette circonscription. J’espère que l’on pourra mettre en place notre programme de rupture. C’est la solution pour apaiser le pays et réduire les inégalités sociales. Notre première mesure sera l’abrogation de la loi sur les retraites, qui est décriée par toute la population. » (Le Télégramme, Guingamp, lundi 8 juillet 2024).
Abroger la loi sur les retraites – on passe de 62 ans à 64 – sera une affaire difficile. D’abord l’installation à l’hôtel de Matignon de Lucie Castets ne semble pas acquise, et encore moins le coup du « décret ». « LFI et ses deux alliés – le PS, lui, n’a pas été consulté – ne semblent plus beaucoup croire à l’engagement de Jean-Luc Mélenchon de supprimer la loi « dès cet été, par décret » ». La majorité des constitutionnalistes estime en effet qu’une loi ne peut être annulée de cette manière. Selon eux, le Conseil d’Etat invaliderait inévitablement un décret qui aurait comme conséquence de rendre inapplicable une loi votée. » (Le Canard enchaîné, 7 août 2024)
Reste la possibilité pour les députés du NFP de déposer une proposition de loi. Pour ce faire, il faudra utiliser une « niche parlementaire ». « La première disponible, le 31 octobre, a été réservée par le Rassemblement national. Lequel a, lui aussi, manifesté l’intention de déposer une proposition de loi d’abrogation de la réforme des retraites. « Nous ne la voterons en aucun cas, quel que soit son contenu, a précisé Eric Coquerel (LFI), président de la commission des finances. C’est une question de principe. Nous ne voulons donner aucun point au RN. » (Le Canard enchaîné, 7 août 2024). Une proposition de loi déposée par LFI n’aurait pas davantage de chances d’être adoptée. En effet, si les quatre groupes du Nouveau Front populaire totalisent 193 députés, la majorité présidentielle (166 sièges) et la Droite républicaine de Laurent Wauquiez (47) alignent 213 députés. Autant dire que sans le concours des 126 députés du RN, il est impossible pour le NFP de faire passer une loi abrogeant les 64 ans. La « question de principe » fonctionne-t-elle également dans ce cas? Le « programme de rupture » cher à Murielle Lepvraud aura certainement des ratés !
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