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[Exclusif] Législatives : le système la main dans le sac (III/III)

© Jordan Florentin
© Jordan Florentin
Alors que la nomination d'un nouveau Premier ministre est imminente, BV revient sur l'élection de l'Assemblée avec laquelle il devra gouverner la France. Une assemblée issue de compromissions inédites entre le pouvoir en place et ses oppositions de gauche et de droite. Chiffres en main, BV refait le match en trois articles publiés sur trois jours. Qui a fait élire qui, avec quel résultats ? Cette étude dévoile les arcanes d'un système politique verrouillé, sans voile.

Après les incroyables compromissions de la Macronie avec le NFP et LFI (partie 1),et Les LR non ciottistes, bénéficiaires innocents ou passagers clandestins du front républicain ? (partie 2), la suite et fin de notre enquête ce jour : le RN et ses alliés, entre désillusions et résistance.

Les résultats du second tour des élections législatives anticipées ont été une énorme surprise du fait de l’écart considérable entre les résultats électoraux effectifs et les dernières prévisions des instituts de sondage sur le nombre de députés de chaque camp, surprise qui avait fait l’objet d’une analyse de ma part dans BV en lien avec le caractère unique du système électoral français (scrutin uninominal à deux tours). En effet le RN et ses alliés ciottistes se retrouvaient avec 142 députés, moins de la moitié du nombre nécessaire pour avoir la majorité absolue (288) et très loin du minimum de 200 députés prévus dans toutes les estimations juste avant le 7 juillet.

Ce 7 juillet concluait pour le RN une hebdomada horribilis (semaine horrible) très loin des deux campagnes de rêve de juin 2024 (européennes et premier tour des législatives) : décrochage lent mais constant dans les sondages, pilonnage médiatique en règles sur l’impact catastrophique dans tous les domaines de l’arrivée au pouvoir du RN, multiples polémiques sur le profil de nombreux candidats RN « problématiques » comme l’atteste cet article du Monde.

Tout cela s’accompagnait de la mise en place à marche forcée d’un « front républicain », terme dont il faut s’arrêter sur le choix des termes ; le front républicain tient pour acquis que le RN pose des risques considérables pour le fonctionnement régulier des institutions républicaines, une affirmation qui relève l’affect mais qui est infiniment difficile à soutenir de façon convaincante dans le cadre d’un débat argumenté contradictoire.

« Front républicain = Tout sauf le RN et Tous contre le RN »

Sur le plan pratique, « front républicain = Tout sauf le RN et Tous contre le RN » par un recours massif aux désistements par la gauche et le centre. Il s’agit de mettre en échec le RN partout et chaque fois que possible.

Les résultats du second tour amènent à admettre que ce front républicain fonctionne encore de façon efficace, dans les médias certes, mais surtout donc dans l’esprit de nombreux Français et donc dans les urnes. Il y a eu 206 désistements sur plus de 300 triangulaires possibles : 121 désistements NFP aboutissant à l’élection de 86 députés Ensemble ! 23 députés LR et seulement 12 députés RN (10 %), 80 désistements Ensemble ! conduisant à 50 députés NFP élus, 1 député LR et seulement 27 députés RN élus (le tiers). Seul 41 députés RN ont été élus dans ces conditions, soit le cinquième des triangulaires devenus duels du fait du front républicain. De son côté, le RN a participé au second tour presque partout où il pouvait, avec seulement 3 désistements sur 80 possibles conduisant à l’élection de 2 députés Ensemble ! (avec défaite de candidats LFI) et 1 député divers droite.

Plusieurs personnalités du RN ou de ses alliés ont perdu de peu l’élection du fait de tels désistements « républicains ». C’est le cas de Marie-Caroline Le Pen dans la 4ème circonscription de la Sarthe (ancienne circonscription de François Fillon), battue par la candidate LFI 50.23 % contre 49.77 % (225 voix d’écart sur 53 907 suffrages exprimés), grâce au désistement de la candidate macroniste (25,88 % au premier tour). Même résultat pour le président des jeune LR et ciottiste Guilhem Carayon dans la 3ème circonscription du Tarn, battu 49,01 %/50,99 % par le candidat Renaissance après le retrait du candidat LFI (25,39 % au premier tour), ou l’ex-sondeur Jérôme Sainte-Marie dans la 1ère circonscription des Hautes-Alpes, battu 48,36 %/51.64 % par la candidate PS après le désistement de la candidate Renaissance (22.58% au premier tour).

Bref l’ensemble du système politique s’est organisé pour marginaliser le RN, que ce soit de façon active et fortement médiatisée pour le centre (principal bénéficiaire du Front Républicain en termes de sièges gagnés ou conservés) et la gauche, ou de façon passive pour les LR non ciottistes, bénéficiaires involontaires ou passagers clandestins du Front Républicain. Les modalités de constitution de la gouvernance de l’Assemblée nationale où le RN et ses alliés n’ont obtenu AUCUN poste en dépit du tiers du vote populaire obtenu au premier tour.

Le front Rrpublicain a donc été efficace, mais pas assez pour empêcher le Rassemblement national de connaître ses meilleurs résultats de tous les temps à des élections législatives avec une progression majeure tant en voix qu’en nombre de siège. Le RN a obtenu cinq fois plus de voix et trois fois plus de sièges que LR, évolution spectaculaire sur deux décennies.

Partout ailleurs dans une Europe dominées par des régimes parlementaires, les partis de la coalition qui a gagné l’élection, coalition composée au cas d’espèce par le Nouveau Front populaire (y compris LFI), Ensemble ! mais aussi de facto LR, seraient en train de négocier un programme de gouvernement. Mais apparemment le « tout sauf le RN », seul vainqueur du second tour des élections législatives, ne constitue pas une politique, comme l’attestent les difficultés et les déchirements pour la simple nomination d’un Premier ministre deux mois après le second tour.

Georges Le Breton

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