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Le début de la fin ou la fin de l’effondrement de l’empire

« Les gens regarderont les cinquantes dernières années et diront : Là se trouve le début de la fin de l’empire galactique. »

Asimov, Fondation

Nous en sommes là, les gens regarderont la semaine dernière et diront là se trouve le début de la fin de l’empire américain.

23 Ans après le onze Septembre a marqué le commencement du déclin de l’empire américain, nous venons d’entrer dans la phase du début de l’effondrement. Nous détaillerons ce déclin, puis les causes de la faillite et enfin les éléments qui marquent la fin de l’organisation du monde.

L’anniversaire du onze septembre fut l’occasion de rappeler les doutes persistants sur la thèse officielle. Si le débat peut être intellectuellement stimulant, sa valeur ajoutée est relativement faible au jour d’aujourd’hui.

Dans la pratique le onze septembre fut grave pour les USA non en raison des pertes matérielles et humaines relativement limitées, mais à cause de la réaction de l’administration US.

Que pèsent les 4-5 mds de dégâts infligés aux USA ce jour-là ? Un pourcentage tellement minime de l’actif national américain qu’il se voit à peine. Les 2600 morts sont pareillement inexistants face aux 300 mio d’habitants du pays. Si on peut admettre l’émotion des familles des victimes et sympathiser avec, la raison d’état aurait dû commander de garder la tête froide et se contenter d’une riposte symbolique.

Seulement, la réaction américaine fut bien différente : Conquête de l’Irak, de l’Afghanistan, Patriot act. En interne le paquet d’investissements militaires voulu par George W Bush passe comme une lettre à la poste.

L’Amérique libère les appétits de son complexe militaro-industriel, financé par l’expansion de la dette publique. On constate ainsi une accélération des relations incestueuses entre la bureaucratie étatique et la corpocratie pour assurer des dividendes de haut niveau.

Là est la première cause de déclin : pourquoi innover s’il suffit d’avoir l’accord des ronds de cuirs du gouvernement. Les entreprises d’armements, concentrées à la fin des années 90 valorisent leur pouvoir d’établir les meilleurs tarifs et conditions pour maximiser leurs profits. Au contraire, les départements de R&D sont rationalisés/détruits, ce qui conduit à l’échec des principaux programmes d’innovations d’armement. Seul le F35 passe au travers, mais au prix de coûts extraordinaires et d’une liste impressionnantes de malfaçons qui conduisent à douter des possibilités opérationnelles de l’engin !

Ainsi, la base technologique US se fragilise et on constate dans la course hypersonique les limites de la R&D au service du pentagone. Même si l’arme est surtout utile pour neutraliser les corps expéditionnaires de l’US Navy, elle apporte moins pour attaquer des nations continentales. Seulement le camouflet de cette course technologique perdue demeure.

Ce premier facteur de déclin s’associe à l’échec des occupations irakiennes et Afghanes qui ont ruiné la réputation des États-Unis comme puissance capable d’apporter du développement. Aujourd’hui les jours du plan Marshall, de la reconstruction du Japon et de l’Europe occidentale sont bien loin. Vingt ans de contre insurrection, de crimes de guerre comme à Abou Graib ou de dommages collatéraux, ont laissé un océan de ruines et de haines.

Le patriot act, voté dans l’enthousiaste de la guerre contre le terrorisme devient perçu avec les affaires Snowden et Assange comme le premier acte vers un régime autoritaire de contrôle lourd de l’information bien utile pour masquer l’échec économique.

La croissance basée sur la dette et l’importation de marchandises à bas coût connaît un premier coup d’arrêt avec la crise de 2008 fruits d’une gestion monétaire accommodante après le 11 septembre. Nos dirigeants refuseront de régler le problème et de punir les banquiers. Ils répandent des liquidités, garantissent les banques et sans surprise, les déséquilibres continuent à s’accumuler.

L’Amérique s’est muée du pays du progrès en une puissance prédatrice et les dommages sur son soft power sont incalculables. Pour compenser, elle se réfugie dans sa capacité à détruire et à menacer comme un gang de mafieux occupés à sauver leur business de racket en tuant à tout-va. La guerre contre le terrorisme devient un terrorisme occidental envers le reste du monde qui culmine en Libye, au Soudan ou au Congo1 !

Le constat du déclin !

La conséquence, nous la connaissons tous, nombres de pays se sont groupés derrière les puissances capables de les appuyer militairement.

Le rendement décroissant des guerres de l’empire s’accélére. En Syrie, la Russie démontre sa capacité à vaincre les proxy terroristes de l’occident. L’affaire ukrainienne marque un changement de braquet et à partir du moment où les occidentaux montent les enjeux, toutes les billes sont sur la table. La Russie montre sa capacité à résister aux opérations de déstabilisations occidentales. L’aide des pays du monde prouve la bienveillance de nombre de nations pour aider les Russes à contourner les sanctions à un niveau suffisant pour les rendre inefficaces. Dès lors, le soft power en échec, la victoire occidentale viendra du hard power.

On peut imaginer que les occidentaux auraient pu livrer davantage et qu’ils ont volontairement limité leurs livraisons pour ne pas permettre à l’Ukraine de prendre l’avantage sur les Russes.

Cette version me semble douteuse et nous allons l’examiner en profondeur, car elle est importante :

  • Tout d’abord, si c’était le cas, les personnels auraient systématiquement été prêts pour entrer en action dès que la livraison était décidée. Or, chaque décision fut suivie d’un important délai pour former les personnels ukrainiens. Ce faisant, on démontre à minima un lourd problème de planification avec de rares exceptions, comme les AMX 10 RC livrés relativement vite (Peut-être une bonne anticipation ou une formation rapide ?)

  • Secundo, bien souvent les matériels sortent de stockage et leur remise en état prend du temps. Là encore, si les occidentaux avaient planifié les commandes auraient dû être lancées. Ca démontre aussi les délais de fabrication bien trop long des pièces détachées et les Ukrainiens se plaindront souvent de problèmes de qualité de matériels remis. Là encore beaucoup se laissent influencer par les quantités de matériels en stockage inactif, mais cette illusion de puissance semble démentie par les problèmes de livraisons. Contrairement à la Russie capable de remettre en service quasiment à la demande (Ou alors, ils ont bien anticipé) l’occident traine. Surement car en réalité, ces matériels sont inutilisables faute de mise sous cocons dans de bonnes conditions. Cela conduit le reste du monde à réévaluer le potentiel militaire occidental.

  • Encore plus grave, dans les catégories de munitions clé, la faillite occidentale est criante. Impossible de tricher, les stocks russes, infiniment plus vaste se joignent à une capacité de production plus importante. Celles des alliés des russes s’avèrent aussi significatives alors que l’occident est en faillite d’obus et de missiles AA dont la consommation a été lourdement sous estimée2.

  • A cela s’ajoute l’échec de la doctrine de l’OTAN. Avant-guerre, les pays occidentaux avaient formé 80.000 militaires ukrainiens. Où sont-ils ? Que sont devenus ces super soldats préparés dans des conditions parfaites en théorie ? L’égalité numérique des deux camps au début du conflit aurait dû leur permettre d’avoir un impact considérable. En réalité, la défense de Kiev ne doit pas faire illusion : Les Russes avancent partout, conquièrent la moitié des oblasts de Zaporizia et de Kherson, libèrent le Lougansk, rentrent dans celui de Karkiv et prennent Marioupol, complétant le lien terrestre avec la Crimée. 20 % du territoire ukrainien tombent entre leurs mains, un avantage initial qui aujourd’hui encore délimite les lignes de front !

    Les combattants formés par l’OTAN auraient dû infliger des pertes punitives aux formations russes bien trop aventurées. En réalité, si le nombre de soldats perdu fut douloureux, il demeure modéré et le corps de bataille russe conserve sa capacité à effectuer ses missions. La seule erreur du pouvoir à Moscou est d’espérer des négociations et de retarder le rappel des réservistes jusqu’en septembre pendant que Kiev mobilise ses troupes.

    La situation d’avantage numérique Ukrainienne permettra de frapper les forces russes surétendue à la fin de l’été 2022, ce sera la seule grande victoire du pouvoir Kievien de la guerre !

    Les Russes mobilisent et le conflit acquière ce caractère de guerre de tranchées qu’il conservera jusqu’en 2024. La supériorité numérique constante des Ukrainiens, aidés, formés par l’OTAN se révélera inutile et le mythe de l’efficacité des méthodes de combats occidentales acquis dans le Golfe contre l’Irak, vole en éclat aux yeux des observateurs attentifs.

  • L’occident se réfugie dans le mythe de sa supériorité technologique et si ses armes miracles semblent avoir eu temporairement une efficacité, force est de constater son absence de pérénitée. La R&D occidentale, trop délocalisée, réduite/optimisée est incapable de développer rapidement des solutions pour suivre l’évolution du conflit. Au contraire, les Russes développent des brouilleurs puissants qui neutralisent les HIMARS et nombre d’armes à guidage GPS en quelques semaines. Après de bonnes entrées en scènes les armes occidentales sont reléguées dans une obscurité honteuse faute d’apporter l’avantage espéré3.

    Coté Russe au contraire, les drones se multiplient et s’intègrent aux forces. L’avantage observationnel crée des synergies pour compenser le manque de précision de l’artillerie et augmente les performances de leur arme chérie. Le différentiel de pertes s’accumule et détruit le potentiel humain de l’armée ukrainienne4.

    Là encore, la perception du monde change et les Russes retrouvent l’image de l’armée soviétique : Une bonne quantité avec une qualité suffisante pour effectuer la mission. Des armes faciles à servir et utiliser au contraire du fatras occidental désormais perçu comme inutilement sophistiqué !

Voilà les principaux caractères de l’échec occidental en Ukraine et ce conflit marque le coup d’arrêt. Dès la bataille de Barkmout, les conséquences sont claires pour ceux qui veulent regarder la réalité sans fard :

La garantie nucléaire de l’OTAN a toujours été un parapluie percé, mais au plan conventionnel les signataires pouvaient espérer une armée d’un demi-million d’américains pour les défendre. Ce fut l’effectif de l’intervention dans le Golfe. L’Ukraine démontre l’insuffisance d’une telle force.

Restent deux stratégies : Doubler, comme la Pologne le projette avec son projet de construire la seconde armée Européenne après la Russe : un puits sans fond seulement envisageable avec de lourdes aides européennes et des partis désireux de se faire financer par les entreprises d’armement US, parfois clémente sur leur propre corruption5.

La seconde est d’abandonner l’OTAN et les guerres impériales US pour s’acheter une certaine clémence du reste du monde. Notre insignifiance à venir pourra alors nous servir de paravent. Il est vrai que payer nos retraites, nos dettes, remettre en états nos économies dévitalisées attireront assez peu les envahisseurs. Inutile de convoquer Attila, les échecs de nos dirigeants ont fait le travail et faire repousser l’herbe sera difficile. Nous sommes un peu comme ces vieilles bigotes qui peuvent sagement se proclamer indifférente aux émois de l’amour protégées qu’elles sont par leur figure et leur charmes flétris.

Et la semaine passée vient justement de marquer le changement de stratégie. La Pologne continue dans ses errements, c’est là une habitude historique, mais l’Allemagne effectue brutalement sa volte face.

Bien sûr, l’arrêt de l’aide à l’Ukraine, ou du moins sa dissimulation était à attendre après les votes de Thuringe et de Saxe ou les partis pacifiste ont effectués de grosses percées.

Seulement, ce n’est pas tout, Volkswagen annonce des fermetures d’usines en plein Standort Deutschland. De plus, l’Allemagne rétablit ses frontières face à l’immigration.
L’UE, avec le rapport Draghi, reconnaît son échec à générer de la croissance et du progrès au profit de ses peuples. Si la solution est plus d’UE, l’aveu d’échec est cinglant !

Les Polonais se préparent à renvoyer en Ukraine les hommes dont l’armée a besoin pour résister encore un temps à l’armée russe.

Ces décisions marquent un repli national, la fin de l’Europe, vassal intégré et soumis des USA. Bien sûr seul le sommet a été franchi et redescendre de la montagne exigera de nombreux pas. Le chemin sera difficile, parsemé d’embûches et de ravins, mais une étape décisive a été franchie cette semaine.

Alors, il reste les élections américaines : Notre suzerain acceptera-t-il de relâcher ses griffes sur notre continent conquis en 44-45 et dans la décennie 90 ? L’issue est improbable si on attend une réaction volontaire, mais minée par sa crise politique, ses problèmes industriels et sociaux, l’Amérique peut s’avérer manquer de forces pour nous conserver.

L’histoire est en marche à nous de la comprendre, pour cette fois monter dans le bon train. Le monde a changé et servir le pouvoir US n’est désormais qu’une option parmi d’autres. Aux peuples d’en avoir conscience6 pour effectuer leur véritable choix. Démocratique cette fois au lieu de nous montrer otages d’une caste de collaborateurs qui s’enrichissent de nos dépouilles.

1Les guerres oubliées de la prédation impériale que nos médias négligent d’évoquer tant les dossiers sont sanglants !

2En raison de l’usage intensif de ces armes pour abattre les drones alors que les stocks avaient été dimensionnés en fonction des avions et des missiles russes. En tenant compte de plus des forces aériennes occidentales.

3Dommage monsieur Tytelmann pour votre précieuse courbe technologique !

4C’est le dernier mythe défendu par les plateaux. L’idée de lourdes pertes russes doit révolter la société civile et l’inciter à la révolte. Le réel refuse pourtant de se plier au narratif et d’ici peu, les « spécialistes » occidentaux devront procéder à une nouvelle révision déchirante de leurs narratif. Mon cœur saigne devant leur douleur à venir. OU pas, je suis rancunier !

5Pas sur celle des concurents comme l’a montré l’affaire Alstom. Mais bon l’avantage d’être un empire est de bénéficier du deux poids deux mesures.

6Donc, merci de diffuser ce texte.

Jules Seyes

https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/le-debut-de-la-fin-ou-la-fin-de-l-256848

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