Le Premier ministre irlandais, Simon Harris, a officiellement annoncé la tenue d’élections générales anticipées le 29 novembre 2024. Avec cette décision, Fine Gael, le parti de centre-droit dirigé par Harris, espère capitaliser sur la faiblesse actuelle de Sinn Féin et conforter sa place au gouvernement en coalition avec Fianna Fáil et le Parti Vert.
Un contexte politique favorable pour Fine Gael
Depuis plusieurs mois, l’Irlande était en attente de cette annonce. Harris, à la tête du gouvernement depuis avril 2024, a choisi d’avancer les élections de quelques mois plutôt que d’attendre la fin du mandat prévue en mars 2025. Cette décision permet à Harris d’exploiter le contexte actuel, marqué par une chute de popularité de Sinn Féin, le principal parti d’opposition, et une situation économique positive due à un budget généreux adopté récemment.
Fine Gael, allié à Fianna Fáil, bénéficie actuellement d’un soutien stable dans les sondages, avec une coalition qui pourrait bien remporter un quatrième mandat consécutif. Les récentes baisses d’impôts et les augmentations de dépenses publiques, soutenues par des recettes fiscales élevées provenant des géants de la technologie et de la pharmacie, offrent un climat propice pour un retour des partis au pouvoir.
La chute du Sinn Féin : une opportunité pour le gouvernement en place
Le Sinn Féin, qui a connu une montée fulgurante en 2020, enregistre désormais une baisse de popularité marquée. En 2022, le parti atteignait encore 37 % d’intentions de vote, surpassant largement Fine Gael. Cependant, des changements de position sur la politique migratoire et des scandales liés à la protection des enfants ont fait chuter son soutien, maintenant estimé à environ 18,5 %. Cette situation fragilise Sinn Féin et offre une occasion en or pour Fine Gael et Fianna Fáil de se renforcer.
Sous la direction de Simon Harris, souvent surnommé le « taoiseach TikTok » pour sa maîtrise des réseaux sociaux, Fine Gael a revitalisé son image et consolidé sa position dans les sondages. Cependant, le parti reste confronté à des défis importants, notamment en matière d’infrastructures publiques, de transport et de santé.
Une coalition qui pourrait être reconduite
Les dernières projections indiquent que Fine Gael et Fianna Fáil, avec le soutien potentiel du Parti Vert, pourraient obtenir une majorité au parlement irlandais. Cette coalition entre deux anciens rivaux historiques dure depuis 2020 et pourrait bien être renouvelée, évitant ainsi des changements majeurs dans la politique du pays.
Depuis le début de ce partenariat, Simon Harris, Micheál Martin (ministre des Affaires étrangères et leader de Fianna Fáil) et Roderic O’Gorman (Parti Vert) ont dirigé l’Irlande en naviguant dans des crises telles que la pandémie de COVID-19, la crise du logement et des tensions liées à l’immigration.
De leur côté, les partis anti immigration, qui ont énormément oeuvré en faveur de la population irlandaise ces dernières années à propos de la crise du logement, et de la crise migratoire, semblent ne pas être parvenus à s’unir, et ne peuvent donc pas espérer peser suffisamment électoralement. Il faut dire que ces élections anticipées empêchent toute préparation pour de nouvelles initiatives ou de nouveaux partis.
Fine Gael : l’élan d’une nouvelle énergie
Depuis le remplacement de Leo Varadkar par Simon Harris à la tête de Fine Gael, le parti a réaffirmé sa volonté de rester au pouvoir avec une approche dite de « nouvelle énergie ». Fine Gael, qui compte actuellement 78 candidats, espère non seulement maintenir ses sièges, mais aussi en conquérir de nouveaux, notamment dans des circonscriptions clés comme Waterford, Cork South West et Dún Laoghaire. Bien que Fine Gael évite de prédire un nombre exact de sièges, le parti semble déterminé à s’imposer comme la première force politique, reléguant Fianna Fáil et Sinn Féin au second plan.
Les dirigeants de Fine Gael insistent sur l’importance de cette nouvelle énergie pour relancer le parti, tout en évitant l’excès de confiance. Simon Harris a lui-même affirmé que l’objectif reste de maximiser les sièges, avec un focus sur le soutien local pour conquérir de nouvelles circonscriptions.
Fianna Fáil : maintenir sa position de force
Fianna Fáil, partenaire de coalition de Fine Gael, ne se contente pas de jouer le rôle de second violon. Sous la direction de Micheál Martin, le parti présente 75 candidats et reste optimiste quant à ses chances de succès. Fianna Fáil, fort de son implantation locale, se concentre sur des zones stratégiques comme Dublin South Central et Louth, espérant renforcer son nombre de sièges et affirmer sa présence en tant que force majeure. Une alliance avec Sinn Féin est toutefois écartée, le parti jugeant cette option incompatible avec ses valeurs et son orientation politique.
Malgré la montée en puissance de Fine Gael, Fianna Fáil reste confiant quant à sa capacité à influencer les négociations post-électorales et à rester un acteur clé de la coalition gouvernementale.
Sinn Féin : une opposition sous pression
Longtemps considéré comme le principal rival de la coalition actuelle, Sinn Féin a vu sa popularité chuter ces derniers mois. Avec des controverses et un positionnement fluctuant sur des sujets comme l’immigration, le parti s’efforce de maintenir une base solide en se concentrant sur des thèmes essentiels tels que le logement, la santé et le coût de la vie. Sinn Féin se présente avec 60 candidats, espérant élargir sa représentation malgré un climat défavorable.
Sinn Féin écarte également toute alliance avec Fianna Fáil ou Fine Gael, affirmant vouloir remplacer les partis « de guerre civile » par une coalition orientée vers la gauche. Le parti mise sur un retour aux préoccupations de base pour convaincre les électeurs de son potentiel en tant que force politique principale.
Parti Vert : rester un allié de la coalition
Le Parti Vert, qui joue un rôle important dans la coalition actuelle, cherche avant tout à maintenir ses sièges et à solidifier sa position. Avec des candidats dans toutes les circonscriptions et une majorité de représentantes féminines, le parti espère conserver son influence sur les politiques environnementales et climatiques. Bien que les Verts se disent ouverts à des discussions avec d’autres formations, ils privilégient le maintien de la coalition actuelle pour continuer à avancer sur les enjeux écologiques.
Les indépendants et les nouvelles alternatives
Le paysage politique irlandais voit également émerger des forces indépendantes, comme le nouveau parti Independent Ireland, qui cherche à défendre les intérêts des communautés rurales et traditionnelles. Dirigé par le député Michael Collins (hé oui !), ce parti vise à gagner entre six et dix sièges pour devenir un allié potentiel dans les futures négociations de coalition.
Les autres partis de gauche : Labour, Social Democrats et People Before Profit-Solidarity
Du côté des partis de gauche, le Labour espère renforcer sa représentation en se positionnant comme une alternative fiable et pragmatique, avec des gains potentiels à Dublin et dans le sud du pays. Les Social Democrats, quant à eux, affichent leur volonté d’entrer au gouvernement sous certaines conditions et espèrent tirer parti d’une décennie de croissance pour consolider leur position. People Before Profit-Solidarity, de son côté, reste fidèle à ses principes et exclut toute coalition avec les partis de droite.
Les défis à venir pour le futur gouvernement
Malgré des résultats économiques solides, le prochain gouvernement devra affronter de nombreux défis. L’Irlande continue de faire face à une grave crise du logement, aggravée par la hausse des coûts de la vie et le manque de logements abordables. Le système de santé sous-financé et les infrastructures de transport vieillissantes sont également des problèmes majeurs qui exigent des réformes profondes.
En parallèle, l’Irlande, qui dépend largement des entreprises technologiques américaines, surveille de près l’impact potentiel des décisions du président américain récemment élu, Donald Trump.
L’élection de novembre 2024 marquera aussi un changement significatif avec une augmentation du nombre de sièges au parlement, passant de 160 à 174, pour répondre à la croissance démographique du pays. Le nombre de circonscriptions augmente également, de 39 à 43, ce qui pourrait introduire de nouveaux rapports de force et des résultats imprévisibles dans certaines régions.
En Irlande, le système de représentation proportionnelle permet aux électeurs de classer plusieurs candidats par ordre de préférence, ce qui rend le processus de comptage des voix plus complexe. Le dépouillement peut ainsi prendre plusieurs jours, rendant les résultats finaux incertains jusqu’à la dernière minute.
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