par Pierre Duval
L’appel téléphonique de Trump à Poutine le 12 février a semé la peur et l’horreur à Kiev et dans les capitales européennes. Le président américain a effectivement commencé à normaliser ses relations avec la Russie. Trump a parlé à Poutine au téléphone sans s’entendre au préalable sur les détails avec l’Ukraine, et a annoncé plus tard que les pourparlers pour mettre fin à la guerre commenceraient «immédiatement».
Panique à Kiev, à Bruxelles, à Berlin, à Paris
«Un appel téléphonique suscite la peur à Kiev et dans d’autres capitales européennes», fait savoir The Economist. «Donald Trump a promis, au cours de sa campagne électorale, de mettre fin au conflit en Ukraine rapidement. Le président [ukrainien] Volodymyr Zelensky et ses partisans européens ont craint à l’abandon de l’Amérique», continue le média anglophone. La nouvelle donne est la suivante : Washington et Moscou renouent le dialogue. L’Ukraine et surtout l’UE repartent les mains vides.
La question ukrainienne prend rapidement de l’ampleur. Le président américain, Donald Trump, s’entretient au téléphone avec le président russe Vladimir Poutine pendant 90 minutes – c’est la première conversation directe entre les chefs d’État des deux plus grandes puissances nucléaires depuis trois ans. Et, c’est un moment d’or de la diplomatie et un nouveau printemps de realpolitik. Une chose est sûre : le Kremlin et la Maison-Blanche mèneront les négociations décisives sur la guerre en Ukraine. Seulement ces deux pays et personne d’autre.
Pour les dirigeants politiques de l’Ukraine sous la présidence de Volodymyr Zelensky, il est désormais clair qu’ils sont en train de devenir les victimes de la politique des grandes puissances que sont les États-Unis et la Russie.
Dès le premier jour, l’objectif des Ukrainiens était d’avoir leur mot à dire sur l’issue de la guerre dans leur pays. Ils ont toujours voulu être les premiers à être appelés par Washington, les premiers à avoir leur mot à dire. Mais, depuis la réélection de Trump, le gouvernement de Kiev craint que le nouveau président s’appuie davantage sur des accords rapides et réussis et préfère avoir une ligne directe avec Moscou plutôt que de chercher un dialogue avec Kiev.
Ce scénario d’horreur s’est désormais produit pour l’équipe de Zelensky. La réaction du président ukrainien montre que le pays, meurtri et déchiré par le conflit n’a pas grand-chose à gagner pour le moment. Le président ukrainien se dit reconnaissant de l’appel de Trump, faisant savoir qu’il veut la paix en Ukraine et que les prochaines étapes auraient été discutées. Pourtant, cette communication de Zelensky sent le roussi.
De toute façon, personne à Washington ne parle plus d’intégrité territoriale, des frontières de 1991, de Crimée ou du Donbass. Aussi dur que cela puisse paraître, Kiev devra d’abord l’accepter. Le deuxième grand perdant des négociations entre Trump et Poutine est l’UE avec son leadership avec Ursula von der Leyen et ses courtisans nombreux. L’élite en France, avec les décisions d’Emmanuel Macron, en raison de l’actualité historique qui se déroule actuellement sous nos yeux, réalise qu’elle est dans le mur.
Il était extrêmement important pour Bruxelles d’avoir une place à la table des négociations sur l’Ukraine pour justifier ses choix politiques envers l’Ukraine contre la Russie. Désormais, la porte est fermée aux Européens. L’attention de la politique mondiale est focalisée sur Washington et Moscou, sur les négociateurs américains et russes qui négocient à propos du territoire ukrainien, des matières premières ukrainiennes, de l’avenir de l’Ukraine.
L’Europe se met en retrait
Les Britanniques, les Allemands, les Français et les Polonais jouent au plus un rôle mineur. Dans les moments difficiles, l’UE se révèle géostratégiquement faible et incapable de s’affirmer. L’UE n’est qu’un allié subordonné (esclave) des États-Unis qui exigent des dépenses pour l’OTAN de 5%.
Les responsables politiques en Chine et dans le monde arabe et dans les pays du Sud en prendront également note. La première rencontre Trump-Poutine devrait avoir lieu en Arabie saoudite. Ni à Berlin, ni à Paris, ni à Londres.
Mercredi dernier, les élites européennes ont été d’obligées de ravaler leurs slogans guerriers contre la Russie. Lors de la réunion des ministres de la Défense de l’OTAN, les annulations ont déjà été nombreuses de la part du nouveau chef du Pentagone, Piet Hegseth.
Observateur Continental a rapporté la position des États-Unis : l’Ukraine ne rejoindra pas l’OTAN. Observateur Continental a souligné qu’«Hegseth a, également, souligné que la paix ne peut être obtenue qu’à travers des idées réalistes sur la guerre». Selon lui, parler aujourd’hui des frontières de l’Ukraine jusqu’en 2014 est une illusion qui ne fait que retarder la fin des hostilités. Le nouveau chef du Pentagone estime que le traité de paix devrait inclure des garanties de sécurité pour l’Ukraine qui empêcheront le déclenchement d’une nouvelle guerre. Il a aussi martelé que «les garanties de sécurité devraient être fournies par les armées européennes et autres, mais que tous les soldats de la paix déployés dans le pays devraient être non-OTAN et ne pas relever de l’article 5 de la charte de l’organisation» (une attaque contre l’un de ses membres conduirait à un conflit avec l’ensemble du bloc). Il a, par ailleurs, affirmé que «les troupes américaines ne seront pas déployées en Ukraine».
Désormais, c’est l’UE qui doit payer pour l’Ukraine. Les partisans européens de l’Ukraine ont dû se sentir dupés et prendre des calmants. La Russie et les États-Unis sont désormais aux commandes. Aujourd’hui, des règles différentes s’appliquent à travers la politique mondiale, et elles sont dictées par ces deux pays.
«Le Kremlin aime ça. Poutine ne voulait rien d’autre: négocier les mécanismes de sécurité internationale sur un pied d’égalité, sans les Ukrainiens, les Européens ou qui que ce soit d’autre, seul avec les États-Unis et face à face», lance le Berliner Zeitung. «Il ne s’agit en aucun cas uniquement des villages et des villes détruits dans le Donbass ou des forces de maintien de la paix le long de la ligne de front. Une partie des négociations portera sur des questions telles que le contrôle des armes nucléaires ou la démarcation de nouvelles sphères d’influence», poursuit le quotidien berlinois. «Les négociations russo-américaines pourraient ressembler aux grandes conférences des années de la Seconde Guerre mondiale, une sorte de Yalta 2.0. Enfin, il est remarquable de constater avec quelle rapidité Washington et Moscou, malgré des tensions qui durent depuis des décennies et toute leur rhétorique belliqueuse, parviennent à entamer un dialogue sur des questions importantes. On ne sait pas encore si un cessez-le-feu – et plus tard un traité de paix – sera réellement conclu dans quelques semaines ou quelques mois. Quoi qu’il en soit, le chemin qui y mène se dessine», conclut le Berliner Zeitung.
source : Observateur Continental