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Huit ans de prison pour avoir tué Matisse : ce que valent nos vies

© Institut pour la Justice
© Institut pour la Justice
Pour avoir déplu à un adolescent afghan de son quartier à Châteauroux, Matisse a été poignardé à mort le 27 avril 2024. La cour de Châteauroux a rendu son jugement ce 28 mai 2025: Rahim (*) est condamné à huit ans de prison. « Cette décision est une gifle mise à la famille de Matisse », réagit auprès de BV Matthieu Valet, eurodéputé RN et ancien syndicaliste policier.

Dans nos colonnes, lundi, alors que s’ouvrait le procès, Clémence de Longraye relatait l’affaire et rappelait le contraste entre les deux adolescents. D’une part la victime, Matisse, 15 ans, sans histoires, passionné de foot. D’autre part Rahim, même âge, né à Kaboul, « connu des services de police » pour sortir trop souvent son couteau, apprenti rappeur qui insultait les forces de l’ordre. Matisse a osé dire à Rahim qu'il ne trouvait pas son rap très bon. Il en est mort.

La division perpétuelle

Pour ce meurtre, un homme majeur aurait encouru 30 ans de réclusion. Mais Rahim était mineur, d'où division de la peine par deux : il risquait 15 ans. Aux yeux du tribunal, il y a eu altération du discernement au moment des faits, cela divise par trois: il ne risquait plus que dix ans, comme requis par le procureur. Une aberration, pour Matthieu Valet: « S’il y a eu altération du discernement, qu’il soit mis en unité psychiatrique ou spécialisée, analyse-t-il. Mais le remettre en liberté plus tôt ? S’il a encore une altération une fois libéré, quelle sera la conséquence ? » Malgré ces diminutions déjà conséquentes, « les juges ont donné huit ans, donc moins que la peine requise, relève Pierre-Marie Sève, de l’Institut pour la Justice, joint lui aussi par BV. Ce n'est jamais le maximum qui est donné. Pourquoi ? ».

Or la division ne s’arrête pas là. Rahim pourrait n’effectuer que quatre ans de prison, car les réductions de peine ne sont pas un mythe. Il suffit de se reporter aux explications officielles : « La durée de la peine que vous effectuerez réellement sera réduite ». Il faut y ajouter les fameux 50% de rabais : « 6 mois [de réduction] par année d’incarcération. » Et le bonus : « Si vous exécutez plusieurs peines en même temps, vous relevez du système des réductions de peine applicable à la peine encourue la plus longue. »

Des failles et des faillites

N’exagérons rien. Rahim fera peut-être… 5 ans et demi ? « L’Institut pour la Justice, nous explique Pierre Marie Sève, a fait une étude qui montre que les condamnés effectuent en moyenne les deux tiers de leur peine. » Il pointe dans cette affaire plusieurs faillites, et d’abord une faillite migratoire : « Les étrangers sont surreprésentés dans les crimes et les délits, mais ils ne devraient même pas y être représentés, tout court : une politique migratoire convenable ne peut pas laisser entrer la moindre personne dangereuse. Et quand c’est le cas, l’expulsion devrait être automatique. »

Pierre-Marie Sève ne voit qu’un point positif dans cette affaire : la rapidité du processus judiciaire, puisque désormais la détention préventive d’un mineur ne peut excéder un an. C’est un effet de la réforme de la justice pénale des mineurs de Dupond-Moretti en 2021. Pour le reste… rien n’a changé, selon Matthieu Valet: « Y a-t-il moins de mineurs mis en cause ? Non. Y a-t-il moins de mineurs violents ? Non. » Le problème est que le juge n’a pas les mains libres sur l’excuse de minorité. « Il peut la lever entre 16 et 18 ans, nous rappelle Pierre-Marie Sève, or le coupable en avait 15 au moment des faits. Un juge devrait pouvoir l’abaisser selon son appréciation de la gravité des faits. »

« Un immense sentiment d’injustice »

Publiquement, le père de Matisse se montre mesuré dans sa critique du système. « On peut tout de même penser que les parents, estime Pierre-Marie Sève, éprouveront un immense sentiment d’injustice. La justice, comme trop souvent, ne laisse aux victimes que leurs yeux pour pleurer. » Les parents de Matisse vont devoir affronter un second procès tout aussi insupportable, car la mère de Rahim va être prochainement jugée pour avoir giflé Matisse alors qu’il agonisait… Matthieu Valet rappelle l’effarante réalité du danger: « Un tel drame n’est pas réservé à une partie restreinte de la population. La famille de Matisse, ça peut être la vôtre, la mienne demain. » Philippine, Lola, Thomas, Elias, Matisse et tant d’autres… toutes ces victimes sont autant de raisons de se battre contre l'ensauvagement du pays.

(*) Le prénom a été changé.

Samuel Martin

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