Mobilisés, les élus d’extrême gauche ont méthodiquement appliqué la vieille technique parlementaire consistant à défendre des amendements et des sous-amendements multiples afin de faire traîner les débats. L’examen des textes prenant fin à minuit, le temps dans une niche parlementaire est une denrée précieuse. À l’inverse, les députés Républicains ont brillé par leur absence. Une attitude « indigne » que dénonce Charles Alloncle, député UDR de l’Hérault. « Sur l’ensemble de la journée, les députés LR étaient au maximum deux présents », explique l’élu, à Boulevard Voltaire.
Les bancs LR vides dans l'Hémicycle
Le premier texte étudié de la journée portait sur la fin des accords franco-algériens de 1968. À la demande du gouvernement, par crainte que la remise en cause des accords ne soit préjudiciable à la cause de Boualem Sansal, Éric Ciotti a accepté de retirer son texte. Le deuxième visait à interdire l'exécution immédiate de peines d'inéligibilité. Le bloc central et la gauche, alliés de circonstance, ont vidé de sa substance une mesure que les opposants dénonçaient comme un sauvetage du soldat Marine Le Pen. Le troisième texte consistait à interdire les mariages des personnes en situation irrégulière. Une mesure très attendue par les maires. « Laisser les étrangers en situation irrégulière tirer profit du mariage revient à institutionnaliser la fraude. Le mariage ne peut devenir le passeport de ceux qui bafouent nos lois », a rappelé en séance le député RN de Vaucluse Hervé de Lépinau, qui n’a pas manqué de tacler, sur les réseaux, ses collègues LR absents, « qui avaient piscine ». L'image des bancs LR vides sur un sujet aussi important a marqué les esprits. Face à cette absence, sur un texte « de bon sens » que les Français soutiennent, les élus RN et UDR ne mâchent par leurs mots. « Ça fait bien longtemps qu’ils ne participent plus à rien, qu’ils ne votent rien », a raillé, sur TF1, le député RN Sébastien Chenu.
« Il y a les mots de Monsieur Retailleau et son agitation, a critiqué Louis Aliot, vice-président du RN, dans un message vidéo enregistré pour l’occasion, et il y a les faits qui sont têtus : cette loi qui n’aura pas été votée parce que les LR n’étaient pas à l’Assemblée et qu’ils ont boycotté le vote de cette loi. »
Une « posture politicienne »
« C’est un parti moribond qui est à son crépuscule, fustige Charles Alloncle, qui connaît les LR de l’intérieur puisqu’il fut président des Jeunes avec Sarkozy puis candidat à la présidence des Jeunes Républicains. « C’est une famille politique qui n’a plus de colonne vertébrale. » « Honte à mon ancien groupe aujourd’hui présidé par Laurent Wauquiez, qui trahit ses valeurs et fait le jeu des Insoumis ! », a tancé, pour sa part, sur X, Éric Ciotti.
« Les voix des LR n’ont pas pu vous manquer, puisque vous n’avez pas été capables d’emmener le moindre de vos textes jusqu’au vote, lui a répondu l’intéressé. Ce qu’il faut blâmer, c’est votre amateurisme. » Une défense qui peine à cacher une volonté manifeste de ne pas soutenir une initiative parlementaire UDR. Brigitte Barèges, députée UDR du Tarn-et-Garonne, ne cache pas auprès de BV sa « grande déception ». Elle fustige le « tir de barrage de l’ultra-gauche » et déplore « l’image catastrophique » que cela donne des travaux parlementaires. Alors que Charles Alloncle dénonce « la posture politicienne » des Républicains, la députée regrette la conduite du ministre de la Justice, Gérald Darmanin, qui, selon elle, a fait le jeu de La France insoumise dans une alliance de circonstance. En effet, le ministre aurait pu déclencher l’article 44, alinéa 2 de la Constitution : « Après l'ouverture du débat, le gouvernement peut s'opposer à l'examen de tout amendement qui n'a pas été antérieurement soumis à la commission. » Ainsi, tous les amendements visant à ralentir les débats auraient été supprimés et le vote sur la loi interdisant le mariage de clandestins sous OQTF aurait été possible. Brigitte Barèges y voit un « retour d’ascenseur » de Gérald Darmanin à LFI, celui-ci devant son élection au siège de député du Nord au désistement du candidat NFP.
Laurent Wauquiez pris en flagrant délit de mensonge
Dans la soirée du jeudi 26, interrogé à l’occasion d’un échange téléphonique avec Pascal Praud sur CNews, Laurent Wauquiez avait assumé l’absence de ses députés : « C’est normal, chaque député porte sa niche ; nous, on était présents quand on a porté les idées qui nous tenaient à cœur. » Le député de Haute-Loire s’en sortait par une pirouette en reprochant aux députés RN et UDR leur absence lors de la proposition de loi LR sur la suppression du droit du sol à Mayotte examinée en novembre 2024 lors de la niche parlementaire LR.
« Énorme mensonge », lui a répondu Marine Le Pen, sur X, chiffres à l’appui : 94 élus RN/UDR étaient dans l’Hémicycle pour voter en faveur du texte. En revanche, ce qui est bien réel, c’est l'abstention des députés LR, le 24 juin, lors du rejet de la proposition de loi de programmation énergétique qui prévoyait un moratoire sur les énergies renouvelables (éolien et photovoltaïque) et la relance du nucléaire.
Bruno Retailleau, chef du parti LR, devra expliquer ces choix qui doivent déboussoler plus d’un électeur de droite las, sans doute, des calculs partisans. En attendant, Robert Ménard, maire de Béziers, est toujours poursuivi pour avoir refusé le mariage d’un clandestin sous OQTF...
Yves-Marie Sévillia
https://www.bvoltaire.fr/texte-visant-a-interdire-le-mariage-des-clandestins-lr-aux-abonnes-absents/