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Auxerre : les secrets d’une villa antique révélés par l’archéologie

CC BY-SA 3.0 Reconstitution d'une villa romaine à Haselburg en Allemagne
CC BY-SA 3.0 Reconstitution d'une villa romaine à Haselburg en Allemagne
Chaque année, les Journées européennes de l’archéologie permettent de faire découvrir au public des pans méconnus de notre Histoire, sortis tout droit des profondeurs de la Terre. En 2025, l’événement prend une dimension toute particulière à Auxerre (Yonne), où une fouille préventive menée par l’INRAP révèle les vestiges monumentaux d’une luxueuse villa gallo-romaine. Située au lieu-dit Sainte-Nitasse, à trois kilomètres au sud de la ville, cette découverte exceptionnelle met en lumière l’importance de l’Auxerrois dans l’antique Gaule romaine.

Un chantier archéologique préventif

C’est dans le cadre du chantier d’aménagement de la liaison Sud d’Auxerre que les archéologues ont été appelés à intervenir. La zone était connue depuis le XIXe siècle pour ses traces antiques, mais seule une fouille partielle menée en 1966 avait jusque-là permis d’entrevoir une partie d’un bâtiment. Ce n’est qu’en 2024, à la faveur d’une prescription de l’État via la DRAC Bourgogne-Franche-Comté, que les équipes de l’INRAP ont pu entreprendre un chantier de fouilles beaucoup plus conséquent sur une surface de 1,6 hectare. Ce qu’ils ont mis au jour dépasse toutes les attentes.

Ce site correspond à une vaste villa antique datée entre le Ier et le IVe siècle, dont les dimensions et l’organisation architecturale témoignent d’un haut niveau de sophistication. Sur plus de 4 000 m², les archéologues ont pu dégager de nombreux éléments de la pars urbana, c’est-à-dire la partie résidentielle du domaine. Celle-ci s’articule autour d’un jardin central de plus de 450 m², doté d’un bassin au nord et d’une fontaine au sud. De larges galeries, probablement à colonnades, desservaient également les différentes pièces d’habitation, les salles de réception et les autres lieux de vie, notamment une cuisine

Une résidence luxueuse à la romaine

Cependant, ce qui impressionne tout particulièrement les spécialistes comme les visiteurs, c’est le raffinement des aménagements découverts. À l’est, des thermes parfaitement conservés ont été identifiés, avec leur système d’hypocauste (chauffage par le sol) encore visible. Mosaïques, fragments de colonnes sculptées et épais murs en pierre viennent aussi confirmer le caractère prestigieux de cette résidence.

Le plan général, la richesse des matériaux et la présence de plusieurs étages suggèrent que le propriétaire de la villa appartenait à l’élite gallo-romaine locale, sans doute un riche propriétaire foncier ou un notable de la région. La villa dominait vraisemblablement un vaste domaine agricole, la pars rustica, dont une partie a été découverte pour l’instant et laisse supposer l’existence de bâtiments annexes servant à l’exploitation des terres.

Un jalon précieux pour l’Histoire de la Gaule romaine

Cette découverte constitue une avancée majeure pour la connaissance de l’Antiquité dans le nord de la Bourgogne. Auxerre, située à proximité d’une voie secondaire de la Via Agrippa, était déjà connue pour ses vestiges gallo-romains, mais rarement une villa d’un tel prestige y avait été mise au jour.

Selon Alexandre Burgevin, responsable du chantier pour l’INRAP, « ce chantier est aussi une chance parce qu’il nous permet de fouiller un édifice remarquable de manière complète, cette ampleur de décapage n’est pas si fréquente dans le cadre de l’archéologie préventive. Et puis nous avons trouvé, non seulement des fondations, mais encore des murs en élévation sur une hauteur d’environ un mètre : cet état de conservation, en milieu rural, est assez exceptionnel. »

Des fouilles, encore des fouilles

Il reste aussi de nombreuses choses à découvrir sur ce site avant la fermeture du chantier de fouille, en septembre prochain. En effet, les archéologues, au-delà des restes des bâtiments trouvés, ont également mis au jour plusieurs petits objets du quotidien des Gallo-Romains, comme des éléments de parures. Sur cette lancée, les équipes de l’INRAP souhaiteraient également mettre la main sur les fosses à déchets des anciens habitants du site. En effet, ces dernières, au-delà de leur caractère peu ragoûtant, sont en réalité de véritables filons d’or, car elles témoignent des habitudes alimentaires de l’époque grâce aux restes retrouvés.

Néanmoins, les fouilles ne s’arrêteront pas aux seuls vestiges gallo-romains. En effet, en bordure de la villa, un bâtiment médiéval a été exhumé. Pour les archéologues, et selon des textes anciens, il pourrait s’agir d’un édifice comprenant une chapelle, ayant appartenu au comte d’Auxerre au XIIIe siècle. De plus, les archéologues veulent également poursuivre leurs recherches en s’intéressant aux états antérieurs du site. Ce dernier pourrait en effet renfermer des vestiges plus anciens, remontant à la fin de l’âge du bronze, voire au Néolithique.

Le site de Sainte-Nitasse sera exceptionnellement ouvert gratuitement au public, le 15 juin, à l’occasion des Journées européennes de l’archéologie afin que chacun puisse découvrir de ses propres yeux une page de notre Histoire en pleine exhumation.

Eric de Mascureau

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