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La monarchie et les prévaricateurs

Un douzième texte de notre rubrique « Souvenez-vous de nos doctrines » est à retrouver aujourd’hui, de Louis XIV dans ses Mémoires et instructions pour le Dauphin

Ce fut alors que je crus devoir mettre sérieusement la main au rétablissement des finances, et la première chose que je jugeai nécessaire, ce fut de déposer de leurs emplois les principaux officiers par qui le désordre avait été introduit ; car depuis le temps que je prenais soin de mes affaires, j’avais de jour en jour découvert de nouvelles marques de leurs dissipations et principalement du surintendant.

La vue des vastes établissements que cet homme avait projetés et les insolentes acquisitions qu’il avait faites ne pouvaient que convaincre mon esprit du dérèglement de son ambition ; et la calamité générale de tous mes peuples sollicitait sans cesse ma justice contre lui. Mais ce qui le rendait plus coupable envers moi était que, bien loin de profiter de la bonté que je lui avais témoignée en le retenant dans mes conseils, il en avait pris une nouvelle espérance de me tromper et, bien loin d’en devenir plus sage, tâchait seulement d’en être plus adroit.

Mais quelque artifice qu’il put pratiquer, je ne fus pas longtemps sans reconnaître sa mauvaise foi. Car il ne pouvait s’empêcher de continuer ses dépenses excessives, de fortifier des places, d’orner des palais, de former des cabales et de mettre sous le nom de ses amis des charges importantes qu’il leur achetait à mes dépens, dans l’espoir de se rendre bientôt l’arbitre souverain de l’État.

Quoique ce procédé fût assurément fort criminel, je ne m’étais d’abord proposé que de l’éloigner des affaires ; mais ayant depuis considéré que de l’humeur inquiète dont il était, il ne supporterait point ce changement de fortune sans tenter quelque chose de nouveau, je pensai qu’il était plus sûr de l’arrêter.

Je différai néanmoins l’exécution de ce dessein, et ce dessein me donna une peine incroyable ; car, non seulement, je voyais que pendant ce temps-là il pratiquait de nouvelles subtilités pour me voler, mais ce qui m’incommodait davantage était que, pour augmenter la réputation de son crédit, il affectait de me demander des audiences particulières ; et que pour ne lui pas donner de défiance, j’étais contraint de les lui accorder et de souffrir qu’il m’entretint de discours inutiles pendant que je connaissais à fond toute son infidélité.

Vous pouvez juger qu’à l’âge où j’étais, il fallait que ma raison fit beaucoup d’efforts sur mes ressentiments pour agir avec tant de retenue. Mais d’une part, je voyais que la déposition du surintendant avait une liaison nécessaire avec le changement des fermes et, d’autre côté, je savais que l’été où nous étions alors était celle des saisons de l’année où ces innovations se faisaient avec le plus de désavantage, outre que je voulais avant toute chose avoir un fond entre mes mains de quatre millions, pour les besoins qui pourront survenir. Ainsi, je me résolus d’attendre l’automne pour exécuter ce projet.

Mais étant allé vers la fin du mois d’août à Nantes, où les Etats de Bretagne étaient assemblés, et de là voyant de plus près qu’auparavant les ambitieux projets de ce ministre, je ne pus m’empêcher de le faire arrêter en ce lieu même, le 5 septembre.

Toute la France, persuadée aussi bien que moi de la mauvaise conduite du surintendant, applaudit à cette action.

https://www.actionfrancaise.net/2025/10/18/la-monarchie-et-les-prevaricateurs/

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