Cette incapacité à nommer l’ennemi ne touche, hélas, pas seulement la gauche. Au centre, aussi, on a du mal à appeler un chat un chat. Yaël Braun-Pivet, Stéphane Séjourné et Élisabeth Borne s’en sont également tenus à une vague condamnation du « terrorisme ». Gabriel Attal a fait encore plus fort, signant un tweet qui aurait parfaitement pu concerner un accident de la route. « Le 13 novembre 2015, l’horreur a frappé la France », a-t-il déploré, sur X. Plus flou, tu meurs.
La peur des mots
Ce 13 novembre 2025, plusieurs plaques commémoratives ont été installées sur les lieux des attaques djihadistes. Il y en a eu une au Stade de France, en mémoire de Manuel Dias, une autre devant le bar parisien La Belle Équipe, une troisième devant Le Petit Cambodge et Le Carillon. Il y est question d’« attentats », de « terrorisme », mais nulle mention de la religion qui a inspiré ces assassinats.
Même pudeur, sur la place Saint-Gervais, où un « Jardin du souvenir » a été inauguré. La mairie de Paris indique que ce lieu incarne « les expériences douloureuses du Nord-Est parisien » et constitue une « oasis de calme et d’apaisement en hommage à la vie et à la résilience ». Pour la mise en cause des assassins et la lutte contre leur idéologie mortifère, il faudra manifestement aller voir ailleurs.
Ce n’est pas la première fois que la gauche refuse de nommer l’islamisme. Elle avait également eu toutes les peines du monde à utiliser les bons mots, lors de l’affaire Samuel Paty. Malgré la brutalité extrême de l’attentat, euphémismes, ellipses et périphrases avaient été généreusement employés par les commentateurs, jusqu’au sein de l’Éducation nationale. « La peur est déjà à l’œuvre, s’était alors indigné le collectif Vigilance Universitésn dans les colonnes de l’Opinon. Les communiqués syndicaux réagissant à l’assassinat de Samuel Paty se caractérisent généralement par le refus de nommer l’islamisme. Pour nombre de syndicalistes offensifs, cet assassinat serait pour ainsi dire sans auteur. » Même volonté d’éluder la-religion-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom à Paris où Anne Hidalgo inaugura, en février 2020, le jardin Arnaud-Beltrame, ornementé d’une plaque commémorative sur laquelle figurait l’inscription « Victime de son héroïsme »…
Un silence complice
À défaut d’oser nommer l’ennemi, la gauche et le centre compensent en adoptant un ton ampoulé et des postures théâtrales. « Nous n’oublions aucun visage, aucun nom, aucun geste de courage dans cette nuit du 13 novembre. Cette mémoire nous unit, nous guide et nous oblige », a ainsi lancé la vaillante Yaël Braun-Pivet. Mais à quoi cette mémoire nous « oblige »-t-elle concrètement ? Ni à la dénonciation de l’islam guerrier, ni à la lutte contre l’immigration invasive, manifestement.
En ne nommant pas l’islamisme par peur de stigmatiser les musulmans, certains espèrent conjurer le mal alors que leur déni du réel ne fait que le renforcer. Laissons le mot de la fin à Boualem Sansal, qui sait de quoi il parle en matière d’islamisme : « Le silence, fût-il d'or, n'est pas le coupe-feu miracle que l'on croit mais l'oxygène qui embrase la maison. » À méditer.
Jean Kast
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